-
➤ Neuropsychologie de la mémoire dans l'expérience traumatique
Source: "Syndromes traumatiques du viol et de l'inceste" - Jean Michel Darves-Bornoz. Congrès de psychiatrie et de neurologie, Toulon, 1996. (document PDF intégral en fin d'article)
Voir également Troubles dissociatifs et amnésie traumatique
ENCODAGE ET RECOUVREMENT DES SOUVENIRS D'EXPÉRIENCES TRAUMATIQUES
Les souvenirs traumatiques ne sont pas des souvenirs comme les autres. Le traumatisme modifie les mécanismes normaux d'encodage et de recouvrement des souvenirs de l'expérience traumatique. Comme le notait Pierre Janet pour le cas Irène, coexistent chez le sujet traumatisé des phénomènes hypermnésiques et des phénomènes amnésiques.
Cette question a une importance pratique car la controverse sur les vrais et faux souvenirs de violences sexuelles bat son plein. La question est passablement compliquée car lorsque les hommes essaient de se souvenir des événements passés, seuls les souvenirs qui ont été encodés sous une forme langagière (mémoire explicite) sont susceptibles d'être recouvrés. La mémoire non langagière (implicite) qui opère de son côté, n'est pas susceptible d'être rappelée à la conscience (...)
L'encodage non-verbal des souvenirs est une fonction qui existe dès la naissance. Il repose sur des images. Il n'est pas affecté par l'altération de la conscience (par anesthésie par exemple). En particulier, pendant un traumatisme, l'état de conscience est altéré à des degrés divers mais l'encodage des expériences vécues sur un mode non-verbal continue à fonctionner pendant la période de perturbation de la conscience. Cela explique aussi que des souvenirs d'expériences traumatiques survenues avant l'âge de deux ou trois ans puissent être présents à la mémoire, même s'ils sont plus flous, fondés sur une imagerie et non sur un récit.
La mémoire déclarative (ou explicite) se réfère à des souvenirs conscients de faits et d'événements. La mémoire autobiographique (Rubin 1986) relève de cette mémoire déclarative. La mémoire non-déclarative (ou implicite) se réfère à un groupe hétérogène de capacités dans lesquelles l'expérience modifie le comportement inconsciemment sans qu'elle donne accès à un quelconque contenu de mémoire (Squire 1994). Ces capacités sont des savoir-faire moteurs, perceptifs ou cognitifs, des habitudes, des amorçages permettant une facilité accrue pour détecter ou traiter un objet perçu sur la base de l'expérience récente, des conditionnements classiques simples (y compris certaines sortes d'apprentissage émotionnel), et des connaissances qui se réfèrent plus à la performance qu'à la mémoire.
Sur le plan anatomique, le rôle de l'hippocampe dans les processus de mémorisation avait été mis en valeur par Delay et Brion (Delay et Brion 1969). On considère actuellement que l'hippocampe fonctionne comme un module de la mémoire dont la fonction est impliquée dans la formation de représentations pour le long terme à partir d'expériences nouvelles et dans la consolidation des souvenirs (Moscovitch et Ulmita 1990). Le cortex pré-frontal joue le rôle de mémoire de travail en utilisant les souvenirs déjà engrammés, et en les intégrant à un contexte afin de planifier de nouvelles activités (Winocur 1992). L'amygdale, en appréciant l'importance des signaux transmis, est impliquée dans la régulation de l'encodage des souvenirs, les stimulations stressantes entraînant la libération de Noradrénaline dans l'amygdale et renforçant de ce fait la rétention du souvenir (McGaugh 1992). Un relais situé sur le thalamus permet de transformer les signaux des organes sensoriels en données sensorielles utilisables par le cortex sensoriel d'un part et l'amygdale d'autre part (LeDoux 1992).
Lors d'un événement traumatique, la conscience est altérée, il s'ensuit que les relations hippocampe-cortex préfrontal et cortex préfrontal-amygdale sont perturbées voire interrompues. Dans le même temps les organes sensoriels fournissent des signaux très importants au thalamus et par suite à l'amygdale. Par conséquent, l'amygdale transmet à l'hippocampe un signal accru pour favoriser la rétention du souvenir de l'événement et ce, sans qu'il y ait de
rétroaction du cortex préfrontal sur l'amygdale. De plus, l'événement est mémorisé sans que l'événement soit replacé dans un contexte, dans une biographie. Le souvenir reste donc puissant mais isolé. Il est de surcroît très sensoriel. Ce n'est qu'avec le temps qu'une mémoire autobiographique de l'événement traumatique peut se construire à l'aide des fragments de mémorisation sensori-motrice. Cet ensemble de concepts permet de comprendre ce qui est à l'oeuvre dans la mémorisation puis dans les souvenirs de sujets atteints d'un Syndrome Secondaire à un Stress Traumatique (PTSD)Source :
« ➤ MK-Ultra : le témoignage de Karen Wetmore (France 3 - 07/2015)➤ Archive: François Léotard nous parle d'un "monde occulte et caché" que les médias ignorent... »
-
Commentaires
La compréhension des mécanismes de la mémoire mémoire préverbale , du phénomène de répression des expériences traumatiques éprouvées dès la naissance et encapsulées dans les niveaux les plus archaïques du cerveau ( le tronc cérébral et le système limbique) et les mécanismes de censure pour éviter leur accès à la conscience n'est pas nouvelle.
Déjà en 1975 les docteurs A. Janov et M. Holden l'avaient exposés les résultats de leurs travaux dans l' ouvrage , "The Primal Man: The new consciousness", non traduit en français mais encore disponible aux USA.
Les travaux de R.Melzack et P. D. Wall ont confirmé le phénomène du "portillon" exposés dans cet ouvrage précité dans leur livre "Le défi de la douleur" 1982.
Les sensations ou sentiments très douloureux réprimés engendre des défenses qui permettent d'anesthésier le corps et le cerveau grâce aux endorphines du cerveau qui fonctionnent comme un analgésique A. Janov "Prisonner of pain" 1980, traduit en français ou du même auteur et plus récent concernant la mémoire préverbale "Le corps se souvient", 1996.