• La Personnalité Fractionnée et Amnésique - Comprendre le Trouble Dissociatif de l’Identité (PDF)

    Préambule

    Le Trouble Dissociatif de l’Identité (T.D.I.) est une maladie psychiatrique reconnue par des professionnels de la santé mentale, il existe une vaste littérature médicale sur le sujet. Le DSM-5 valide ce trouble en ces termes :

    « Présence d’au moins deux états de personnalité distinct et d’épisodes récurrents d’amnésie »

    Ce trouble doit être diagnostiqué par un professionnel compétent.

    Certaines personnes, notamment adolescents et jeunes adultes, peuvent utiliser et s’identifier à des termes tels que « personnalité multiple », « système », « alter » etc, de manière inappropriée et sans comprendre pleinement la complexité du TDI ; qui ne doit pas être confondu avec une simple expression de l'identité personnelle ou une tendance culturelle déviante.
    Certains psychiatres s’alertent et parlent d’une véritable « épidémie » d’autodiagnostics, un effet de mode entraînant une certaine confusion qui décrédibilise ce trouble auprès du grand public, mais aussi au sein même de la communauté psychiatrique, très peu formée sur les troubles dissociatifs. Il est important de comprendre que le TDI n’est pas un « mode de vie pluriel », une originalité narcissique ou une identité de genre. Il s’agit d’un trouble mental complexe pouvant causer des souffrances et des difficultés importantes pour les personnes qui en souffrent.
    Il est crucial de sensibiliser sur la différence entre les identités de genre, relevant d’un certain relativisme ou subjectivisme, et les troubles dissociatifs sévères relevant d’un passé extrêmement traumatique. Nous assistons à l’heure actuelle à une confusion généralisée provoquée par cette vague d’autodiagnostics, une appropriation de la condition à des fins d'identification personnelle ou de tendance culturelle pouvant non seulement nuire à la crédibilité du trouble, mais aussi à la santé et au bien-être des personnes qui en souffrent réellement.
    Le TDI est un trouble mental qui nécessite une attention et un traitement appropriés, au-delà des clichés et de la glamourisation véhiculés par le cinéma et les réseaux sociaux. Il est important de sensibiliser les professionnels de la santé mentale mais aussi le grand public sur les causes, les signes et les symptômes du TDI, afin de garantir un diagnostic et un traitement appropriés pour les personnes qui en souffrent réellement.

    C’est la raison pour laquelle ce dossier a été créé et diffusé gratuitement, en réponse à un manque d’informations sur le sujet dans la sphère francophone. Son contenu est extrait du livre « MK : Abus Rituels et Contrôle Mental » paru en 2016.

    Alexandre Lebreton, avril 2023

    Liens pour télécharger le dossier PDF : 

    https://www.fichier-pdf.fr/2023/05/06/la-personnalite-fractionnee-et-amnesique--comprendre-le-trouble-/

    https://fr.scribd.com/document/643292864/La-Personnalite-Fractionne-e-et-Amne-sique

    http://ekladata.com/8896Lor8cOTEvbLY_Vc28sAcg84

    _____________________

     

    Trouble Dissociatif de l'Identité : Réelle Validation Médiatique ou Effet de Mode Dérivatif ?

    ➡️ https://www.youtube.com/watch?v=DnWPyTuOwTU

    La Crédibilité du Trouble Dissociatif de l'Identité en Péril Face à la « Culture Plurielle »

    ➡️ https://www.youtube.com/watch?v=MqxwVxWN32w

     

    1 - Introduction

    La connaissance et la compréhension des troubles dissociatifs et plus particulièrement du trouble dissociatif de l'identité (personnalité multiple) et de l'amnésie traumatique est un point essentiel lorsque l'on cherche à comprendre le processus de contrôle mental basé sur les traumatismes. La connaissance de ces troubles psychotraumatiques permet en effet de saisir que l'esprit humain peut se fractionner en plusieurs identités indépendantes les unes des autres, séparées, cloisonnées, par des murs amnésiques. Nous pouvons ainsi comprendre que l'esprit d'un individu est potentiellement programmable tel un ordinateur avec des fichiers et des codes d'accès. Ce phénomène de fracturation de la personnalité est la pierre angulaire des abus rituels car il "déverrouille" la psyché qui devient alors accessible pour y intégrer une programmation.
    L'horreur et la peur vécues par un enfant subissant des sévices extrêmes (inceste, abus rituels) fait que son cerveau va réagir par divers degrés de dissociation proportionnels à la gravité et à la répétition des expériences traumatiques. C'est un mécanisme de défense naturel face à une terreur psychique intense et à une douleur physique extrême. La plupart des enfants qui ont été abusés ainsi durant la petite enfance se dissocieront totalement des événements vécus et seront souvent incapables de se rappeler consciemment ce qu'il s'est passé. La dissociation peut aller jusqu'à l'éclatement de la personnalité en de multiples alter, ce qui est le stade le plus extrême, celui recherché par les bourreaux qui visent à établir un contrôle mental sur la victime.

    Le cas Régina Louf

    En avril 2009, le site Wikileaks a mis en ligne un dossier PDF de 1235 pages contenant les auditions et les procès verbaux de l'affaire Dutroux (Belgium: Dutroux X-Dossier summary). Le document contient un PV (N°116.231) daté de novembre 1996 rapportant que Régina Louf (le témoin X1) parle de ses différentes personnalités lors de ses auditions avec les policiers. Ces derniers notent chez elle d'importantes différences d'écriture. Le PV N° 116.232 rapporte que Régina Louf parle d'une de ses personnalités alter nommée "Hoop" ("espoir" en flamand) en ces termes : « Elle peut disparaître très profondément et réapparaître en une fois. » Dans le PV N°116.234, il est noté à propos de Régina Louf : « Elle se retrouve entière et comprend le pourquoi de ses multiples personnalités. Elle comprend qu'une seule personne n'aurait pas pu supporter. » Dans le dossier X de l'affaire Dutroux, c'est le témoignage de Régina Louf qui est le plus complet et le plus connu. Depuis sa naissance, sa famille l'a conditionné pour servir d'esclave sexuelle. Elle déclare elle-même qu'il s'agissait d'une pratique transmise de génération en génération, que sa grand-mère avait abusé de sa mère et ainsi de suite… Les sévices et les violences extrêmes qu'elle a subi depuis la petite enfance dans ce réseau ont finit par créer chez elle une personnalité multiple, un trouble dissociatif de l'identité. Elle a été diagnostiquée par cinq thérapeutes désignés par la justice belge lors de l'étude du dossier X de l'affaire Dutroux.
    Voici un extrait du livre "Les dossiers X : Ce que la Belgique ne devait pas savoir sur l'affaire Dutroux" qui aborde clairement la question de la personnalité multiple de Régina Louf :

    "L’une des rares décisions prises pendant une réunion Obélix, le 25 avril, est d’engager un collège de cinq experts psychiatres pour examiner X1. La demande en a été faite quelques mois plus tôt par l’adjudant De Baets, mais depuis que des magistrats des quatre coins du pays s’occupent de l’affaire, tout se déroule un peu plus lentement. Chacun des cinq experts a sa propre spécialisation. Et chacun doit évaluer X1 et son témoignage de son angle professionnel. Le collège est dirigé par le professeur Paul Igodt, un neuropsychiatre louvaniste, et composé pour le reste de ses collègues Peter Adriaenssens et Herman Vertommen, de Johan Vanderlinden, un médecin de l’hôpital psychiatrique de Kortenberg, et du psychiatre Rudy Verelst. En raison de sa spécialisation, le pédopsychiatre Peter Adriaenssens a pour mission particulière d’examiner les enfants de X1, mais cela ne se fera jamais.
    Le collège des experts doit vérifier les capacités de mémoire de X1 et examiner s’il a été question de suggestivité de la part des enquêteurs lors des auditions. Ce qui est ainsi littéralement écrit dans l’apostille du juge Van Espen montre qu’il a déjà été briefé, fin avril, sur les relectures qui ont démarré en secret sous la houlette du commandant Duterme. Jusqu’alors, personne n’a jamais formulé de remarques sur le déroulement des auditions, qui sont au contraire qualifiées d’"exemplaires". Seuls Duterme et quelques-uns de ses fidèles ne partagent pas cet avis. "Je l’ai clairement senti", dit Regina Louf, "les psychiatres ont su très vite que leur travail ne changerait plus rien. Ils ont commencé à peu près au moment où De Baets était mis à l’écart. Au total, j’ai passé plus de trente heures à parler et à subir des tests psychologiques. Parfois, c’étaient vraiment des tests ridicules, mais ces gens essayaient de faire leur boulot honnêtement. Je pense qu’ils se sont retrouvés entre deux feux. Ils étaient en contact avec les enquêteurs qui leur ont certainement raconté que j’étais folle à lier. Lorsqu’ils me parlaient, il planait toujours une ambiance du genre: nous, on trouve que vous allez bien, mais on nous dit que... Lors du dernier entretien, Vertommen m’a déconseillé d’accepter de me faire auditionner sous hypnose. Il m’a dit de penser à ma famille et de me résigner au fait qu’on ne pourrait pas faire grand-chose de mon témoignage."
    Lorsqu’on demande l’avis de scientifiques, il est rare que la réponse soit noire ou blanche, et le plus souvent, elle est grise avec beaucoup de nuances changeantes. C’est également le cas du rapport de huit pages que le professeur Igodt envoie le 8 octobre 1997 à Van Espen. Ce rapport indique – tout comme X1 l’avait fait dès le premier jour – qu’on a affaire à une personne souffrant de troubles dissociatifs de l’identité. Igodt parle même, dans son rapport, d’un «trouble de personnalité-limite» (borderline). Mais, ajoute-t-il: "Grâce à de nombreuses années de thérapie l’intéressée a cependant réussi (...) à parvenir à un mode de fonctionnement intégré; ses différentes personnalités (alter), dont elle peut nommer certaines, collaborent assez bien et l’intéressée parvient à contrôler chacune de ces personnalités partielles, de telle sorte que les pertes de contrôle ne surviennent que rarement et de manière limitée. Une situation qui a d’ailleurs pu être remarquée au cours de l’examen clinique psychiatrique anamnestique: en dehors de rires quelque peu incontrôlés, plus particulièrement lorsqu’il est question des abus sexuels les plus horribles, la patiente se contrôle assez bien et aucune modification dissociative n’a pu être constatée. Comme il a déjà été mentionné, il faut attribuer cela en grande partie à la période assez longue de psychothérapie qu’a déjà accomplie l’intéressée."

    En ce qui concerne les causes de ces troubles, Igodt plaide formellement en faveur de X1: "L’examen clinique psychiatrique anamnestique confirme cependant le soupçon d’abus sexuels massifs dans le passé de l’intéressée. A la question de savoir si ces abus se sont produits et ont effectivement été importants en intensité, il semble qu’il faille répondre par l’affirmative. Ces abus massifs semblent d’ailleurs constituer le principal facteur étiologique des syndromes psychiatriques constatés, ce qui est conforme aux abondants résultats d’examens en la matière."
    Le rapport Igodt peut sans doute être considéré comme un des rares éléments d’enquête objectifs qui sont encore versés au dossier après l’été 1997. (« Les dossiers X : Ce que la Belgique ne devait pas savoir sur l'affaire Dutroux" - Annemie Bulte et Douglas de Coninck, 1999, p.249-250)

    Dans un documentaire de France 3 intitulé "Passé sous silence: Témoin X1 - Régina Louf" diffusé en 2002, le psychiatre Paul Igodt, a déclaré à propos des troubles dissociatifs de Régina Louf : "Lors de l'examen de Régina Louf, il était évident par beaucoup d'indices qu'il s'agissait d'une personne qui était gravement perturbée par des abus sexuels prolongés dans la petite enfance. Mais c'est en même temps, et on voit cela très souvent, quelqu'un de solide et d'intelligent, qui a gardé intact des mécanismes de défense et de survie formidables. Je crois que l'on peut dire que les abus sexuels prolongés et très graves qu'elle a subi ont donné naissance au développement d'une personnalité multiple avec des alter-ego. Les victimes de viols ou d'abus sexuels vous diront : "je n'étais pas là dans ce corps, j'étais ailleurs… Je me dissociais." Mais cela n'est pas de la folie, ce n'est pas de la schizophrénie, ni de la mythomanie. C'est évidemment la recherche de sa propre histoire, de sa vérité, et c'est un processus douloureux et tâtonnant."
    À l'âge de 11 ans, la mère de Régina louf lui a présenté un certain Tony V. en lui disant : "Désormais tu lui appartiens, il est ton propriétaire." Cet individu est alors devenu son "maître". Il entretenait avec elle une relation ambiguë mêlant proxénétisme avec un attachement malsain passant pour de l'amour entre l'enfant et son maître. Il ne s'agit ni plus ni moins que d'un contrôle mental basé sur les traumatismes. C'est ce Tony qui avait la charge de Régina et c'est lui qui la "téléguidait" dans le réseau pédocriminel. Même après ses 18 ans, Tony a continué à la poursuivre, et bien qu'elle se soit mariée, il a réussi à la manipuler pour la convaincre certaines fois de retourner participer à des abus rituels dans le réseau : elle n'avait pas réussi à s'en détacher totalement. L'avocate de Régina Louf, Patricia van der Smissen, déclare dans le documentaire "Les Dossiers X" (Zembla TV NED3 - 2004) qu’elle pensait que Tony l'avait en quelque sorte "protégée" et que cela expliquait le fait qu'elle soit restée en vie.

    Dans son autobiographie 'Zwijgen is voor daders - De getuigenis van X1' (Le silence est pour les coupables, le témoignage de X1) publié en 1998, Régina Louf décrit comment ses personnalités alter ont toujours le même âge qu'à leur création lors des expériences traumatiques. Elle explique également comment son écriture diffère selon l'alter qui est actif. Dans ce livre, elle décrit clairement le phénomène de dissociation qui arrive lors des traumatismes, des troubles dissociatifs pouvant aller jusqu'à un fractionnement de personnalité.

    "Ce livre a commencé à prendre forme en juillet 1988, lorsque pour la première fois j'ai posé par écrit mes mémoires et mes cauchemars dans un carnet. J'ai alors découvert que j'avais différents styles d'écriture, et chaque type d'écriture était une partie bien distincte de "moi". Cela était très effrayant, d'autant plus que souvent, je ne me rappelais pas de ce que j'avais écris. Lorsque je relisais les pages, je trébuchais sur des mémoires qui étaient enfouies en moi depuis longtemps. Je n'avais jamais vraiment oublié les faits, ils avaient simplement été dispersés dans différentes personnalités, chacune avec ses propres traumatismes… En l'espace de six semaines, j'avais déjà écrit beaucoup du contenu du livre, un livre qui s'est terminé auprès des enquêteurs du BOB (…)
    Plus que jamais, j'ai découvert que j'avais des trous noirs. J'ai été à l'école, j'ai eu de bonnes notes, j'ai même eu plusieurs camarades de classe, mais d'une certaine façon tout cela s'était déroulé sans moi. C'était comme si quelqu'un d'autre prenait le dessus dès que les portes de l'école se refermaient derrière moi. Comme si la 'Ginie' maltraitée était mise de coté jusqu'à ce que Tony se tienne à nouveau dans mon lit ou à la porte de l'école. La 'Ginie' maltraitée était difficilement consciente de la vie à l'école et de la vie de famille, l'autre 'Ginie' ne semblait pas présente durant les abus, et donc elle pouvait vivre 'normalement' (…)

    À Knokke, chez ma grand mère, les adultes s'étaient rendus compte que je parlais avec les voix dans ma tête, que je changeais rapidement d'humeur, ou même que je parlais parfois avec une autre voix ou un autre accent. Bien que je n'avais que 5 ou 6 ans, je compris que ces choses là étaient bizarres et que ce n'était pas permis. J'ai donc appris à cacher mes voix intérieures, mes autres 'moi'. Après ce qui est arrivé à Clo, ce sentiment bizarre que j'étais parfois dirigée par ces voix intérieures devint plus fort. Après l'initiation, je ne résistais plus aux voix dans ma tête. J'étais heureuse de disparaître dans le néant, pour seulement reprendre conscience quand Tony était là. La douleur semblait ainsi plus supportable (…)

    Tony était le seul adulte qui comprit que quelque chose n'allait pas dans ma tête. Cela ne le dérangea pas du tout, au contraire, il le cultivait... Il me donnait différents noms: "Pietemuis", "Meisje", "Hoer", "Bo". Les noms devinrent lentement une part de moi. La chose étrange était que si il mentionnait un nom, la personnalité qui correspondait au nom était immédiatement appelée :
    - « Pietemuis » (petite souris) devint le nom de la petite fille qu'il ramenait à la maison après l'abus - une petite fille effrayée et nerveuse qu'il pouvait réconforter en lui parlant d'une façon bienveillante et paternelle.
    - « Meisje » (fille) était le nom de la partie de moi qui lui appartenait exclusivement. Si il m'abusait dans mon lit tôt le matin, par exemple, ou s'il n'y avait personne autour de nous.
    - « Hoer » (pute), était le nom de la partie de moi qui travaillait pour lui.
    - « Bo » était la jeune femme qui s'occupait de lui s'il était saoul et avait besoin d’aide.

    « Maintenant tu me laisses m'occuper de ça », disait-il quand je lui demandais avec curiosité pourquoi il me donnait tant de noms, il rajoutait : « Papa Tony te connais mieux que tu ne te connais toi même… Et c'était malheureusement vrai. »
    (« Zwijgen is voor daders - De getuigenis van X1 » - Regina Louf, Éd. Houtekiet, 1998)

    Dans le reportage de France 3 « Passé sous silence: Témoin X1 », l'adjudant Patrick de Baets chargé alors du dossier X dans l'affaire Dutroux, a déclaré à propos de Régina Louf :

    Elle avait un problème pour tout mettre sur une ligne de temps, mais elle donnait assez d'éléments pour faire une bonne enquête. C'était en fait un puzzle que l'on jetait sur une table mais qui tenait la route…et qui était cohérent….


    2 - La Dissociation

    Chez l'être humain, le phénomène de dissociation se manifeste à plusieurs degrés. Il peut s'agir d'une légère transe, une dissociation mineure de la vie de tous les jours, comme lorsque vous lisez une page de livre pour réaliser à la fin que vous n'avez absolument rien retenu de ce que vous venez pourtant bien de lire. Mais cette fonction naturelle peut aller jusqu'à une psychopathologie lourde nommée le trouble dissociatif de l'identité (T.D.I.) : le degré de dissociation le plus extrême résultant de graves traumatismes. Le terme "Dissociation" fut employé pour la première fois en 1812, dans un texte médical rédigé par Benjamin Rush, un des pères de la psychiatrie américaine.
    En 1889, le Dr. Pierre Janet (un des pères français du concept de dissociation) a écrit une thèse intitulée "l'automatisme mental", dans laquelle il présente 21 cas d’hystérie et de neurasthénie, dont plus de la moitié sont traumatiques. Janet démontre que ces états peuvent être traités et réduits grâce à l'hypnose. Pour lui, il s'agit d'une "dissociation de la conscience", l'hystérie étant provoquée par la mémoire brute de l’expérience traumatique faisant bande à part dans un recoin de la conscience. Tel un corps étranger, cette mémoire inconsciente suscite des actes et des rêveries archaïques, inadaptés, automatiques, sans liaison avec le reste de la conscience, qui elle, continue d’inspirer des pensées et des actes circonstanciés et adaptés.²
    Dès le début du XXème siècle, Pierre Janet et Charles Myers ont décrit ce processus de dissociation comme un "scindement de la personnalité". Janet, bien avant que les causes neurochimiques de ce phénomène ne soient établies, a expliqué qu'il s'agissait, dans une forme primaire, d'une dissociation entre le système de défense de l'individu et les systèmes qui impliquent la gestion de la vie quotidienne et la survie de l'espèce. Myers décrit cette dissociation structurelle primaire en termes de division entre "la personnalité apparemment normale" (PAN) et la "personnalité émotionnelle" (PE). La PE se trouve bloquée dans l'expérience traumatique et n'arrive pas à devenir un récit de souvenir du trauma, c'est à dire une mémoire narrative. Tandis que la PAN est associée à l'évitement des souvenirs traumatiques, au détachement, à l'anesthésie et à une amnésie partielle ou totale. Ce sont en effet deux entités bien distinctes. Certaines observations cliniques indiquent, par exemple, qu'elles sont associées à un sens de soi différent, et des découvertes préliminaires en recherche expérimentale sur les troubles dissociatifs de l'identité (T.D.I.) suggèrent qu'elles répondent différemment aux souvenirs de traumatismes et aux stimulus menaçants traités de façon préconsciente.³

    Les troubles psychotraumatiques ont été définis dans les années 80 en commençant par l'État de Stress Post-Traumatique (E.S.P.T.) qui se manifeste à la suite d'une expérience traumatisante et qui va persister dans le temps avec des flashbacks, des insomnies, des cauchemars, une hypervigilance, etc. La définition des troubles dissociatifs est arrivée par la suite dans le DSM-IV (Manuel diagnostic et statistique des troubles mentaux - USA) qui les caractérise par "une perturbation soudaine ou progressive, transitoire ou chronique de fonctions normalement intégrées (conscience, mémoire, identité ou perception de l'environnement". Ils comprennent les cinq troubles suivants :
    - L'amnésie dissociative: caractérisée par une incapacité à évoquer des souvenirs personnels importants, habituellement traumatiques ou stressants.
    - La fugue dissociative: caractérisée par un départ soudain et inattendu du domicile ou du lieu de travail, avec incapacité de se souvenir de son passé, soit l’adoption d’une nouvelle identité, soit une confusion concernant l’identité personnelle.
    - Le trouble dissociatif de l’identité (personnalité multiple): caractérisé par la présence d'au minimum deux identités distinctes qui prennent tout à tour le contrôle de l'individu ; ce dernier se trouve incapable d’évoquer des souvenirs personnels.
    - Le trouble de dépersonnalisation: caractérisé par un sentiment prolongé ou récurrent de détachement de son propre fonctionnement mental ou de son corps, l’appréciation de la réalité demeurant intacte.
    - Le trouble dissociatif non spécifié dont la caractéristique principale est un symptôme dissociatif qui ne répond pas aux critères précédents des troubles dissociatifs spécifiques.
    Le psychologue clinicien américain James Randall Noblitt a classé les types de dissociation en cinq catégories :
    - Dissociation de la conscience: Arrive lors des états de transe. De tels états varient en intensité, pouvant aller d'un état légèrement embrumé à un profond état de stupéfaction et d'engourdissement physique.
    - Dissociation de la mémoire: Lorsque la personne a de larges portions de sa mémoire qui disparaissent sans explication. L'amnésie dissociative ne s'explique pas par un choc à la tête ou par des effets neurochimiques (drogues, alcool).
    - Dissociation de l'identité: Lorsque l'individu expérimente soudainement (consciemment ou non) qu'il est lui-même une autre personne ou une entité extérieure. Ce phénomène est le principal point commun entre le trouble dissociatif de l'identité et la possession démoniaque.
    - Dissociation de la perception: Se manifeste par la modification des perceptions auditives, visuelles et tactiles pouvant être considérée comme des hallucinations. La dissociation des perceptions peut également inclure une déformation du sens des réalités par l'individu qui la subit.
    - Dissociation de la volonté: La dissociation de la volonté comporte des automatismes, des comportements automatiques et une cataplexie ou un trouble dissociatif de conversion (une impossibilité de bouger et d'exercer la tonicité musculaire).

    Le livre "Thanks for the Memories" de la survivante Brice Taylor contient une description intéressante du phénomène de dissociation physique et psychique. Il s'agit du témoignage d'une femme (Penny) qui a subi des abus sexuels répétés durant son enfance : "La dissociation est un moyen d'échapper à l'intolérable. Cela s'est passé dès le premier traumatisme, c'était une façon de faire face à la douleur physique insupportable mais aussi à la douleur psychologique.

    "Pour moi, cela a pris la forme d'un engourdissement et d'un refroidissement du corps, et depuis ce jour, lorsque je me dissocie je deviens toute engourdie. Tout d'abord ce sont mes mains, puis mes pieds, je ne peux plus les sentir et si mes yeux sont fermés, je n'ai alors plus aucun moyen de situer mes membres dans l'espace. Puis c'est l'engourdissement de mon visage qui commence, je ne sens plus mes lèvres, ni mes joues. Lorsque je me dissocie profondément, cela prend le corps en entier et je me sens comme un morceau de bois… Pire encore que la dissociation physique, c'est ce qu'il se passe au niveau mental lorsque tout le corps est engourdi. La seule chose avec laquelle je pourrais comparer cela, c'est au bruit blanc de la radio statique, cela me laisse étourdie avec les yeux perdus dans l'espace. Les pensées qui arrivent passent à la vitesse de la lumière sans aucune cohérence, aucune organisation ni aucune forme. Je suis dans la confusion la plus totale. Cela peut aller d'un état un peu brumeux et légèrement planant jusqu'à la véritable page blanche où je ne vois plus rien et où je n'entend plus rien (…) Lorsque je reviens à moi-même, je ne réalise pas immédiatement et consciemment que j'ai perdu des heures." ⁴

    La dissociation est un mécanisme de défense psychologique et neurologique qui se manifeste au moment d'un traumatisme. Lors d'un stress sévère, l'amygdale cérébrale va s'activer pour produire des hormones de stress et ainsi fournir à l'organisme de quoi faire face au danger. Ces hormones produites immédiatement, telle une alarme, sont l'adrénaline et le cortisol. Dans un second temps, c'est le cortex frontal qui va gérer et moduler cette production d'hormones, voir même l'éteindre, selon le degré de stress. Dans le cas d'une situation extrême où l'on est bloqué et séquestré, comme un viol ou des tortures, il se produit alors une sidération psychologique, c'est à dire que le cortex se retrouve paralysé, il ne répond plus. La conséquence est qu'il ne va pas pouvoir réguler la réponse émotionnelle en contrôlant le flot d'hormones de stress provenant de l'amygdale en alerte. L'amygdale va donc produire de l'adrénaline et du cortisol en grande quantité, en trop grande quantité… Ces deux hormones ont leur utilité pour préparer l'organisme à faire des efforts inhabituels, mais en trop grande quantité, elles peuvent représenter un risque vital au niveau cardio-vasculaire et neurologique (arrêt cardiaque et épilepsie). Face à cette saturation en hormones de stress, l'organisme a une fonction de protection ultime, il va disjoncter tout comme le fait un circuit électrique qui est en survoltage. Pour cela il va isoler l'amygdale cérébrale qui ne pourra plus secréter d'adrénaline ni de cortisol.

    Lorsque ce processus de disjonction se produit, la victime se retrouve alors dans un état "second", dans une sorte d'irréalité... c'est ce que l'on nomme la dissociation. Comme l'adrénaline et le cortisol ne sont plus injectés dans l'organisme par l'amygdale, brusquement la victime ne ressent plus cette forte émotion et c'est comme si elle devenait étrangère à la situation qu'elle est en train de vivre. L'individu devient comme spectateur de la scène traumatique dans laquelle il est impliqué, il est déconnecté, de plus il peut y avoir une sorte de décorporation.

    Certaines victimes rapportent qu'elles n'étaient plus dans leur corps physique au moment de la dissociation, elles voyaient clairement la scène de l’extérieur.

    Selon la psychotraumatologue Muriel Salmona⁵, ce processus ultime de disjonction cérébrale se produit lorsque le cerveau sécrète de la morphine et de la kétamine-like. C'est ce cocktail chimique qui semblerait donc être à l'origine du phénomène naturel de dissociation lors d'un traumatisme extrême. Ce cocktail crée une anesthésie émotionnelle mais aussi une forte anesthésie physique. La victime ne ressent alors plus rien et accède à une sorte de monde parallèle avec parfois ce qui est décrit comme une sortie hors du corps physique (sortie astrale). Une fois l'enfant totalement dissocié et déconnecté de son corps, il se produit un fractionnement, une autre personnalité alter se crée alors pour "prendre en charge" le corps de la petite victime. C'est cet alter, ce fractionnement de personnalité, qui enregistre la mémoire traumatique qui se déroule, tandis que la victime (la personnalité qui s'est éclipsée durant l'expérience traumatique) sera totalement amnésique de cette mémoire. Lors de cette disjonction, tout le travail de mémorisation habituel par l'hippocampe va être interrompu et la mémoire de l'événement va rester stockée en attente, comme dans une "boîte noire" qui aurait enregistré toutes les données. C'est ce que l'on appelle la mémoire traumatique, ou l'amnésie traumatique. Dans un trouble dissociatif de l'identité, ces "boîtes noires" de mémoires sont détenues par les différentes personnalités alter.

    Suite à ces expériences douloureuses, les victimes vont généralement continuer à s'auto-traiter, à s'auto-dissocier pour pouvoir continuer à vivre relativement normalement. C'est à dire qu'elles vont adopter des stratégies pour anesthésier cette mémoire traumatique. L'organisme ayant déjà fait une première expérience d'anesthésie lors de l'agression va rechercher à reproduire ce processus. Cela peut se faire par la prise d'alcool ou de drogues qui ont des effets dissociatifs, il peut donc y avoir des addictions fortes qui se mettent en place chez une victime. Mais une chose importante à rajouter est que le stress peut aussi engendrer ces états dissociatifs, il peut donc également créer une forte addiction. Lors du réveil d'une mémoire traumatique, la victime revit l'événement et son organisme reproduit la disjonction avec le cocktail morphine/kétamine, qui sont des drogues dures. Il y a donc très rapidement un phénomène de tolérance et d'accoutumance qui se met en place, d'où les comportements extrêmes de victimes qui se scarifient, qui se brûlent, etc, afin de se calmer et de s'anesthésier en faisant monter le niveau de stress pour provoquer la disjonction : la dissociation. Elles n'ont pas conscience du processus en cours, mais ressentent bien l'effet "apaisant" de ces actes d'automutilation. Il ne s'agit ni plus ni moins qu'une question de substances chimiques dans le cerveau, une sorte de "shoot dissociatif". La violences contre autrui engendre également ce stress qui injecte certaines substances dans le sang.

     

    3 - L'Amnésie Traumatique (ou dissociative)

    L'amnésie traumatique est intimement liée à la dissociation et au trouble dissociatif de l'identité. Elle est caractérisée par une incapacité à évoquer des souvenirs personnels importants, habituellement traumatiques ou stressants, cette incapacité ne s'expliquant pas par une mauvaise mémoire. Le trouble comprend une atteinte réversible de la mémoire, durant laquelle les souvenirs d’expériences personnelles ne peuvent pas être exprimés verbalement. Il ne peut pas s’expliquer non plus par l’effet physiologique direct d’une substance ou d’un facteur de maladie neurologique ou autre facteur médical. L’amnésie traumatique se manifeste la plupart du temps en tant que trou de mémoire ou d’un certain nombre d'oublis des aspects de l’histoire personnelle de l'individu.

    Ces « trous de mémoire » sont souvent associés à des situations traumatiques. Lors d’une amnésie localisée, la personne ne se souvient pas des événements d’une période précise, généralement celle des premières heures suivant un événement extrêmement perturbant.
    L'amnésie traumatique qui peut-être complète ou parcellaire est un phénomène fréquent chez les victimes de violences sexuelles dans l'enfance. Cette conséquence psychotraumatique est malheureusement peu prise en compte dans la législation ; ce qui signifie qu'une victime ayant eu une longue période d'amnésie avec l'impossibilité de dénoncer à temps les crimes sexuels ne pourra pas porter plainte en raison du délai de prescription qui sera dépassé. De nombreuses études cliniques ont pourtant rapporté ce phénomène qui est connu depuis le début du XXème siècle et qui avait été décrit chez des soldats traumatisés et amnésiques suite à des combats. Mais c'est chez les victimes de violences sexuelles que l'on retrouve le plus d'amnésies traumatiques. Des études ont également démontré que les souvenirs retrouvés étaient fiables et en tout point comparables avec des souvenirs traumatiques qui avaient été toujours présents dans la conscience de l'individu. Ces mémoires réapparaissent le plus souvent brutalement et de façon non contrôlée, avec des détails très précis et avec évidemment beaucoup d'émotions, de détresse et de sidération, car la victime revit la mémoire comme si celle-ci se déroulait à l'instant présent.

    En 1996, lors d'un congrès de psychiatrie et de neurologie à Toulon, Jean-Michel Darves-Bornoz a expliqué que les mémoires traumatiques ne sont pas des mémoires comme les autres. En effet, le traumatisme va modifier les mécanismes normaux d'encodage et de recouvrement des souvenirs de l'expérience traumatique. D'un côté les traumatismes peuvent provoquer des phénomènes hypermnésiques (c'est à dire une exaltation de la mémoire qui permet d'avoir accès à des souvenirs autobiographiques extrêmement détaillés et connectés à tout le système sensoriel) tout comme des phénomènes amnésiques. En matière de psychotraumatologie, l'hypermnésie et l'amnésie sont donc paradoxalement liées, il s'agit là d'un point clé…
    En effet, lorsque les mémoires traumatiques amnésiques refont surface dans la conscience, c'est avec une telle force que cela devient de l'hypermnésie, c'est à dire que les souvenirs qui émergent deviennent extrêmement clairs, bien plus clairs qu'un souvenir banal, assimilé par la mémoire explicite (narrative) et consciente. L'expérience traumatique s'imprime bien plus profondément dans la victime que n'importe quelle autre expérience vécue, c'est pourquoi lorsque ces mémoires dissociatives refont surface, elles sont particulièrement invasives et très détaillées car tous les sens revivent la scène. Cette question de l'encodage et du recouvrement des mémoires traumatiques est importante car il existe une controverse concernant les vrais et faux souvenirs de violences sexuelles et d'abus rituels. Il faut savoir que seuls les souvenirs ayant été encodés sous une forme langagière (mémoire explicite) sont susceptibles d'être accessibles, tandis que la mémoire non langagière (mémoire implicite) n'est pas susceptible d'être accessible à la conscience. Cet encodage non verbal de la mémoire, pouvant donc difficilement être remis dans un contexte narratif, chronologique et autobiographique, ne va pas être pleinement conscientisé par la victime.⁶

    Ces amnésies traumatiques sont le résultat du mécanisme dissociatif déclenché par le cerveau pour se protéger de la terreur et du stress extrême généré par une violence. Il se passe alors une disjonction du circuit émotionnel mais aussi du circuit de la mémoire en lien avec l'hippocampe : zone du cerveau qui gère la mémoire et le repérage spatio-temporel, sans elle, aucun souvenir ne peut être mémorisé, ni remémoré, ni temporalisé. Tant qu'il y a cette disjonction du circuit de la mémoire, l'hippocampe ne peut pas faire son travail et cette mémoire émotionnelle, telle la "boîte noire des violences", se retrouve piégée hors du temps et de la conscience… c'est la mémoire traumatique. De nos jours, il est possible de détecter les signes d'une altération de la mémoire grâce aux scanners cérébraux, en effet le complexe amygdalien et l'hippocampe montrent un volume significativement plus petit chez les personnes ayant subi de graves traumatismes.

    Lorsque la dissociation cesse, la mémoire traumatique peut enfin se reconnecter à la conscience et re-surgir par exemple lors d'un événement rappelant les violences. Elle envahit alors l'espace psychique de la victime lui faisant revivre les violences comme une machine à remonter le temps. Ces mémoires qui remontent à la conscience sont insupportables pour la victime, elle va donc mettre en place des conduites d'évitement pour se protéger de tout ce qui pourrait déclencher à nouveau ces mémoires. Comme nous l'avons vu plus haut, elle va aussi mettre en place des conduites dissociantes pour s'anesthésier et faire à nouveau se déconnecter le circuit émotionnel et mémoriel. L'alcool, les drogues, les conduites à risque, les mises en danger, mais aussi la violence sur autrui, permettent cette dissociation et cette disjonction en produisant à nouveau un stress extrême. La victime peut donc osciller entre des périodes de dissociation avec d'importants troubles de la mémoire, et des périodes d'activation de la mémoire traumatique où elle va revivre les violences.

    La mémoire traumatique peut être traitée, mais malheureusement les professionnels ne semblent pas formés à la psycho-traumatologie et l'immense majorité des victimes de violences sexuelles dans l'enfance sont abandonnées et ne sont ni identifiées, ni protégées et encore moins soignées. Bien souvent, les victimes dont la mémoire traumatique refait surface ne sont pas crues. Il leur est répondu qu'il s'agit de fantasmes, d'hallucinations psychotiques ou bien de "faux souvenirs" induis.⁷
    Pour compliquer encore plus les choses, les traumatismes peuvent provoquer une fermeture de l'aire de Broca, la zone de l'hémisphère gauche du cerveau qui permet de transmettre verbalement une expérience, de mettre des mots sur le traumatisme vécu. La communication verbale étant le moyen que nous utilisons généralement pour raconter nos expériences aux autres, la perturbation de cette fonction sera un frein de plus à la reconnaissance de la victime.⁸

    En 1993, une étude sur l'amnésie traumatique a été publiée dans le Journal of Traumatic Stress. Cette étude intitulée "Sef-reported amnesia for abuse in adults molested as children" (Témoignages d'adultes rapportant une amnésie suite à des abus sexuels durant l'enfance) a été menée par le Dr. John Briere. Dans cette étude, un échantillon de 450 patients adultes (420 femmes et 30 hommes) ayant rapporté des abus sexuels ont été soumis à un questionnaire. La question relative à l'amnésie traumatique était la suivante : "Entre le moment où se sont produis les abus sexuels et vos 18 ans, y a-t-il eu un moment où vous ne vous rappeliez pas de ce vécu d'abus sexuel ?" Les résultats ont montré que sur un total de 450 sujets, 267 soit 59,3%, ont répondu qu'ils n'avaient aucune mémoire de leurs abus avant leurs 18 ans.⁹

    Le phénomène des amnésies (mémoires traumatiques) provoquées par la dissociation lors d'un traumatisme est quelque chose d'encore très controversé au sein des institutions psychiatriques et judiciaires. Pourquoi ce domaine de la psychotraumatologie, pourtant très sérieux, est-il autant négligé et même discrédité au sein des institutions garantes de la justice, de la sécurité et de la prise en charge des victimes ? Pourtant les exemples concrets d'amnésies dissociatives ne manquent pas, tout comme les recherches sur cette fonction particulière du cerveau humain…

    Les quelques témoignages qui vont suivre nous montrent qu'il s'agit de quelque chose de récurrent, mais qui pourtant reste couvert par une chape de plomb institutionnelle et médiatique qui empêche que cette question des amnésies traumatiques, pourtant si cruciale pour la compréhension du système pédocriminel, ne vienne à se retrouver sur la place publique…
    Lors de la campagne française "Stop au Déni" (2015) en soutien aux petites victimes de violences sexuelles, une contributrice a témoigné sur les abus sexuels dans les écoles. Voici ce qu'elle rapporte à propos de son amnésie traumatique : "Il m’a fallu plus de 35 années pour lever le brouillard qui s’est abattu sur mes yeux ce jour là, pour savoir, pour intégrer dans ma mémoire, en quelle année et dans quelle région j’étais au CP. Et deux années de plus pour sortir de cette amnésie traumatique, pour trier, démonter, et comprendre la stratégie punition-viol utilisée. Aujourd’hui, je me perds encore dans les couloirs lorsque j’entre dans une école, je sens encore la tête de cet homme, là tout près, j’entends et je sens encore son souffle sur mon visage, je me sens encore transpercée, griffée dedans, j’ai mal. Je voudrais enfin pouvoir laisser sortir les larmes ravalées dans ma gorge ce jour-là, et je n’y arrive pas. Pas encore." ¹⁰
    Voici également un témoignage d'amnésie traumatique rapporté par Isabelle Aubry, fondatrice de l'Association Internationale des Victimes de l’Inceste (AIVI) :
    "Il y a maintenant six mois que je me suis rappelé de choses que celui qui a détruit ma vie m'a fait subir. Pendant sept, huit, neuf ans... je ne sais plus... j'avais tout oublié ou du moins tout enfoui au fond de ma mémoire... Maintenant des flashs me sont réapparus et je n'arrive plus à ne pas y penser. Je me souviens d'une phrase que je ne peux entendre aujourd'hui sans penser à tout ça. Quand mes parents n'étaient pas là et comme ils n’étaient pas souvent là, je ne sais plus comment ça a  commencé, je ne sais plus combien de temps ça a duré, je ne sais plus jusqu'où il est allé, je ne sais plus quand cela s'est passé je sais juste que c'était quand j'étais au primaire... il voulait que je le masse... je ne sais plus, je sais que ce massage n'était pas un massage seulement du dos... je crois bien qu'il était nu mais je ne sais plus. Il me manque beaucoup de choses de ces moments et je trouve cela très dur de ne pas savoir jusqu'où c'est allé. Je crois que j'aimerais savoir ce qu'il s'est réellement passé. A cette époque, je pensais que c'était normal ce que je faisais, j'étais consentante. Mais maintenant j'en souffre beaucoup. Je me mutile, je me fais vomir, parfois je mange énormément et parfois pas du tout. Dans des moments de désespoir je me mets à boire, à prendre des médicaments par boîte entière. Ce passé me ronge et je n'arrive pas à en faire abstraction. Je crois que ce que je suis devenue fait souffrir mes amis et ils doivent être vraiment compréhensifs pour arriver encore à me supporter. Je voudrais aller voir quelqu’un, un psy, j'ai les numéros mais je n'arrive pas à décrocher le téléphone. Je fais de plus en plus de cauchemars de viols, d'inceste, de suicide. Mes amis ne savent plus quoi faire. Je n'en ai parlé à personne de ma famille et ça me semble impossible !" ¹¹

    En 2013, dans un article pour le Nouvel Obs intitulé "Violée à 5 ans, elle s'en souvient à 37 ans : avec la terreur, le cerveau peut disjoncter", la psychiatre Muriel Salmona écrit : "Quand en 2009, lors d’une première séance d’hypnothérapie, après avoir revécu très brutalement et de façon précise - comme un film - une scène de violences sexuelles commise par un proche de sa famille alors qu’elle avait 5 ans, Cécile B. a voulu porter plainte, elle a appris que les faits étaient prescrits (…) Elle avait alors 37 ans. Cécile B. avait déposé ce pourvoi pour contester la validité du délai de prescription en ce qui la concernait, puisqu’une amnésie traumatique de 32 ans l’avait empêchée d’avoir connaissance des faits de viols subis à l’âge de 5 ans et qui ont duré pendant 10 ans, et que par conséquent elle n’avait jamais été en mesure de les dénoncer avant leur remémoration (…) En tant que spécialiste en psychotraumatologie prenant en charge des victimes de violences sexuelles, je ne peux que parfaitement la comprendre et la soutenir. Beaucoup de mes patientes et patients sont dans le même cas qu’elle, ils ont eu de longues périodes d’amnésie traumatique et ont été dans l’impossibilité de dénoncer à temps les crimes sexuels subis dans leur enfance en raison de délais de prescription dépassés (parfois de seulement quelques jours), d’autres ont été empêchés pendant de longues années de les dénoncer du fait de conduites d’évitement, ou de l’emprise et des menaces de l’entourage, et lorsqu’ils sont enfin prêts, ils ne peuvent plus porter plainte."

    En 2015, la journaliste française Mathilde Brasilier a publié un livre autobiographique intitulé "Il y avait le jour, il y avait la nuit, il y avait l'inceste" dans lequel elle rapporte son amnésie traumatique. Durant 30 ans, cette femme a eu une amnésie qui a totalement occulté les mémoires de viols de son père qu'elle avait subi durant l'enfance. Son frère a également été victime des abus du père et il s'est malheureusement suicidé en 1985 quelques jours après avoir dit à son géniteur "Après ce que tu m'a fait, je n'ai plus rien à te dire". C'est suite à ce drame que Mathilde Brasilier a commencé à se questionner et à consulter un thérapeute… Pendant longtemps elle pensait avoir vécue une enfance parfaitement heureuse dans un milieu privilégié, sans avoir aucun souvenir des abus sexuels. Lors d'une interview radio, elle a déclaré à propos de son père : "La relation était difficile parce que je ne supportais pas de le regarder dans les yeux (…) Cela faisait parti des sujets dont je débattais avec ma mère : "C'est curieux, j'aime bien papa, mais le regarder dans les yeux, ça m'est insupportable." Mais je ne savais pas pourquoi (…) Mathilde Brasilier a déclaré que ses mémoires traumatiques sont revenues d'un coup (…) à un instant T les unes après les autres (…) C'est comme un film qui d'un seul coup se déroule.¹²

    Le 16 janvier 1998, l'actrice et chanteuse française Marie Laforêt a témoigné au JT de 20 Heures de France 2 à propos d'une amnésie traumatique. En effet, à l'âge de 3 ans elle a été violée à plusieurs reprises par "un voisin", cette mémoire a été refoulée pendant des années pour ressurgir vers la quarantaine. Voici la retranscription de son témoignage :
    - Marie Laforêt: J'ai revécu très exactement ce qui c'était passé, le nom du monsieur, son costume, sa manière de faire, tout… Tout est revenu en même temps. Il m'a été impossible d'en parler pendant trois jours et trois nuits de crises de larmes… J'ai reçu cela en pleine figure, vous ne pouvez en aucun cas le confondre avec autre chose, ni avec une prémonition, ni avec une histoire de confusion mentale… Il ne s'agit pas de confusion mentale, au contraire, vous êtes d'une excessive précision.
    - Journaliste: Comment vous pouvez expliquer que votre mémoire ait enfoui cet événement là pendant de si longues années ?
    - ML: Je crois que c'est du même domaine que l'autisme, l'évanouissement ou le coma. Il y a un épisode douloureux, et l'on va décider d'y mettre fin.
    - Carole Damiani (Psychologue): Le souvenir resté dans l'inconscient n'a pas été détruit et parfois c'est à la faveur de liens associatifs, c'est à dire que de souvenirs en souvenirs on finit par se rapprocher de l'événement traumatique. Cela veut peut-être aussi dire que la personne était prête à ce moment-là à l'affronter, alors que jusque là elle ne l'était pas.

    Marilyn Van Derbur, la Miss America de 1958, fille du millionnaire Francis Van Derbur, a révélé dans son autobiographie les conséquences de l'inceste paternel qu'elle a subi durant son enfance. Elle raconte que jusqu'à l'âge de 24 ans, elle avait totalement refoulé le souvenir des viols de son père. Dans son autobiographie intitulée "Miss America By Day", elle révèle publiquement : "Afin de survivre, je me suis divisée en une "enfant du jour", joyeuse et souriante, et une "enfant de la nuit" recroquevillée sur elle-même, à la merci de mon père… Jusqu'à mes 24 ans, l'enfant du jour n'avait aucune conscience de l'existence de l'enfant de la nuit (…) Durant la journée, il n'y avait aucune colère ni aucun regard gênant entre mon père et moi, parce que je n'étais pas consciente des traumatismes et des terreurs de l'enfant de la nuit. Mais plus l'enfant de la nuit se dégradait, plus il était nécessaire que l'enfant du jour excelle ; de l'équipe de ski de l'Université du Colorado, du club Phi Beta Kappa (ndlr: prestigieux club d'étudiants) jusqu'à ma nomination de Miss America, je croyais être la personne la plus heureuse qui ait jamais vécu."

    C'est un jeune pasteur de son Église qui a pressenti ce lourd secret. À ses 24 ans, il a réussi à casser les barricades qu'elle s'était construite dans son esprit et c'est alors que les souvenirs ont émergé. Suite à cela, elle s'est investie à un rythme fou dans sa carrière publique afin de refouler une seconde fois toutes ces lourdes mémoires traumatiques. À l'âge de 45 ans, sa vie a basculé… De 45 ans à 51 ans, elle a totalement sombré, de violentes mémoires sont à nouveau remontées avec cette fois des douleurs physiques et des paralysies. Son corps déraillait complètement, elle n'arrivait plus à bouger ses bras ni ses jambes et elle a été hospitalisée dans un institut psychiatrique. Elle a écrit que jamais elle n'aurait pu imaginer que l'inceste pouvait avoir de telles répercutions ! Qui pourrait croire que l'inceste puisse avoir de tels effets sur le corps 30 ans plus tard ?

    Marilyn Van Derbur a donc eu une amnésie traumatique, dissociative, pendant plusieurs années suite aux viols répétés de son père. Ce qu'elle décrit par la suite, à partir de 45 ans, est un trouble de conversion (ou trouble dissociatif de conversion), c'est à dire une perte soudaine de ses fonctions motrices et de sa sensibilité, sans explication médicale. Pour Marilyn Van Derbur, il s'agissait d'une paralysie très probablement liée aux abus sexuels qu'elle avait vécu dans son enfance. Elle écrit également dans son livre à propos de son père : Il me "travaillait" nuit après nuit. Comme un délicat morceau de cristal brisé dans du béton, mon père m'a dépouillé de mon propre système de croyance et de mon "moi", mais également de mon âme qu'il a brisé en morceaux."
    L'autobiographie de cette Miss America contient à la fois l'histoire glorieuse de Marilyn Van Derbur, une ascension vertigineuse vers la gloire, mais aussi une source essentielle d'informations concernant les abus sexuels sur les enfants avec ce mécanisme de dissociation et de cloisonnement des mémoires traumatiques.¹³

    L'actrice et chanteuse américaine Laura Mackenzie raconte également que durant son enfance, elle était régulièrement violée par son père, John Phillips, une légende du rock… En 2009, elle lira un passage de ses mémoires "High on Arrival" dans l'émission de télévision "The Oprah Winfrey Show" : "Je me réveille cette nuit-là sortant d'un black-out, réalisant avoir été violée par mon père… Je ne me souviens pas du début de l'abus, ni de comment il a pris fin, était-ce la première fois ? Était-ce déjà arrivé auparavant ? Je n'en sais rien et je reste dans le doute. Tout ce que je peux dire, c'est que c'était la première fois que j'en prenais conscience. Pendant un moment j'étais dans mon corps, dans cette horrible réalité, et ensuite j'ai re-basculé dans un black-out. Votre père est supposé vous protéger, il est supposé vous protéger, pas vous "baiser"." ¹⁴

    Mackenzie dit qu'elle avait 17 ou 18 ans lorsqu'elle a commencé à se souvenir des viols de son père. À cette époque, elle était connue par des millions de gens comme l'enfant star du sitcom "One Day at a Time". Personne ne réalisait alors ce qu'elle vivait en privé…
    "Très tôt j'ai commencé à compartimenter et à refouler les mémoires difficiles. Et c'est cela la racine de toutes les expériences difficiles qui sont survenues par la suite."

    Elle a aussi déclaré à propos de son père : "Je n'ai pas de haine contre lui. Je comprends que c'est un homme vraiment torturé, d'une certaine manière il passe ce mal-être à travers moi (…) C'est une sorte de syndrome de Stockholm où vous commencez à aimer votre agresseur. Je ressentais un grand amour pour mon père."

    Cathy O'Brien, victime de contrôle mental basé sur les traumatismes, décrit également comment les mémoires traumatiques et dissociatives fonctionnent chez un petit enfant qui subit l'inceste jour après jour : "Même si je ne pouvais pas comprendre que ce que mon père me faisait était quelque chose de mal, la douleur et la suffocation lors de ses sévices étaient si insupportables que j'ai développé un trouble dissociatif de l'identité. Cela était impossible à comprendre, il n'y avait aucun endroit dans mon esprit pour pouvoir gérer une telle horreur. J'ai ainsi compartimenté mon cerveau, des petites zones séparées par des barrières amnésiques servant à cloisonner les souvenirs des sévices afin que le reste de mon esprit puisse continuer à fonctionner normalement, comme si rien n'était arrivé… Lorsque je voyais mon père à table lors du dîner, je ne me souvenais pas des abus sexuels. Mais dès lors qu'il déboutonnait son pantalon, une partie de moi, la partie de mon cerveau qui savait comment gérer ces horribles sévices se réveillait, c'était comme si une jonction neuronale s'ouvrait pour que cette partie de mon esprit puisse subir mon père encore et encore, selon les besoins… J'avais certainement beaucoup d'expérience dans ce "compartiment cérébral" qui gérait les abus de mon père, mais je n'avais pas toute l'étendue des perceptions, j'avais une perception très limitée, une vision très limitée." ¹⁵

    Régina Louf, Le témoin X1 dans l'affaire Dutroux, a rapporté qu'une partie d'elle-même dissociée n'était jamais "présente" lors des abus sexuels. Cette part d'elle même pouvait donc continuer à vivre "normalement" sans avoir à gérer ce lourd souvenir des abus dans sa conscience. Inversement, la partie d'elle-même qui était présente et donc violée lors des abus, Ginie, était difficilement consciente de la vie menée à l'école ou dans la famille. C'était comme si Ginie était mise de côté jusqu'à ce qu'elle refasse surface à nouveau et prenne le relais lorsque le bourreau était de retour auprès de Régina.¹⁶

    Dans un article intitulé "Multiple Personality Disorder in Childhood" (Personnalité multiple dans l'enfance), M.Vincent et M.R. Pickering donnent l'exemple d'une femme qui leur a décrit son vécu à l'âge de 3 et 4 ans lorsqu'elle a été violée à répétition par son père adoptif. C'est une description de l'état dissociatif avec un passage dans une réalité alternative, nous retrouvons là le scindement en deux "moi" différents : "C'était devenu habituel pour elle de rester passive et d'attendre le changement d'état de conscience qui allait la transporter d'une lourde agonie à un état de calme et même de joie. Elle faisait cela sans même savoir qu'elle sauvait sa peau à chaque fois, nourrissant deux "moi" à l'intérieur d'elle, chacun ignorant l'existence de l'autre… Aimer ce qui est en train de vous tuer est impossible. Elle ne pouvait pas le faire. C'est un dilemme infernal dans l'esprit de l'enfant. Elle se laissait donc libre d'aimer, et laissait "l'autre" libre d'haïr…" ¹⁷

    Pour diagnostiquer correctement un trouble dissociatif de l'identité, ce sont les personnalités alter qui sont tout d'abord recherchées, et non l'amnésie traumatique en elle-même. Les personnes atteintes d'un trouble de stress post-traumatique, d'un trouble de la personnalité limite (borderline) ou d'autres troubles dissociatifs spécifiés peuvent également connaître des amnésies ponctuelles. Dans le trouble dissociatif de l’identité, les « pertes de mémoires » sont causées par l'alternance entre des personnalités alter bien distinctes les unes des autres, pouvant être séparées par des « murs amnésiques » cloisonnant les souvenirs de la vie quotidienne…

     

    4 - Le Trouble Dissociatif de l'Identité (T.D.I.)

    a/ Quelques cas historiques

    En 1793, le Dr. Eberhardt Gmelin a écrit le premier rapport détaillé de 87 pages sur un cas de "double personnalité", qu'il qualifie de "umgetaushte Persönlichkeit" (échange de personnalité) dans sa publication intitulée "Materialien für die Anthropologie". Le cas a été repris et décrit en détails en 1970 par Henri Hellenberger dans "Discovery of the Unconscious" (À la découverte de l'inconscient). Il s'agissait d'une jeune femme de 21 ans, originaire de Stuttgart, qui montrait soudainement une nouvelle personnalité parlant le français bien mieux que l'allemand tout en adoptant un changement complet de comportement. Les deux personnalités, qui parlaient chacune une langue différente, n'avaient aucunement conscience l'une de l'autre. La "femme française" se rappelait systématiquement de tout ce qu'elle avait dit ou fait, tandis la "femme allemande" oubliait ses faits et gestes. Gmelin avait découvert qu'il avait la possibilité de déclencher facilement le changement de personnalité simplement par un mouvement des mains…

    En 1840, le psychothérapeute Antoine Despine a décrit le cas de Estelle, une fillette suisse de 11 ans qui présentait une paralysie avec une extrême sensibilité au toucher. Elle avait une seconde personnalité qui pouvait marcher et jouer mais qui ne pouvait pas supporter la présence de sa mère, une réaction peut-être due à une mémoire traumatique liée à sa mère. Estelle montrait une différence flagrante de comportements d'une personnalité à l'autre. À la fin du XIXème et au début du XXème siècle, le Dr. Pierre Janet a rapporté un certain nombre de cas de personnalités multiples chez ses patientes : Léonie, Lucie, Rose, Marie et Marceline. Léonie avait trois, si ce n'est plus encore de personnalités incluant un alter d'enfant nommé "Nichette". Dans le cas de Lucie, qui était également décrite avec trois personnalités, il y avait un alter nommé "Adrienne" qui avait régulièrement des flash-backs d'un traumatisme remontant à sa petite enfance. Rose présentait des états somnambuliques ainsi qu'une alternance entre paralysie et capacité à marcher.¹⁸

    La première observation d'un dédoublement de personnalité popularisé dans le grand public est connue sous l'appellation de "Dame de Mac Nish". Un cas célèbre qui fera l'objet de plusieurs publications entre 1816 et 1889. Cette jeune femme, de son vrai nom Mary Reynolds, a présenté une alternance de deux personnalités entre l'âge de 19 ans et 35 ans. Finalement l'une des deux personnalités a finit par s'imposer sur l'autre. Son cas est mentionné dans l'ouvrage "De l'intelligence" du philosophe et historien français Hippolyte Taine, c'est lui qui renommera Mary Reynolds la "Dame de Mac Nish". La jeune fille, qui vivait aux États-Unis, était de nature calme, plutôt réservée et mélancolique et d'une bonne santé. Ses troubles commencèrent vers l'âge de 18 ans suite à des syncopes prolongées, elle commença alors à présenter une alternance entre deux personnalités très différentes l'une de l'autre. L'une d'entre elles était de nature très enjouée et sociable, une personnalité avec un caractère vif et joyeux qui ne s'effrayait de rien et qui n'obéissait à personne. Au bout d'une dizaine de semaines, elle eu de nouveau une sorte d'étrange syncope et elle se réveilla à nouveau avec sa personnalité d'origine.

    Elle n'avait aucun souvenir de la période qui venait de s'écouler mais elle avait bien retrouvé le même caractère réservé et mélancolique. L'alternance entre ces deux personnalités continua ainsi pendant des années, la transition se faisait souvent la nuit, pendant son sommeil. Lorsqu'une des personnalités disparaissait, Mary Reynolds se retrouvait exactement dans l'état où elle avait "disjonctée" la fois d'avant, mais sans aucun souvenir de ce qui s'était passé dans l'intervalle. C'est à dire qu'avec une personnalité ou une autre, elle ignorait tout de son second caractère. Si par exemple on lui présentait quelqu'un dans un de ces états, elle ne le reconnaissait plus dans l'autre état. C'est vers l'âge de 35 ans que la personnalité sociable a commencé à s'imposer plus souvent et pendant des périodes plus longues. Cette personnalité a fini par s'imposer définitivement jusqu'en 1853, où Dame Mc Nish est morte à l'âge de 61 ans.

    Un autre cas connu du XIXème siècle est celui de Félida, décrit par le Dr. Azam qui l'a suivit de 1860 à 1890. Azam est l'auteur du livre "Hypnotisme et Double Conscience" (1893) dans lequel il décrit le cas de cette jeune femme. En 1860, il a fait connaître sa patiente à la Société de Chirurgie et à l'Académie de Médecine, ce cas a eu une influence considérable sur la question du phénomène de dédoublement de la personnalité. Il existe aujourd'hui toute une bibliothèque sur ce cas. Le Dr. Azam a rencontré Félida pour la première fois en 1856, il va alors la suivre pendant 32 ans. Voici comment il décrit les changements de personnalité :

    "Presque chaque jour, sans cause connue ou sous l'emprise d'une émotion, elle est prise de ce qu'elle appelle sa crise ; en fait, elle entre dans son deuxième état. Ayant été témoin des centaines de fois de ce phénomène, je puis le décrire avec exactitude… Je le décris actuellement d'après ce que j'ai vu.

    Félida est assise, un ouvrage quelconque de couture sur les genoux; tout d'un coup, sans que rien puisse le faire prévoir et après une douleur aux tempes plus violente qu'à l'habitude, sa tête tombe sur sa poitrine, ses mains demeurent inactives et descendent inertes le long du corps, elle dort ou paraît dormir, mais d'un sommeil spécial (…) Après ce temps, Félida s'éveille, mais elle n'est plus dans l'état intellectuel où elle était quand elle s'est endormie. Tout paraît différent. Elle lève la tête et, ouvrant les yeux, salue en souriant les nouveaux venus, sa physionomie s'éclaire et respire la gaieté, sa parole est brève, et elle continue, en fredonnant, l'ouvrage d'aiguille que dans l'état précédent elle avait commencé. Elle se lève, sa démarche est agile et elle se plaint à peine des milles douleurs qui, quelques minutes auparavant, la faisait souffrir. Son caractère est complètement changé: de triste elle est devenue gaie, pour le moindre motif, elle s'émotionne en tristesse ou en joie. Indifférente à tout qu'elle était, elle est devenue sensible à l’excès. Dans cette vie comme dans l'autre, ses facultés intellectuelles et morales, bien que différentes, sont incontestablement entières: aucune idée délirante, aucune fausse appréciation, aucune hallucination. Je dirais même que dans ce deuxième état, dans cette condition seconde, toutes ses facultés paraissent plus développées et plus complètes. Cette deuxième vie où la douleur physique ne se fait pas sentir est de beaucoup supérieure à l'autre; elle l'est surtout par le fait considérable que Félida se souvient non seulement de ce qui s'est passé pendant les accès précédents, mais aussi de toute sa vie normale, tandis que pendant sa vie normale, elle n'a aucun souvenir de ce qui s'est passé pendant son accès." ¹⁹

    Félida présente donc cette particularité d'être amnésique que dans un seul sens, sa personnalité d'origine n'ayant aucun souvenir de sa personnalité seconde tandis que celle-ci accède à toutes les mémoires. Le Dr. Azam nomme ce phénomène "amnésie périodique".
    Petit à petit la seconde personnalité, la plus enjouée, a commencé à empiéter sur la première pour finir par s'imposer la majeure partie du temps. Lorsque son ancienne personnalité réapparaissait par moments, elle se retrouvait donc confrontée à de grands trous noirs où elle avait oublié les trois quarts de son existence… Félida a montré de façon épisodique une troisième personnalité que Azam n'aura vu émerger que deux ou trois fois, le mari de Félida ne l'avait observé qu'une trentaine de fois en seize ans. Cette troisième personnalité alter apparaissait dans un état de terreur indicible, ses premiers mots étaient : "J'ai peur… J'ai peur…", elle ne reconnaissait personne excepté son mari. S'agissait-il d'un alter traumatisé par ses mémoires ? Il faut noter qu'à cette époque, le lien entre dissociation de l'identité et traumatismes n'avait pas encore été établi par les médecins qui s'occupaient de ces patients.

    L'un des cas français le plus remarquable est celui de Louis Vivet. Entre 1882 et 1889, il a été étudié par de nombreux auteurs scientifiques, notamment par Bourru et Burot qui écrivaient en 1895 : "Ces faits de variation de la personnalité sont moins rares qu'on ne le suppose". En 1882, Camuset notait dans son rapport sur Louis Vivet : "Nous sommes tentés de croire que ces cas sont plus nombreux qu'on ne le supposerait, malgré les observations assez rares que l'on possède". C'est avec Louis Vivet que le terme "personnalité multiple" fut employé pour la première fois en remplacement de "personnalité double".

    Louis Vivet avait six personnalités différentes caractérisées par des modifications de la mémoire, des modifications du caractère, ainsi que des modifications de la sensibilité et du comportement. À chaque changement de personnalité, il a été noté que ses mémoires changeaient en conséquence et que les personnalités s'ignoraient toutes mutuellement. Voici comment Bourru et Burot décrivent son changement de personnalité :

    "Tout d’un coup, les goûts du sujet se sont complètement modifiés: le caractère, le langage, la physionomie, tout est nouveau. Le sujet est réservé dans sa tenue. Il n’aime plus le lait; c’est cependant le seul aliment qu’il prend habituellement. L’expression de sa physionomie est devenue plus douce, presque timide: le langage est correct et poli. Le malade tout à l’heure si arrogant est maintenant d’une politesse remarquable, ne tutoie plus personne et appelle chacun ‘Monsieur’. Il fume, mais sans passion. Il n’a pas d’opinion, ni en politique ni en religion, et ces questions, semble-t-il dire, ne regardent pas un ignorant comme lui. Il se montre respectueux et discipliné. La parole est beaucoup plus nette qu’avant le transfert, la lecture à haute voix est remarquablement claire, la prononciation est bien distincte, il lit parfaitement et écrit passablement. Ce n’est plus le même personnage (…) En quelques minutes la transformation est complète. Ce n’est plus le même personnage: la constitution du corps a varié avec les tendances, et les sentiments qui la traduisent. C’est un transfert total. La mémoire s’est modifiée, le sujet ne reconnaît plus ni les lieux où il se trouve, ni les personnes qui l’entourent et avec lesquelles, il y a quelques instants, il échangeait ses idées. Un changement aussi inattendu et aussi radical était bien de nature à nous étonner et à nous faire réfléchir (…) Nous avons renouvelé cette application plusieurs fois dans les conditions les plus diverses et le résultat était constant. Le même personnage reparaissait, toujours identique à lui-même. C’était une transformation pour ainsi dire mathématique, toujours la même pour le même agent physique et le même point d’application." ²⁰

    Citons également le cas de Clara Norton Fowler (sous pseudonyme Miss Christine Beauchamp) que le Dr. Morton Prince, neurologue de Boston, rencontra en 1898 alors qu'elle avait 23 ans. L'utilisation de l'hypnose révéla chez elle l'existence de quatre personnalités différentes. Dans ce cas précis, il était rapporté que la jeune fille avait subi de nombreux traumatismes durant son enfance. Miss Beauchamp était une jeune femme réservée et timide alors que ses autres personnalités étaient extraverties, capricieuses et colériques. Mais les polarités amnésiques entre chaque personnalité étaient plutôt compliquées : l'une ignorait l'existence de toutes les autres, une autre avait conscience de l'existence d'une seule autre personnalité, etc. Une de ses personnalités a montré une amnésie totale des six dernières années qui précédèrent son apparition. Une particularité dans le cas de Miss Beauchamp a été l'utilisation de prénoms pour les différents alter, une des personnalités a choisi elle-même de se faire appeler "Sally". Le Dr. Morton Prince considéra Sally comme la personnalité la plus intéressante et c'est avec elle qu'il collabora le plus facilement.
    Prince recherchait parmi les personnalités quelle était celle qui était l'authentique Miss Beauchamp, la véritable personnalité d'origine. Il arriva à la conclusion que cette personnalité originelle s'était en fait désintégrée pour laisser la place à plusieurs identités spécifiques. En utilisant l'hypnose, il a progressivement dissous les barrières amnésiques cloisonnant les alter pour les faire fusionner ensemble.²¹

    Un autre cas a été rapporté en 1916 par le Dr. James Hyslop et le Dr. Walter Prince dans le "Journal of the American Society for the Psychological Research". Il s'agit de Doris Fischer, née en Allemagne en 1889. Cette femme a développé cinq personnalités distinctes, chacune ayant un nom particulier.

    Les cinq personnalités alter montraient des caractéristiques variées et très différentes d'un point de vue psychologique. Comme c'est généralement le cas, elles se sont développées suite à des chocs émotionnels profonds. Derrière la personnalité de Doris, "Real Doris" (la vraie Doris), se trouvaient :

    - "Margaret" : La personnalité alter qui a été créée par le premier choc dissociatif. Un alter ayant un état émotionnel et mental de petit garçon de cinq ou six ans.

    - "Sick Doris" (Doris la malade) : C'est la personnalité alter née suite au deuxième choc traumatique. Sick Doris n'avait aucune mémoire des événements ni même aucune notion de langage verbal, elle ne reconnaissait personne et ne savait plus utiliser les objets de la vie courante. Elle ne montrait aucune affection.

    - "Sleeping Margaret" (Margaret la dormeuse) : cette personnalité alter semblait dormir tous le temps, elle ne parlait pratiquement jamais sauf dans une sorte de discours embrumé dont la compréhension était difficile.

    - "Sleeping Real Doris" (Doris la vraie dormeuse) : C'est le nom qui a été donné par "Margaret" à la personnalité somnambulique qui a été créée à l'âge de huit ans. Elle avait des mémoires que n'avait pas "Real Doris".

    "Real Doris" n'avait aucune connaissance des pensées ou des actes de ses personnalités secondaires. Elle ne pouvait pas se rappeler quoi que ce soit de ce qui se passait durant les périodes où un autre alter avait émergé. Les personnalités alter ont fusionné une par une lors des séances de thérapie, pour ne laisser la place finalement qu'à la "Vraie Doris".

     En 1928, un autre cas de personnalité multiple a été rapporté dans un article intitulé "Multiple Personality" (W. Taylor et M. Martin, 1944). Le patient était un homme du nom de Sorgel qui vivait en Bavière et qui était épileptique. Il montrait deux organisations de conscience bien distinctes : une personnalité criminelle et une personnalité honnête. La personnalité honnête n'avait pratiquement aucun souvenir de son autre vie, tandis que la personnalité criminelle se rappelait très bien des deux vies.²²

    Nous retrouvons là encore une fois cette notion d'amnésie à "sens unique", c'est à dire qu'une personnalité alter plus profonde accède à toutes les mémoires, tandis qu'une autre, de surface, reste totalement inconsciente de « son autre vie »...

     Les cas les plus médiatisés et donc les plus connus du XXème siècle sont :

    Christine Costner Sizemore (Les 3 Visages d'Eve)
    Shirley Ardell Mason (Sybil)
    Truddi Chase (When Rabbit Howls)
    Billy Milligan (L'homme aux 24 personnalités)

    L'histoire de Christine Costner Sizemore a été rapportée dans un livre écrit par ses psychiatres, Corbett Thipgen et Hervey M. Cleckly. La douce et timide jeune femme s'était adressée à eux car elle souffrait de terribles migraines qui semblaient incurables. Lors de sa thérapie, une nouvelle personnalité rebelle et turbulente a émergé. La première personnalité n'avait aucune conscience de l'existence de cet autre alter, la turbulente, qui elle, avait parfaitement conscience de l'existence de la première. Ce cas de personnalité multiple a été porté à l'écran par Nunaly Johnson en 1957, dans un film intitulé "Les 3 visages d'Eve". C'est l'actrice Joanne Woodward qui incarna successivement les trois personnalités, Eve White, une jeune femme docile et timide, Eve Black, la séductrice turbulente et enfin Jane, une personnalité beaucoup plus équilibrée, une sorte de fusion des deux Eve. Ce film est l'un des rares à ne pas être tombé dans la représentation stéréotypée d'un T.D.I. avec une personnalité alter criminelle.

    La version du film de 1957 est introduite par le journaliste Alistair Cooke qui déclare : "Ceci est une histoire vraie. Vous avez souvent vu des films qui affirmaient une telle chose. Cela veut parfois dire qu'un certain Napoléon a bien existé, mais que toute ressemblance entre sa vie réelle et le film en question tiendrait du miracle. Notre histoire à nous est vraie. C'est celle d'une ménagère gentille et effacée, qui, en 1951, alors qu'elle vivait dans sa Géorgie natale, fit très peur à son mari par une conduite totalement insolite. Cela n'a rien de rare: nous avons tous nos lubies, tous nous réprimons une envie de singer un être que nous admirons. Un écrivain a affirmé que dans tout homme gras, sommeille un homme maigre. Dans cette jeune ménagère, de façon effrayante, deux personnalités bien marquées se débattaient littéralement pour lui imposer leur volonté. C'était un cas de "personnalité multiple".

    On lit cela dans les livres, mais peu de psychiatres en ont vu eux-mêmes… Jusqu’au jour où les Dr. Thigpen et Cleckley, du Medical College de Géorgie furent en présence d'une femme possédant une personnalité de plus que le Dr. Jekyll. En 1953, ils exposèrent ce cas devant l'Association de Psychiatrie Américaine, un cas devenu un classique de la littérature psychiatrique. Ce film n'avait donc que faire de l'imagination d'un scénariste. La vérité elle-même dépassait la fiction. Tout ce que vous verrez est effectivement arrivé à celle qu'on a baptisé "Eve White". Une bonne partie des dialogues viennent des notes cliniques du dénommé Dr. Luther."

    Cependant le film qui ne montre que deux personnalités (qui finissent à la fin par fusionner) ne reflète pas la réalité exacte puisque Christine Costner développa plus de vingt personnalités différentes, comme elle le révèlera plus tard dans ses mémoires, publiées sous un pseudonyme.

    Durant les années 70, le cas de Sybil est certainement celui qui a fait le plus connaître le trouble dissociatif de l'identité. Shirley Ardell Mason était une jeune femme de 25 ans qui en raison de ses visions, de ses cauchemars et de ses terribles souvenirs, est allée consultée le Dr. Cornelia Wilbur. C'est alors que six personnalités différentes émergèrent durant la thérapie. Shirley découvrit qu'elle avait été victime de sévères humiliations et d'abus sexuels par sa mère lorsqu'elle était enfant. Ce cas aurait pu rester dans l'ombre comme pour de nombreux autres, mais Flora Rheta Schreiber a publié en 1973 un roman basé sur la véritable histoire de Shirley, un roman intitulé "Syblil" qui devint un véritable best-seller. Suite à cet énorme succès, quelques années plus tard en 1976, Daniel Petries a produit un film à partir du roman. Un film qui portera d'ailleurs le même nom, Sybil, et qui fut également un grand succès. Pour de nombreux thérapeutes, ce cas a marqué l'histoire du T.D.I.. Il y a eu un avant et un après Sybil, entraînant toute une polémique qui entoure encore de nos jours ce mystérieux trouble de la personnalité multiple…
    Truddi Chase, née en 1935, est l'auteur d'une autobiographie intitulée "When Rabbit Howls" (1987), son cas a également fait l'objet d'un téléfilm : "Voices Whithin The Lives of Truddi Chase" (Démons Intérieurs), diffusé en 1990 par la chaîne ABC (American Broadcasting Company).

    C'est lors d'une thérapie qu'il a été découvert que Truddi souffrait d'une personnalité multiple. Elle a été maltraitée dès l'âge de 2 ans jusque dans son adolescence. Son beau-père la violentait physiquement et sexuellement tandis que sa mère la négligeait. Elle a toujours eu le souvenir des viols et des maltraitances, mais sans jamais pouvoir se les rappeler en détails, cela jusqu'à ce qu'elle entame une thérapie avec le Dr. Robert Phillips. Truddi Chase a toujours refusé de faire fusionner ses nombreuses personnalités, pensant qu'elles formaient une équipe coopérante. Elle est décédée en mars 2010 à l'âge de 75 ans.

    Un autre cas historique de personnalité multiple est celui de Billy Milligan, né en 1955 aux États-Unis. En 1975, Milligan est arrêté pour plusieurs crimes dont des viols. Cette affaire a été sur-médiatisée à l'époque du procès en raison du profil psychologique particulier de l'accusé… Son procès pour viols a provoqué l'indignation lorsque la défense a plaidé non coupable pour cause de personnalité multiple. Milligan affirmait que ce n'était pas lui qui était présent lors des agressions sexuelles sur des étudiantes, mais une personnalité alter lesbienne. La population avait évidemment beaucoup de mal à croire à la version des faits du violeur. Le "cas Milligan" a été étudié durant de longues années et rapporté en détail par Daniel Keyes. Le biographe de Milligan, Daniel Keyes, a consacré seize ans de sa vie à collecter des informations, à enquêter et à s'entretenir avec "le Professeur" (les multiples personnalités alter de Miligan fusionnées en une seule personnalité) ainsi qu'avec les personnes qui l'ont côtoyé de près. Il en est sorti deux livres : "The Minds of Billy Milligan" et "The Milligan Wars", disponibles en français sous les titres : "Billy Milligan, l'homme aux 24 personnalités" et "Les mille et une vies de Billy Milligan".

    Dans la biographie de Milligan rédigée par Keyes, il est précisé que son fractionnement de personnalité se serait produit lorsque l'enfant était constamment humilié et frappé par son beau-père qui de plus abusait sexuellement de lui. C'est en tout 24 personnalités qui ont été diagnostiquées chez Milligan. Parmi ces personnalités alter, certaines avaient des tendances criminelles et destructrices, c'est ce qui lui attira de sévères ennuis. Par contre, ses autres personnalités montraient des aptitudes et des compétences extraordinaires.

    "Arthur" était un de ses alter qui avait appris la médecine tout seul et qui parlait plusieurs langues, c'est lui qui est parvenu à mettre en relation l'ensemble des personnalités alter : Arthur jouait le rôle de médiateur dans le système interne.
    D'autres personnalités alter avaient un réel talent artistique pour la peinture, chacune avec un style différent. Il y avait également des personnalités alter ayant l'âge d'un enfant, une chose courante dans les T.D.I.. Dans sa biographie, Milligan explique les avantages qu'il y a à avoir plusieurs personnalités, notamment des alter enfants : "Cela permet d'avoir un regard nouveau sur le monde. Un regard complètement différent qui permet de voir des choses qu'un autre n'aurait pas vu. »

    En 1979, Billy Milligan a été interné à l'hôpital d'État pour malades mentaux criminels de Lima en Ohio. Là-bas, il subira un véritable enfer : racket, passages à tabac, électrochocs, camisole chimique… Il restera à Lima jusqu'en 1983, date à laquelle il réintègre l'hôpital psychiatrique de Athens où il va progresser dans sa thérapie pour parvenir finalement à fusionner toutes ses personnalités alter. Voici ce qu'il déclare à propos de la fusion (intégration, concepts qui seront développés plus loin) de ses personnalités alter : "On m'avait dit que l'union de toutes mes parties serait encore plus forte que la somme de mes personnalités individuelles. Mais dans mon cas ce n'est pas vrai, l'union de mes personnalités est moins forte."

    Malgré la fusion de ses alter, son état mental restait très précaire et instable en raison des nombreuses années pendant lesquelles il a subi la prison, les internements psychiatriques, les attaques psychologiques et physiques, les menaces de mort, mais aussi l'instrumentalisation politique par des sénateurs, magistrats, directeurs d'hôpitaux ou de prisons… sa guérison était donc loin d'être favorisée par un climat de sécurité et de stabilité. Il a été rapporté des comportements sadiques par du "personnel soignant" et partout semblait régner brutalité et instrumentalisation autour de lui. Daniel Keyes dénonce le système carcéral américain avec son opportunisme, la corruption au sein même de sa direction ainsi que son incapacité à traiter efficacement des cas sensibles comme celui de Billy Milligan…

    Un cas qui est moins connu car non criminel et bien moins médiatisé est celui de Robert Oxnam. Cet homme a été le président pendant plus d'une dizaine d'année de l'Asia Society, une prestigieuse institution culturelle américaine. Robert Oxnam est spécialiste de la culture et de la langue chinoise, il a accompagné des gens comme Bill Gates, Warren Buffet ou Georges Bush durant leurs déplacements en Asie.

    Il est l'auteur d'une autobiographie intitulée "A Fractured Mind" (un esprit fracturé) dans laquelle il révèle qu'il souffre d'un trouble dissociatif de l'identité. En 2005, l'émission 60 Minutes de la chaîne CBS News lui a consacré un reportage²³ pour exposer ce trouble psychique particulier. Robert Oxnam a reçu une éducation très rigide et une forte pression était faite sur lui pour sa réussite sociale et professionnelle. Son père était président d'université et son grand-père était évêque mais aussi président du Conseil oecuménique des Églises (COE).

    Suite à de brillantes études, Oxnam a très vite été mis en avant dans les grands médias et il a rapidement obtenu un poste prestigieux et élitiste. Dès l'âge de trente ans, il a été nommé président de l'Asia Society. Robert Oxnam était sur le toit du monde mais à l'intérieur de lui, il y avait un mélange de dépression, de colère et de rage. D'un côté, il y avait ce succès social et professionnel étincelant, et de l'autre un mal-être et une dépression permanente qui s'empiraient. Dans les années 80, Oxnam a été suivi pour de l'alcoolisme et de la boulimie, c'est aussi dans cette période que son premier mariage s'est effondré. Les consultations chez un psychiatre pour ses problèmes d'addictions et ses trous de mémoires récurrents n'amélioraient rien du tout. Il lui arrivait parfois de se réveiller avec des traces de coups et des blessures sur son corps sans avoir aucune idée de ce qui pouvait bien en être la cause, ni même dans quel contexte cela aurait pu arriver.

    Robert Oxnam avait apparemment une vie parallèle cloisonnée par un mur amnésique…

    Un jour, il s'est retrouvé perdu dans la foule de Central Station à New-York, il était dans un état de transe et il entendait des voix qui le harcelaient en lui disant qu'il était mauvais, qu'il était la pire des personnes ayant jamais vécu. En 1990, lors d'une séance de thérapie avec le Dr. Jeffrey Smith, Robert Oxnam est soudainement devenu quelqu'un d'autre… Son psychiatre rapporte qu'il y a eu un changement complet, dans sa voix, dans son attitude et dans ses mouvements. Durant une séance, le Dr. Smith a rapporté que les mains de Oxnam étaient comme des griffes, il était dans une terrible colère. Cette colère venait d'un petit garçon nommé "Tommy".

    Lorsque Smith a raconté à Oxnam ce qu'il s'était déroulé durant la séance, celui-ci a affirmé qu'il ne connaissait nullement ce Tommy et qu'il n'avait aucun souvenir de ce qui venait de se passer dans le cabinet du thérapeute. C'est alors que le Dr. Smith réalisa qu'il avait peut-être affaire à un cas de personnalité multiple. À l'annonce de cet éventuel diagnostic, Robert Oxnam a fortement réagit en déclarant : "C'est de la foutaise, j'ai vu Sybil, je ne suis pas comme Sybil !"
    Au cours de la thérapie, onze personnalités alter bien distinctes ont émergé indépendamment les unes des autres. Parmi elles se trouvaient donc "Tommy", un jeune garçon colérique, la "Sorcière", un alter terrifiant ou encore "Bobby" et "Robby".
    "Bob" était la personnalité dominante, c'est à dire la personnalité "hôte" : la façade publique, ici en l'occurrence un intellectuel qui travaille à l'Asia Society. Dans sa vie publique, Robert Oxnam vaquait à ses occupations et à ses affaires, multipliant les rencontres avec de hauts dignitaires comme le Dalaï-Lama. Mais cette vie publique ne laissait rien entrevoir de ses profonds troubles de la personnalité…

    Les traumatismes dans l'enfance sont généralement à l'origine du T.D.I., et Oxnam ne semble pas faire exception. Pendant sa thérapie, un alter nommé "Baby" a rapporté des mémoires sur des violences durant l'enfance. Il s'agissait de sévères abus sexuels et physiques, toujours accompagnés par ce genre de paroles : "Tu est mauvais, ceci est une punition." ²⁴

    Robert Oxnam a-t-il vécu des abus rituels ? A-t-il subi une programmation mentale en préparation de la future carrière élitiste dans laquelle il a été rapidement propulsé ? Toujours est-il que son cas démontre bien comment un individu peut avoir un trouble dissociatif de l'identité tout en menant des affaires à un haut poste en maintenant une façade publique tout à fait normale. Est-ce ce à quoi fait référence Fritz Springmeier lorsqu'il parle d'esclaves sous contrôle mental totalement indétectables, pour décrire ces individus volontairement fractionnés et programmés ?


    b/ Définition du T.D.I.

    Durant les trente dernières années, l'évaluation et le traitement des troubles dissociatifs ont été améliorés par un meilleur repérage clinique, par de nombreuses publications de recherches et de travaux académiques ainsi que par des instruments spécialisés. Des publications internationales provenant de cliniciens et de chercheurs sont apparues dans de nombreux pays, elles concernent des études de cas cliniques, des études de psychophysiologie, de neurobiologie, de neuro-imagerie, etc. Toutes ces publications confirment l'existence du T.D.I. et lui donnent donc une validité comparable aux autres diagnostics psychiatriques bien établis. Une étude de 2001 intitulée "An examination of the diagnostic validity of dissociative identity disorder" (un examen de la validité du diagnostic de trouble dissociatif de l'identité) faite par David H. Gleaves, Mary C. May et Etzel Cardena démontre bien que ce trouble psychiatrique est à prendre très au sérieux.²⁵

    Le Trouble Dissociatif de l'Identité a eu de nombreuses appellations durant l'histoire : "double existence", "double personnalité", "double conscience", "état de personnalité", "transfert de personnalité", "personnalité duelle", "personnalité plurielle", "personnalité dissociée" (DSM-I, 1952), "personnalité multiple", "personnalité divisée", "identité alternante"et "trouble de la personnalité multiple" (DSM-IV, 1980). Il s'agit d'un trouble dissociatif post-traumatique complexe et chronique qui se développe, dans la plupart des cas, à la suite d'abus sexuels et/ou de violences physiques graves et répétées pendant la petite enfance. C'est une perturbation des fonctions de l'identité, de la mémoire ou de la conscience. L'altération peut-être soudaine ou progressive, transitoire ou chronique. L'identité, ou personnalité habituelle de la personne est alors oubliée et une nouvelle personnalité s'impose (un alter). Cela est souvent accompagné par un trouble de la mémoire avec des événements importants ne pouvant pas être remémorés (DSM III, 1987).
    Le Dr. Richard Kluft définit ainsi un alter :
    "Il fonctionne à la fois comme un récepteur, processeur, centre de stockage pour les perceptions, les expériences et leur élaboration en connexion avec les événements et les pensées du passé et/ou du présent et même du futur. Il a le sens de sa propre identité et de sa propre idéation ainsi qu'une capacité d’initier des processus de pensées et d’actions."

    La plupart des patients ayant un T.D.I. souffriront également de divers troubles mentaux comme de la dépression chronique, un stress post-traumatique, de l'anxiété, de fortes addictions, des troubles alimentaires, des troubles narcissiques et de la somatisation. Ils pourront être diagnostiqués avec un trouble de la personnalité limite (trouble borderline), une schizophrénie, ou encore un trouble bipolaire ou psychotique si la dissociation et la présence des personnalités alter n'a pas été détectée ni même recherchée. Ces diagnostics erronés surviennent surtout si l'entretien d'évaluation ne contient pas de questions relatives à la dissociation et au trauma ou qu'il se focalise uniquement sur les problèmes de comorbidité les plus apparents (c'est à dire les troubles associés cités ci-dessus).

    Le manuel de diagnostics et statistiques des troubles mentaux, DSM-IV (2000), définit les critères suivants pour le Trouble Dissociatif de l’Identité :

    A. Présence de deux identités (ou davantage) ou états de personnalité - chacun avec son mode relativement permanent de perception, de relation, de pensée sur l’environnement et sur soi.

    B. Au moins deux de ces identités ou états de personnalité prennent le contrôle - de manière récurrente - du comportement de la personne.

    C. Incapacité de se souvenir d’informations très personnelles : oubli important qui doit être distingué de ce qui s’oublie communément.

    D. La perturbation n’est pas due aux effets physiologiques directs d’une substance (intoxication aux drogues ou alcoolique) ou à un problème médical général (par exemple les épilepsies partielles complexes). Note : chez les enfants, les symptômes ne sont pas attribuables à des compagnons imaginaires ou d’autres jeux fantasques.

    L'individu est incapable de se rappeler certaines informations personnelles importantes et il montre des lacunes de mémoire trop importantes et profondes pour que cela soit un simple oubli. De nombreux patients se plaignent aussi d'avoir de fortes migraines. Ce trouble peut mener à une fugue dissociative, qui se manifeste par un départ soudain et inattendu du domicile ou du lieu de travail, s'accompagnant d'une incapacité à se souvenir de son passé. Il y a alors une confusion concernant l'identité personnelle ou bien l'adoption d'une nouvelle identité (partielle ou complète).
    Dans son ouvrage "Discovery of the Unconscious", Henri F. Ellenberger a établi à partir de différents cas historiques, une classification des différents aspects que pouvaient présenter ces personnalités fractionnées :

    1 : Personnalités multiples simultanées.
    2 : Personnalités multiples successives :
    a/ mutuellement conscientes l'une de l'autre.
    b/ mutuellement amnésiques.
    c/ amnésiques dans un seul sens.

    Chaque personnalité vit avec son histoire personnelle et individuelle, ses propres souvenirs, son propre caractère et elles peuvent même avoir chacune un nom différent. Ces personnalités peuvent également se connaître et interagir les unes avec les autres au sein d'un monde intérieur complexe. C'est un système interne où les alter peuvent coexister pacifiquement mais des conflits plus ou moins sévères peuvent également les diviser. Dans la plupart des cas, il y a une personnalité dominante, appelée la "personnalité première" ou "personnalité hôte", qui est entourée par une série de personnalités secondaires généralement organisées hiérarchiquement.

    Les deux plus grandes études de cas sur ce sujet sont celles du Dr. Frank Putnam : "The clinical phenomenology of multiple personality disorder: Review of 100 recent cases" (Journal of clinical Psychiatry 47 - 1986) et celle du Dr. Colin Ross qui a étudié 236 cas.

    Lorsque l'on demande aux personnalités alter ce qu'elles pensent être, elles répondent : un enfant (86 %), un assistant ou une aide (84 %), un démon (29 %), une personne du sexe opposé (63 %) ou elles citent une autre personne (en vie) (28 %) ou un mort de la famille (21 %).²⁶

    Les thérapeutes allemands Angelika Vogler et Imke Deister ont listé les types de personnalités alter se retrouvant fréquemment chez les patients souffrant d'un T.DI.²⁷

    - l'Hôte/Hôtesse: La première fonction de l’hôte ou de l’hôtesse est d’assurer le bon fonctionnement du système multiple dans la vie quotidienne. Son âge correspond habituellement à l’âge physique du corps et son identité sexuelle correspond au sexe du corps. Généralement, l’hôte/ l’hôtesse ne sait que très peu de choses ou même ignore l'existence des autres personnalités du système et elle a de grands trous de mémoire. L’hôte/ l’hôtesse passe d’ordinaire pour quelqu’un de très fiable mais son tempérament de base est souvent dépressif.

    - L'Observateur/Observatrice: Pratiquement dans chaque système il y a au moins un(e) observateur/observatrice qui surveille tout ce qui se passe et qui n’a donc aucun trou de mémoire. Cette personnalité réagit plutôt de manière rationnelle et ne montre pas de sentiments puisqu’elle a besoin de garder une grande distance par rapport au monde intérieur et extérieur afin d'assurer son rôle. C'est pour cette raison que l’observateur/ l’observatrice n'émerge pas en premier plan (ne prend pas le contrôle du corps) mais il/elle peut prendre contact avec différents alter du système.

    - Le Protecteur/Protectrice: Les personnalités protectrices d’un système émergent et prennent le contrôle du corps dès qu’un alter ou que le système se sentent menacés par une certaine situation. Ces personnalités protectrices peuvent se montrer très agressives et il est important de comprendre et de valoriser leur fonction protectrice.

    - Les personnalités s’identifiant aux bourreaux: Ce sont les personnalités qui restent fidèles à la secte. Ces personnalités s’identifient avec leurs bourreaux et leurs valeurs. Elles ont souvent pour fonction de punir les autres personnalités alter (par exemple par de l'automutilation) qui souhaitent rompre le contact avec la secte ou qui voudraient par exemple révéler des informations sur celle-ci lors d’une séance de thérapie. Si la personne multiple est encore en contact avec la secte, ces personnalités alter peuvent leur transmettre le contenu de la séance de thérapie sans que les autres personnalités du système s’en aperçoivent.
    Les enfants et adolescents « captifs »: Dans pratiquement chaque système multiple il y a des enfants. Ils sont restés captifs dans une certaine période du temps. Il y a des enfants qui gardent un certain âge pendant une longue période tandis que d’autres mûrissent. Il est possible aussi qu’un alter-enfant qui a gardé le même âge pendant longtemps commence à vieillir par la suite.
    Une particularité étonnante du T.D.I. est que chez un même individu, les personnalités alter peuvent montrer de remarquables différences physiologiques dans l'acuité visuelle, dans la réaction aux médications et aux psychotropes, dans les allergies, dans le rythme cardiaque, la tension artérielle, la tension musculaire, la fonction immunitaire mais également dans le tracé électro-encéphalographique. Des différences physiologiques irrationnelles puisque ces personnalités alter partagent un même corps physique.

    Déjà en 1887, Pierre Janet, avait démontré que certains individus pouvaient développer plusieurs centres psychiques, dont chacun avait ses propres particularités et activités. Il avait déjà nommé ces centres dissociés des « Personnalités ». Janet travaillait avec ce que l'on appelait à l'époque des hystériques, des femmes dont les différentes personnalités coexistaient et opéraient à un niveau subconscient, ne prenant qu'occasionnellement le contrôle de la conscience normale lors de séances d'hypnose ou d'écriture automatique. Janet avait découvert que les personnalités subconscientes de ces hystériques s'étaient créées en réponse à un événement traumatique s'étant fixé dans le subconscient pour devenir la graine des nouvelles personnalités. Avec cette compréhension, le système thérapeutique de Janet devenait enfin efficace pour comprendre et traiter ce trouble dans lequel une variété de personnalités émergeaient spontanément pour interagir avec le monde extérieur. À partir de là, le modèle Dissociation / Traumatisme était établi en psychothérapie et il commença à apparaître dans les descriptions de cas de personnalité multiple.²⁸

    En 1993, lors de ses recherches sur le trouble de la personnalité multiple, le Dr. Adam Crabtree a écrit : "La reconnaissance du phénomène de dissociation servant à traiter un épisode traumatique par la création de plusieurs centres psychiques, conduit à une psychothérapie efficace du trouble de la personnalité multiple. Le rôle étiologique de la maltraitance des enfants n'a pas du tout été reconnu jusqu'à notre époque moderne. Mais les preuves statistiques de crimes sur enfants de la fin du XIXème siècle peuvent offrir une voie de recherche féconde. Un examen des cas historiques soulève des questions sur l'équivocité du phénomène de personnalité multiple, il révèle également des données qui n'ont pas encore été pleinement reconnues par les cliniciens modernes." ²⁹

    Le T.D.I. se développe au cours de l'enfance. Comme nous l'avons vu, le processus de dissociation est un mécanisme de protection naturel face à une situation psychologiquement insurmontable. Tout comme un disjoncteur permet d'éviter un court-circuit, cette fonction humaine permet de survivre à des traumatismes sévères et répétitifs, ceci afin de pouvoir continuer à vivre ensuite de manière relativement normale. Ce processus a pour effet d'encapsuler des souvenirs, des affects, des sensations ou même des croyances afin d'atténuer leurs effets sur le développement global de l'enfant. Selon la gravité des traumatismes, l'impact de la dissociation peut aller jusqu'au fractionnement de la personnalité. Le T.D.I. semble être le niveau de dissociation le plus extrême. Pierre Janet reconnaissait lui-même que "l'extrême dissociation" aboutissait à la création d'une personnalité multiple. L’origine de ce trouble, dans au moins 80 % des cas traités par la psychiatrie, réside dans des traumatismes vécus durant l’enfance, particulièrement avant l'âge de 5 ans. Le Dr. Philip M. Coons a comparé vingt patients ayant un T.D.I. à un groupe témoin de vingt personnes du même sexe et du même âge, non dissociés, non schizophréniques, non psychotiques. Alors que deux personnes du groupe témoin avaient souffert de négligences ou d'abus sexuels dans l'enfance, 85% des patients avec un T.D.I. avaient subi des violences physiques et/ou sexuelles.³⁰
    Le Dr. Richard Kluft aboutit à des données similaires reliant le T.D.I. aux traumatismes infantiles précoces : "Dans deux grands groupes, 97 % et 98 % avaient été victimes de violences physiques et sexuelles durant l'enfance, ou de mauvais traitements psychologiques ainsi que des négligences." ³¹

    Le Dr. James P. Bloch a écrit que les traumatismes de l'enfance sont aujourd'hui perçus comme un facteur étiologique primaire dans la formation des troubles dissociatifs.³²

    Selon le Dr. Colin Ross, "le degré de dissociation est clairement relié à la sévérité et à la chronicité des abus". Ross considère que, en moyenne statistique, les patients ayant développé un T.D.I. auraient subi des abus physiques durant quinze ans et des abus sexuels durant près de treize ans.³³

    Nous pouvons donc comprendre pourquoi de nombreuses victimes d'abus rituels sataniques ont développé un trouble dissociatif de l'identité. Le T.D.I. est même certainement un indicateur fort d'un passé en lien avec des abus rituels. Le Dr. Frank Putnam a déclaré en 1989 : "Je suis frappé par le niveau d'extrême sadisme rapporté par la plupart des victimes ayant un T.D.I.. Bon nombre d'entre-elles m'ont dit avoir été abusées sexuellement par des groupes de gens, forcées à la prostitution par leur famille, ou offertes comme appât sexuel pour les amants de leur mère. Après avoir travaillé avec un certain nombre de patients ayant un T.D.I., il est devenu évident que les abus sévères et répétés dans l'enfance sont une cause majeure du trouble de la personnalité multiple."

    Des mémoires traumatiques peuvent donc être "stockées", ou "encapsulées", dans une personnalité alter et la personnalité hôte n'aura aucune conscience de cette réalité. C'est lorsque cette personnalité alter émergera qu'elle pourra exprimer et transmettre cette mémoire (généralement en revivant physiquement et émotionnellement le traumatisme, phénomène que l'on nomme l'abréaction). Elle décrira très précisément comment les abus se sont passés, puisque c'est lui (ou elle) qui les a vécu directement, tandis que la personnalité hôte était "désactivée"/ dissociée pour laisser la place à l'alter. Le Dr. Adam Crabtree rapporte qu'en 1926, le psychologue américain Henry Herbert Goddard a publié un rapport qui décrivait le traitement d'une jeune femme, Bernice R., diagnostiquée avec une personnalité multiple. Goddard utilisait l'hypnose pour tenter de fusionner deux personnalités. Pour cela, il mettait une des personnalités alter en état de transe pour tenter de la rendre consciente de l'existence de l'autre afin de les faire fusionner. Par ce procédé, Goddard a fait du très bon travail pour la libération émotionnelle des mémoires traumatiques de la patiente.
    Parmi ces mémoires, la jeune femme avait des souvenirs clairs et persistants des viols de son père. Malheureusement Goddard a classé ces mémoires d'abus sexuels comme des hallucinations, en expliquant que les actes incestueux prétendument arrivés à l'âge de 14 ans n'avaient pas été mentionnés par Bernice avant l'âge de 19 ans. Cela nous indique que Henry Goddard n'avait pas vraiment connaissance du fonctionnement de la dissociation et de l'amnésie traumatique. Il validait donc la théorie fumeuse de "l'hallucination sexuelle hystérique"… Théorie servant encore de nos jours à discréditer les victimes, "l'hystérie" ayant laissé la place au "syndrôme de faux souvenirs".³⁴

    Il faudra quand même un certain temps pour que la question du traumatisme infantile soit réellement prise en compte et reconnue comme l'une des causes majeure du fractionnement de la personnalité. De nos jours de nombreux cliniciens ont dans l'idée que le T.D.I. est un trouble très rare ou bien ne reconnaissent tout simplement pas son existence. Cela est avant tout dû au manque d'information et de formation des cliniciens à propos de la dissociation, des troubles dissociatifs et des effets du trauma psychologique ; ce diagnostic est donc rarement envisagé et encore moins retenu. Pourtant, le T.D.I. et les troubles dissociatifs ne sont pas rares. Des études en Amérique du Nord, en Europe et en Turquie ont montré que entre 1 et 5 % des patients dans des unités psychiatriques pour adultes et adolescents, ainsi que dans les services de traitement des abus de substances, des troubles alimentaires et du trouble obsessionnel compulsif (TOC) peuvent répondre aux critères diagnostics pour le T.D.I.. Mais beaucoup de ces patients ne seront jamais diagnostiqués cliniquement avec un trouble dissociatif.³⁵

    Dans son ouvrage "Cult and Ritual Abuse", le Dr. James Randall Noblitt donne quelques statistiques concernant la reconnaissance du T.D.I. dans le milieu professionnel psychiatrique :

    Une étude menée en 1994 a interrogé 1120 psychologues et psychiatres employés par l'administration des anciens combattants (Veterans Administration), 80 % d'entre eux ont répondu qu'ils approuvaient le diagnostic de T.D.I..³⁶

    Une autre étude menée en 1995 sur 180 psychiatres canadiens a rapporté que 66,1 % d'entre eux croyaient en la validité du diagnostic de T.D.I. contre 27,8 % qui ne validaient pas ce diagnostic, 3,3 % étaient indécis.³⁷

    En 1999, une étude menée auprès de 301 psychiatres a montré que 15 % d'entre eux pensaient que le T.D.I. n'avait pas à être inclus dans le manuel de diagnostics (DSM), 43 % pensaient qu'il devait y être inclus avec des réserves et 35 % pensaient qu'il devait y être inclus sans réserves. Sur la question des preuves pour la validité scientifique du diagnostic de T.D.I., 20 % ont répondu qu'il y avait peu ou aucune preuve de validité, 51 % ont répondu qu'il y avait des preuves partielles de validité et 21 % estimaient qu'il y avait des preuves évidentes qui validaient le T.D.I..³⁸
    En 1999, la Cour suprême de l'État de Washington a déclaré que le diagnostic de T.D.I. remplissait les critères pour la norme Frye (le Frye test sert à déterminer la recevabilité des preuves scientifiques dans un cadre juridique). Cela signifie que les témoignages des experts sur le T.D.I. sont recevables à la Cour Fédérale car il a été déterminé que ce diagnostic était globalement reconnu dans le milieu de la santé mentale.³⁹

    Il existe aujourd'hui quelques tests qui servent à détecter la présence de troubles dissociatifs chez un patient. Le "Dissociative Experiences Scale" (DES) (l'échelle d'expériences dissociatives) a été conçu par les psychiatres Eve Bernstein Carlson et Frank W. Putnam en 1986. Un autre test est le "Multidimensional Inventory of Dissociation" (MID) (Inventaire Multidimensionnel de Dissociation) mis au point par Paul Dell. Ce test est du même type que le précédent mais avec beaucoup plus d'items. Ces tests ne permettent cependant pas d'établir un diagnostic, c'est uniquement par des entretiens professionnels plus structurés qu'un T.D.I. peut-être constaté ou exclu.

    c/ T.D.I. et neurologie

    Durant les dernières décennies, les outils d'imageries médicales permettant d'étudier le fonctionnement du cerveau se sont considérablement améliorées. Les techniques telles que l'imagerie par résonance magnétique (IRM) et la tomographie par émission de positrons (TEP) permettent entre autre de visualiser l'activation des différentes zones du cerveau lors de certaines tâches ou de certains comportements.

    En novembre 2001, des chercheurs de Melbourne en Australie se sont rassemblés dans ce que le Herald Sun a décrit à l'époque comme « la première étude mondiale » sur le trouble de la personnalité multiple. Le but de cette rencontre était de tenter de résoudre la controverse au sein de la communauté scientifique psychiatrique. L'étude a abouti à la conclusion que "les individus souffrant du trouble de la personnalité multiple (T.D.I.) ne simulaient pas leurs changements d'identité". Les ondes cérébrales d'individus diagnostiqués avec un T.D.I. ont été comparées avec celles d'acteurs simulant des changements de personnalités. Bien que les acteurs reproduisaient de façon convaincante des changements d'identité, les chercheurs ont trouvé qu'il y avait des modifications bien distinctes dans les ondes cérébrales de ceux qui changeaient réellement de personnalité tandis que ces changements n'apparaissaient pas dans le cerveau de ceux qui simulaient une autre personnalité.⁴⁰

    Ce même type d'étude comparative a été mené par Annedore Hopper et le Dr. Joseph Ciorciari à l'université de Swiburne dans l'état de Victoria en Australie. Cinq patients ayant un T.D.I. et cinq acteurs professionnels ont participé à l'expérience. L'étude a montré clairement une différence d'électro-encéphalographie (EEG) entre la personnalité hôte et les personnalités alter chez les patients ayant un T.D.I., tandis que ce changement d'EEG n'a pas été constaté chez les acteurs qui simulaient par exemple une personnalité d'enfant. Pour le Dr. Joseph Ciorciari, cette étude démontre bien que les patients souffrant d'un T.D.I ne simulent pas leurs différentes personnalités, il a déclaré : "Les patients ayant un T.D.I. ont été comparés avec des acteurs professionnels qui ont reproduit l'âge et la personnalité correspondant à chaque personnalité alter des patients et à chacune de leur personnalité hôte. Les différences significatives de l'EEG entre les personnalités alter et les personnalités hôte n'ont pas été constatées lorsque c'était les acteurs qui jouaient le rôle des personnalités, ce qui est une preuve physiologique évidente de l'authenticité du T.D.I." ⁴¹
    En décembre 1999, l'émission "Tomorrow's World" de la BBC diffusa un reportage montrant une étude neurologique sur le T.D.I. menée par le Dr. Guochuan Tsai (Harvard Medical School). Pour la première fois, un patient ayant un trouble dissociatif de l'identité a été soumis à un scanner IRM pendant la transition d'une personnalité à l'autre. Louise, la patiente qui s'est portée volontaire pour cette étude, avait développé avec l'aide du Dr. Condie (son thérapeute), une aptitude à pouvoir déclencher volontairement les changements de personnalité. Cette capacité à changer de personnalité à la demande a permis d'observer en direct le fonctionnement de son cerveau dans le scanner IRM lors des transitions entre une personnalité alter et une autre.

    Le Dr. Tsai précise qu'avant nous n'avions pas de scanner IRM, nous ne pouvions donc pas faire ce genre d'étude rapidement et correctement. De plus, nous n'avions pas le bon sujet sachant contrôler les changements de personnalités alter. Parce que nous avons besoin qu'il y ait ce changement pendant l'IRM.

    Le scanner a montré des changements significatifs au niveau du cerveau juste au moment où Louise change de personnalité. Curieusement l'hippocampe, une zone associée à la mémoire du long terme, s'est éteint pendant le changement d'alter et il s'est réactivé une fois la transition effectuée. Un test de contrôle a également été réalisé : on a demandé à Louise de simplement s'imaginer être une petite fille de huit ans, sans basculer dans un autre alter. Le test n'a montré aucun des changements constatés précédemment.
    Pour le Dr. Tsai, c'est une base scientifique suffisante sur laquelle s'appuyer pour approfondir les recherches. Pour Louise, c'est une preuve à apporter face à toutes ces personnes qui nient l'existence du T.D.I.. Suite au documentaire, le Dr. Raj Persaud a déclaré sur le plateau de la BBC : "Comme la plupart des psychiatres, avant la sortie de cette étude, j'étais très sceptique sur ce trouble de la personnalité multiple. Cela est du au fait qu'en Angleterre, nous faisons moins fréquemment ce diagnostic qu'aux États-Unis. En Angleterre, nous pensons généralement que ces gens peuvent faire semblant d'avoir ce trouble pour attirer une certaine attention sur eux. Mais la chose importante et très persuasive de cette nouvelle étude est que lorsque cette femme était dans le scanner et qu'elle a basculé dans une autre personnalité, il y a eu un changement significatif dans son activité cérébrale, contrairement à lorsqu'elle imagine seulement avoir une autre personnalité. Cela est une preuve que le trouble de la personnalité multiple n'est pas juste simulé mais qu'il existe vraiment."

    Des recherches neurologiques ont démontré que les violences répétées dans l'enfance avaient un effet considérable et mesurable sur le volume de certaines zones du cerveau comme l'hippocampe et le complexe amygdalien. Une étude menée en 2006 a révélé que le volume de l'hippocampe et de l'amygdale est significativement plus petit chez les personnes diagnostiquées avec un T.D.I. en comparaison avec un groupe de sujets sans T.D.I..⁴²

    Une étude publiée en 2003, intitulée "One brain, two selves" (un cerveau, deux soi) a comparé les aires activées du cerveau de deux différentes personnalités d'un sujet ayant un T.D.I.. Les régions cérébrales de 11 femmes atteintes du T.D.I. ont été explorées en utilisant une technique de neuro-imagerie, la TEP (tomographie par émission de positrons). Suite à un certain travail thérapeutique, les femmes étaient capables, comme Louise, de contrôler les changements de personnalité requis pour l’étude. Lors de la TEP, les sujets écoutaient des enregistrements avec un contenu autobiographique et traumatique dans deux états de personnalité différents. Seule une des deux personnalités étudiées confirmait que le contenu était autobiographique puisque c’était la personnalité qui avait elle-même vécu le traumatisme, l'autre personnalité n'avait pas le souvenir d'avoir vécu le trauma. Les résultats de l'étude ont montré que cette perception différente d'un même contenu se retrouve dans les différentes zones activées du cerveau :
    la personnalité alter qui reconnaît le contenu car enregistré dans sa mémoire, montre un profil d'activation cérébrale différent que celui de la personnalité alter qui ne reconnaît pas le contenu. Pour les chercheurs, une telle différence de niveau d'activité de certaines zones cérébrales ne peut pas s'expliquer simplement par l'imagination ou par un changement d'humeur chez le sujet.⁴³
    Lorsque nous sommes inondés par des stimuli de danger dans une situation traumatisante, la collaboration du complexe amygdalien avec l’hippocampe est fortement perturbée. Le traitement incomplet des informations va faire que celles-ci ne seront pas intégrées dans un ordre spatio-temporel et restent donc des souvenirs isolés.

    Chez des personnes traumatisées, des recherches sur les processus physiologiques cérébraux par tomographie permettent de localiser des zones du cerveau où des modifications du métabolisme ont lieu, ici le glucose. Avec cette technique d’imagerie, il est possible de visualiser l’augmentation de la consommation du glucose dans certaines aires cérébrales et en déduire les zones qui sont plus ou moins activées.

    Dans une étude menée par Bessel Van der Kolk, les personnes traumatisées devaient se souvenir d’un traumatisme personnel. En comparaison avec des personnes non traumatisées (groupe de contrôle) qui devaient se rappeler d’un événement grave de leur vie, les personnes traumatisées ont montré une activation significativement élevée du complexe amygdalien, de l’insula, de la face médiale du lobe temporal et du cortex visuel droit.

    Durant l’évocation des souvenirs traumatiques, l’hémisphère droit du cerveau était particulièrement actif tandis qu'une diminution de l’activation de l’hémisphère gauche était observée. Une diminution particulièrement prononcée dans la face inférieure du lobe frontal et dans l’aire de Broca qui joue un rôle important pour le langage. Le professeur Van der Kolk a déduit de ces résultats que le cerveau ne peut pas traiter et comprendre complètement un stimulus traumatisant puisque l’aire de Broca, responsable de la verbalisation, est alors inhibée. Ces études neurologiques nous montrent comment il est physiologiquement difficile, voir impossible, pour les victimes de profonds traumatismes de verbaliser et d'expliquer clairement ce qu'elles ont vécu ou ce qu'elles sont en train de vivre lorsqu'une mémoire traumatique remonte à la surface.

    Van der Kolk nous explique que "lorsque ces personnes revivent leurs expériences traumatiques, leurs lobes frontaux sont impactés, avec pour conséquence que la pensée et la parole se retrouvent endommagées. Elles ne sont plus capables de communiquer aux autres ce qu'il se passe (…) L'empreinte du trauma ne siège pas au niveau verbal, au niveau de la partie du cerveau liée à la compréhension. Elle siège beaucoup plus profondément dans les régions de l'amygdale, de l'hippocampe, de l'hypothalamus et du tronc cérébral, des zones qui ne sont que marginalement reliées à la pensée et à la cognition." ⁴⁴

    Les expériences traumatiques ne sont donc pas enregistrées via le langage, mais principalement via le souvenir de sensations corporelles, par les odeurs et les sons. Quand un stimulus (comme un contact physique, certaines odeurs, des bruits de moteur, des cris) active le souvenir d’un événement traumatique, il n’y a pas forcément une remontée de mémoire avec un contenu narratif. Alors que la mémoire narrative est capable d’intégration et d’adaptation, les souvenirs traumatiques non narratifs semblent être inflexibles, activés de manière automatique et totalement dissociés de l’événement. Cette dissociation des souvenirs traumatiques explique pourquoi ceux-ci ne s’estompent pas avec le temps, mais gardent leur force initiale et deviennent ce que Van der Kolk appelle des "parasites de l’âme". Les informations relatives aux expériences traumatiques sont présentes dans la mémoire à un certain niveau, mais elles sont donc totalement dissociées de la mémoire narrative. Sans un traitement ultérieur visant à les intégrer dans la mémoire narrative et analytique, c'est à dire la mémoire autobiographique, ces souvenirs traumatiques peuvent potentiellement être réactivés négativement durant toute la vie. Ils se manifesteront par exemple par de l'hypermnésie, des flashbacks, de l'hyperactivité, de l’amnésie, des troubles émotionnels et un comportement d'évitement. Dans le cadre de la programmation MK basée sur les traumatismes, ce sont ces mémoires traumatiques inconscientes qui permettent d'accéder aux personnalités alter par des codes faisant office de stimulus et de déclencher de la même manière certaines commandes implantées lors des traumatismes.

    Les études physiologiques du cerveau sont aujourd'hui capables d’expliquer pourquoi des personnes traumatisées n’ont souvent pas la possibilité de situer dans le temps leurs souvenirs traumatiques. Lorsqu'ils y accèdent, ils vivent cette mémoire traumatique comme si elle était en train de se passer à l'instant présent. Certaines recherches expliquent également pourquoi les méthodes thérapeutiques reposant uniquement sur le langage verbal ne sont généralement pas efficaces pour traiter les traumatismes. Une psychothérapie efficace doit prendre en compte la mémoire narrative et explicite (localisée dans l'hémisphère gauche du cerveau) mais également la mémoire implicite liée aux sensations et aux émotions (localisée dans l'hémisphère droit du cerveau). Les événements uniquement enregistrés comme une mémoire implicite doivent être intégrés pour devenir une mémoire explicite et autobiographique.
    Autrement dit, il faudrait remplacer les intrusions négatives de ces mémoires par un souvenir intégré, cohérent et chronologique afin qu'il ne nuise plus à la personne. ⁴⁵


    d/ T.D.I et schizophrénie

    Au niveau phénoménologique, il existe un chevauchement important entre les symptômes des troubles dissociatifs (surtout le T.D.I.) et la schizophrénie. Ces similitudes créent une confusion dans les milieux hospitaliers et entraînent donc des erreurs de diagnostic avec des répercussions importantes sur les patients.
    La dissociation provoquée par une division en plusieurs personnalités implique la séparation de structures normalement bien intégrées comme la perception sensorielle, la mémoire, l'attention, la pensée ; tandis que dans la schizophrénie ces processus restent intégrés, ils sont simplement détériorés. Dans le T.D.I., le lien avec la réalité reste intact, tandis que dans la schizophrénie il y a une rupture presque totale avec la réalité. Dans le T.D.I. le fractionnement de la personnalité se fait par une division au sein de la personne, tout comme une division cellulaire, comme si chaque cellule était une nouvelle et différente personnalité. Dans la schizophrénie, cette division se produit entre le "moi intérieur" et le monde extérieur, la connexion avec la réalité est perdue et la personne vit alors dans son monde.⁴⁶

    Une étude a montré qu'un groupe de patients diagnostiqués avec une schizophrénie par un psychiatre ou un psychologue, auquel vous faites passer un entretien standardisé lié aux symptômes dissociatifs a montré que 35 à 40 % de ces patients, censés être schizophrènes, en ressortiront avec le diagnostic de trouble dissociatif de l'identité. Inversement, dans un groupe de patient diagnostiqué avec un T.D.I. auquel vous faites passer un entretien lié aux symptômes schizophréniques, les deux tiers ressortiront avec un diagnostic de schizophrénie.

    Un groupe de 236 patients souffrant d'un T.D.I. a montré que 40,8 % d'entre eux avaient reçu auparavant un diagnostic de schizophrénie.⁴⁷

    Un des points communs entre schizophrénie et T.D.I. peut être des hallucinations auditives, il s'agit souvent de "voix dans la tête". Ces voix peuvent venir soit de l'intérieur, soit de l'extérieur, elles peuvent être amicales ou hostiles. Il n'y a pas de caractéristique fiable pour déterminer automatiquement et avec certitude qu'il s'agit d'une "voix schizophrénique" ou d'une "voix dissociative". Certains thérapeutes utilisent le critère de voix extérieure ou voix intérieure pour discerner s'il s'agit de schizophrénie ou de T.D.I.. Les hallucinations auditives semblant venir de l'extérieur montreront plus une tendance schizophrénique alors que les voix venant de l'intérieur peuvent être celles de personnalités alter, dans ce cas là, il y a probablement un fractionnement de la personnalité. Selon le Dr. Colin Ross, un autre indice est que les personnalités fractionnées entendent généralement plus de voix d'enfants que les schizophrènes. Dans l'édition de 1994 du DSM, les symptômes de voix qui dialoguent entre elles ou qui commentent systématiquement le comportement de la personne étaient considérés comme schizophréniques. Le médecin pouvait donc poser un diagnostic de schizophrénie sur ce seul symptôme, cependant de nombreux professionnels ont découvert que ces voix sont plus courantes chez les personnalités multiples que chez les schizophrènes.⁴⁸

    Beaucoup de psychothérapeutes travaillant avec des patients ayant un T.D.I. ont constaté que ce phénomène des voix dans la tête était quelque chose de courant chez ces personnes. De plus en plus d'études semblent faire le lien entre la dissociation et ces "hallucinations auditives". Certaines études se sont consacrées exclusivement à cette question, notamment celle de Charlotte Connor et Max Birchwood intitulée : "Abuse and dysfonctionnal affiliations in childhood: An exploration of their impact on voice-hearer's appraisals of power and expressed emotion", ou encore celle de Vasiliki Fenekou et Eugenie Georgaca: "Exploring the experience of hearing voices: A qualitative study ».

    Une étude⁴⁹ menée avec la Dissociative Experience Scale a montré que 21 % des patients psychiatriques hospitalisés et 13 % des patients psychiatriques non hospitalisés présentent un score dissociatif supérieur au seuil pathologique. Ils en concluent que les troubles dissociatifs sont encore nettement sous-diagnostiqués.⁵⁰

    Dans une étude intitulée "Dissociation and Schizophrenia" parue en 2004 dans le journal "Trauma and Dissociation", le Dr. Colin Ross et le Dr. Benjamin Keyes ont évalué les symptômes dissociatifs dans un groupe de 60 individus traités pour une schizophrénie. Ils ont trouvé que 36 sujets présentaient des caractéristiques dissociatives importantes, soit 60 % de leur échantillon. Ces symptômes dissociatifs étaient accompagnés d'un taux élevé de traumatismes dans l'enfance ainsi que d'importants troubles tels que la dépression, le trouble de la personnalité limite (Borderline) ou encore le T.D.I.. Que ce soit dans le cas du T.D.I. ou de la schizophrénie, la dissociation est quelque chose de sous-jacent, tout comme l'origine traumatique de ces troubles de la personnalité.
    En dépit des études qui ont clairement montré le lien entre troubles psychotiques et troubles dissociatifs, on remarque un fort déclin de l'utilisation du diagnostic de troubles dissociatifs. Ce déclin s'expliquerait notamment par l'introduction du terme schizophrénie pour décrire les patients montrant ce type de symptômes…

    Entre 1911 et 1927, le nombre de cas rapportés de personnalité multiple, aujourd'hui nommé T.D.I., a diminué de près de la moitié suite au remplacement du terme dementia preacox par schizophrénie par le psychiatre Eugen Bleuler.
    Le Dr. Rosenbaum explique cela en détail dans son article "The role of the term schizophrenia in the décline of diagnoses of multiple personality" (le rôle du terme schizophrénie dans le déclin du diagnostic de personnalité multiple).⁵¹
    Dans "Oxford Textbook of Psychopathology", Paul H. Blaney nous apprend qu'une recherche sur PubMed (le principal moteur de recherche de données bibliographiques de l'ensemble des domaines de spécialisation de la biologie et de la médecine) liée à la schizophrénie génère un résultat de 25 421 articles, tandis qu'une recherche liée au T.D.I. ne donne que 73 publications.
    Une des conséquences négative de ces mauvais diagnostics est que le traitement donné pour une « schizophrénie » se basera principalement sur une médication lourde et addictive voir même dangereuse. Alors que comme nous allons le voir plus loin, dans la thérapie du T.D.I., le traitement par les médicaments est quelque chose de secondaire. Ils peuvent servir pour traiter la comorbidité mais ils ne sont pas thérapeutiques en tant que tels. Nous avons vu que premièrement, le T.D.I. a été remplacé par un diagnostic fourre-tout nommé « schizophrénie », et que deuxièmement le protocole de traitement pour le schizophrène sera une lourde médication chimique généralement inapproprié, qui n'aidera jamais le patient à comprendre ses troubles et à s'en libérer. Des troubles dans la plupart du temps liés à des traumatismes dans l'enfance. En effet, l'institution psychiatrique semble avoir peu de volonté pour venir véritablement en aide aux victimes et aux survivants de traumatismes en négligeant ou en ignorant totalement le sujet de la psychotraumatologie.

    Voici ce que déclare la psycho-traumatologue Muriel Salmona à ce sujet : "Nous sommes très peu informés dans le cadre de la psychotraumatologie, il n'y a pas de formation dans les études médicales, pas de formation pendant la spécialisation en psychiatrie. Il y a aussi beaucoup d'experts qui ne sont pas formés en psychotraumatologie, donc ils n'ont pas connaissance de la mémoire traumatique et des processus (…) Souvent les psychiatres qui prennent en charge les agresseurs n'ont pas du tout de formation en psychotraumatologie. Ils vont les prendre en charge sans prendre en charge la mémoire traumatique, et du coup, ils ne vont pas traiter ce qui rend les personnes très dangereuses." ⁵²

    La survivante d'abus rituels et de contrôle mental, Lynn Moss Sharman, a déclaré lors d'une interview radio avec Wayne Morris : "J'étais tombé sur quelques informations - dans une bibliothèque - indiquant que le Rite Écossais (Franc-maçonnerie) aux États-Unis avait financé, de par ses dons de "bienfaisance", la recherche sur la schizophrénie. Je me souviens à cette lecture avoir pensé que c'était plutôt curieux, cela m'a même fait froid dans le dos, que les hauts grades de cette société secrète choisissent d'utiliser leurs fonds de "bienfaisance" pour financer la recherche sur la schizophrénie (ndlr: Scottish Rite Schizophrenia Research Program, SRSRP). Un trouble qui est très similaire à certains égards au diagnostic sur le trouble de la personnalité multiple ou trouble dissociatif de l'identité qui est diagnostiqué chez 99% des survivants de sévices rituels, et certainement aussi chez les survivants du contrôle mental. (…) ⁵³

    Nous avons vu que le T.D.I. et la schizophrénie sont deux troubles psychiatriques imbriqués l'un dans l'autre, mais la schizophrénie semble être une sorte de "tiroir fourre-tout" servant plutôt à évincer des diagnostics qui pourraient être plus précis, plus détaillés, et par conséquent plus appropriés pour le traitement des patients.

     

    e/ T.D.I. et variations psychophysiologiques

    Un certain nombre d'études et de rapports indiquent l'existence d'importantes variations psychophysiologiques entre les personnalités alter d'un patient ayant un T.D.I.. Il peut s'agir de différences au niveau des réactions allergiques ou gastro-intestinales, la qualité de la vue peut également variée d'un alter à l'autre : certains cas démontrent qu'une cécité peut varier en fonction de la personnalité alter. Le changement de voix et d'écriture est quelque chose de récurrent. Il existe aussi des différences au niveau de la sensibilité à la douleur, rythme cardiaque, pression artérielle, circulation sanguine et fonctions immunitaires. D'autres différences ont été notées notamment dans les niveaux de glucose chez les alter de patients diabétiques.⁵⁴ Il a été démontré que les personnes qui simulent des personnalités alter ne peuvent pas provoquer de telles différences physiologiques. Ces variations parfois extrêmes valident donc le fait que les patients avec un T.D.I. ne jouent pas un rôle, mais qu'ils subissent un véritable changement de personnalité agissant sur des fonctions biologiques qui ne sont normalement pas contrôlables.⁵⁵

    Dans une conférence donnée en 2009 sur le phénomène des personnalités multiples, le père François Brune évoque plusieurs exemples de ces changements physiologiques remarquables :
    "En réalité ils ont déjà fait des découvertes absolument extraordinaires, notamment que l'on peut avoir affaire à des différences très fortes selon les personnalités qui envahissent la personnalité principale. Nous sommes donc finalement obligé de parler de "personnes principales" et de "personnes secondaires". Comment les distingue-t-on ?

    La personne principale est celle qui contrôle le corps la majeure partie du temps, contrairement aux autres (...) On va par exemple s'apercevoir qu'elles n'ont pas besoin des mêmes lunettes (…) On va s'apercevoir également que pour certains médicaments il va falloir changer les doses, notamment pour des diabétiques. On va s'apercevoir que certains sont gauchers à un moment donné et droitiers à un autre moment lorsque la personnalité change. On va aussi s'apercevoir qu'ils ne sont pas tous sensibles aux mêmes anesthésiants (…) Un malade mental (considéré comme tel officiellement) souffrant de dédoublement et même de triplement et de quadruplement de personnalité, qui devait être opéré, a démontré que son anesthésie a évité la souffrance à quelques-unes des personnalités qui l'habitaient tandis que les autres se sont plaintes d'avoir souffert. Elles pouvaient d'ailleurs décrire toute l'opération, elles n'étaient donc pas du tout endormies. Lorsque quelques années plus tard, cette même personne a dû se faire de nouveau opérer, il a alors fallu attendre patiemment que toutes les personnalités émergent une par une afin de savoir quel anesthésiant conviendrait à chacune (...) nous sommes là en Californie avec des médecins compétents… mais en France, évidemment c'est difficilement envisageable… Imaginez un hôpital français acceptant de rentrer là-dedans ? Alors là leur carrière serait très vite terminée ! Il y a également les allergies qui ne sont pas les mêmes. Il y a des cas de personnes qui normalement ne voient pas les couleurs, qui lorsqu'elles sont habitées par d'autres, rapportent qu'elles peuvent à nouveau les distinguer. Un autre cas étudié de façon très scientifique a été celui d'une personne à qui l'on demandait d'observer une lampe à flashs pour étudier avec un électroencéphalogramme les réactions dans son cerveau. Lorsque ce n'était pas la même personnalité qui était au contrôle, les réactions du cerveau n'étaient pas du tout les mêmes. Cela a été constaté scientifiquement lors de recherches très sérieuses et très rigoureuses."

    Un aspect particulièrement étrange de ces changements physiologiques concerne les effets des médications sur les personnalités alter. Selon certains rapports, il semblerait que leurs effets puissent être totalement cloisonnés et même annihilés. La survivante d'abus rituels et de contrôle mental australienne Kristin Constance a été hospitalisée trois fois avant d'être finalement diagnostiquée avec un T.D.I.. En 2011, lors d'une conférence, elle a décrit comment elle a fait une tentative de suicide en avalant un cocktail d'anxiolytiques, d'antidépresseurs et d'antipsychotiques… Elle ne s'est même pas endormie... Le cocktail chimique aurait été cloisonné dans une certaine personnalité alter et n'aurait eu aucun impact sur la personnalité qui était aux commandes du corps.

    Un phénomène qui est totalement irrationnel, mais le T.D.I. peut aussi relever du domaine paranormal… Sujet amplement développé dans le livre MK au chapitre 6 intitulé : « Traumatismes, Dissociation et Connexion aux autres Dimensions ».

    Une autre survivante d'abus rituels ayant un T.D.I. a également témoigné en 1997 dans l'émission "Your Turn" sur la chaîne américaine FOX13 News. Dejoly Labrier a décrit comment une de ses personnalités alter nommée "Ginger", avait besoin de Prozac car elle était déprimée. "Ils" (le système d'alter) ont donc prit ce médicament pour cet alter Ginger pendant deux ans… mais d'après Labrier, il n'y avait que Ginger à en ressentir les effets... (son témoignage est retranscrit en intégralité au chapitre 7 d livre MK).
    Des personnalités alter semblent pouvoir bloquer ou au contraire majorer les effets des médications, de même qu'elles peuvent "duper" d'autres alter en ne prenant pas les médicaments ou en en prenant des doses plus fortes tandis que les autres alter voudraient suivre le traitement correctement, mais ils n'ont pas conscience de ces comportements de sabotage provenant d'autres alter en raison des murs amnésiques.

    Un article du journal "Dissociation", paru en septembre 1994, relate le cas d'une série d'opérations chirurgicales avec anesthésie générale pratiquées sur une patiente atteinte d'un T.D.I.. Il a été constaté que ses besoins en anesthésiques étaient plutôt atypiques : Elle recevait une dose normale de relaxant musculaire, cependant la dose d'antalgiques différait totalement de la norme, elle ne nécessitait que seulement 16 à 33 % de la dose qui est habituellement utilisée pour un patient adulte sans T.D.I.. La dose d'anesthésiques était également inférieure à la norme, avec 50 à 80 % de la dose normale utilisée lors des opérations chirurgicales habituelles. La patiente a expliqué qu'une personnalité alter d'enfant était au contrôle du corps avant chaque opération, le changement d'alter semblerait avoir été provoqué par l'anxiété.

    Cela pourrait expliquer pourquoi les doses d'antalgiques et d'anesthésiques requises étaient bien plus faibles que pour une posologie d'adulte. Ce phénomène a été couramment observé par des cliniciens de plusieurs pays, ils rapportent que les patients ayant un T.D.I. nécessitent de plus petites doses de sédatifs lorsqu'un alter enfant est au contrôle du corps.⁵⁶

    Les variations psychophysiologiques concernent aussi la cécité. En novembre 2015, le Dailymail a publié un article intitulé "Blind woman, 37, with multiple personalities lost her sight after an accident but can still see when in her teenage boy character" (une femme de 37 ans avec plusieurs personnalités, devenue aveugle suite à un accident, retrouve la vue lorsqu'à émergé son alter de garçon adolescent).

    Cet article décrit le cas d'une femme allemande ayant été diagnostiquée avec une cécité corticale à l'âge de 20 ans suite à un accident. Depuis, elle marchait avec l'aide d'un chien guide. Son dossier médical démontre qu'elle a reçu une série de tests qui ont bien confirmé une cécité. Comme il n'y avait aucune atteinte physique sur ses yeux, il a été supposé que le problème provenait certainement de dommages au cerveau survenus lors de l'accident. 13 ans plus tard, en psychothérapie, elle a été diagnostiquée comme souffrant d'un T.D.I. avec une dizaine de personnalités alter... C'est au cour du traitement de ses troubles dissociatifs qu'il est arrivé quelque chose de remarquable : alors que son alter de garçon adolescent était aux "commandes", sa vue s'est rétablie.

    Ses thérapeutes ont rapporté que la vision de cette femme passait de l'obscurité à la lumière en quelques secondes, en fonction des personnalités alter qui émergeaient. Les psychologues allemands Hans Strasburger et Bruno Waldvogel, qui ont mené l'étude, ont utilisé un EEG (électroencéphalogramme) pour mesurer comment la zone de son cortex liée à la vue réagissait face à des stimuli visuels. Il a alors été constaté que lorsque la patiente était dans un alter "aveugle", son cerveau ne répondait pas aux images, tandis qu'avec une personnalité alter "voyante", les mesures étaient normales. Sa cécité allait et venait en fonction des personnalités alter aux commandes du corps. Les médecins pensent que son aveuglement a été provoqué par une forte réaction émotionnelle lors de l'accident. Le Dr. Strasburger a déclaré : "Cela sert vraisemblablement comme fonction de repli (…) Lors d'une situation émotionnellement très intense, le patient peut parfois réagir en devenant aveugle, et donc de ne plus avoir "besoin de voir"."

    Il existe d'autres cas où la cécité varie en fonction de l'alter qui émerge, notamment le témoignage de Diana dans un documentaire de la série "The Extraordinary" consacré au T.D.I., diffusé sur la chaîne australienne Seven Network dans les années 90.

    À noter ici que tout comme la psychophysiologie peut varier d'un alter à l'autre, le style d'écriture peut aussi totalement changer d'une personnalité à l'autre. L'écriture d'un individu est une marque permettant de l'identifier et d'analyser son profil psychologique, elle est unique et définitive, de ce fait la police utilise parfois les techniques de graphologie dans ses enquêtes. Les psychothérapeutes travaillant avec des patients ayant un T.D.I. ont noté des différences flagrantes de style d'écriture entre les personnalités alter d'une même personne, et l'analyse graphologique de cette écriture peut révéler des informations sur un alter en particulier. Il est donc possible d'identifier les personnalités alter par leur type d'écriture.⁵⁷

     

    f/ T.D.I. transgénérationnel

    "Il est courant que des femmes adultes traitées pour un T.D.I. décrivent clairement des symptômes de T.D.I. chez un de leurs parents ou même chez les deux parents. Des témoignages pouvant inclure des descriptions claire d'alternances de personnalités mais aussi les noms des personnalités alter des parents." "The Osiris Complex" - Dr. Colin Ross

    Dans son livre "Childhood Antecedents of Multiple Personality", le Dr. Richard Kluft rapporte des cas de patients dont plusieurs membres de leur famille souffraient d'états dissociatifs, cela de génération en génération. Il décrit notamment le cas d'un jeune homme de 22 ans qui a été soumis à un examen psychiatrique par un juge, la possibilité qu'il souffrait d'un T.D.I. avait alors été envisagée. L'homme était poursuivi en justice pour le meurtre de son géniteur. Il a déclaré à la police que son père était un pharmacien réputé, un des "piliers" de la communauté locale. Mais il a aussi rapporté que son père était impliqué dans du trafic de drogue et qu'il avait des connexions avec le crime organisé. L'inculpé a avoué qu'il était lui-même complice du trafic de drogue de son père car il faisait parfois des livraisons de marchandises. Il a également avoué que son père avait d'importantes dettes et que c'est lui-même qui lui avait demandé de le tuer pour que l'argent de l'assurance vie serve à combler ces dettes.

    Le père pensait aussi qu'un "suicide" pourrait annuler l'endettement. Toutes ces informations ont été validées par d'autres personnes lors de l'enquête. Le jeune homme ne pouvant pas tuer son père lui-même a donc recruté une autre personne pour commettre le meurtre. Le fils et le meurtrier furent finalement tous les deux arrêtés par la police.
    Le Dr. Kluft s'est entretenu quotidiennement avec ce jeune homme durant un certain temps et il a bien confirmé le diagnostic de personnalité multiple. Kluft a lui-même observé les changements d'attitudes, de voix, d'expression faciale et corporelle chez l'individu. De plus, des entretiens avec ses deux frères, sa soeur, sa femme, ses cousins et ses voisins, ont confirmé que le jeune homme avait des changements de comportements caractéristiques d'un T.D.I.. En se basant sur les déclarations de l'inculpé, de sa famille et de sa femme, il a également été décelé que le père avait très probablement lui aussi un T.D.I..
    Il était décrit comme un homme imprévisible qui entrait dans des rages inappropriées avec des changements de voix et des comportements inhabituels. L'inculpé tout comme certains membres de sa famille ont rapporté que le père agissait comme si "il était deux personnes différentes", affirmant qu'il était à la fois un "dealer de drogue" et un "pilier de la communauté"
    (c'est à dire qu'il avait d'un côté une activité criminelle occulte et de l'autre une façade publique très respectable). Ces déclarations peuvent concorder avec un T.D.I..

    Les informations collectées auprès du jeune inculpé, de sa femme, de ses frères et de sa soeur, laissent également penser que la mère vivait elle aussi des épisodes dissociatifs. Toutes les sources ont certifié qu'elle était instable et qu'elle avait une humeur très variable, elle était décrite comme une hystérique. Cette femme qui était habituellement en fauteuil roulant avait des périodes d'amélioration étonnantes de son état physique lors desquelles elle marchait sans problème, une chose qui était médicalement inexplicable (il est possible qu'il s'agissait d'un trouble dissociatif de conversion, pouvant se manifester par une paralysie ponctuelle). Les informations données par le fils et sa famille suggèrent également que la grand-mère paternelle souffrait d'un T.D.I. : elle était constamment décrite comme "imprévisible", "changeante", et en proie à des "problèmes de mémoire". Tous les membres de la famille l'ont décrite comme une "terreur" en raison de ses hurlements inappropriés et de ses comportements incontrôlables. De plus, son attitude avec ses enfants était totalement aléatoire. Il a été rapporté des maltraitances physiques sur ses enfants, mais paradoxalement elle montrait parfois une grande affection. Cela illustre le schéma incompatible entre amour et maltraitance fréquemment rapporté dans les familles de patients atteints d'un T.D.I.. Dans cette affaire, le jury n'a pas tenu compte du rapport psychiatrique apporté par la défense et le patient a été condamné à 25 ans de prison.

    Les données recueillies par le Dr. Richard Kluft auprès de plusieurs patients étayent l'hypothèse que la dissociation et le T.D.I. sont vraisemblablement transgénérationnels. Des preuves de troubles dissociatifs ont été observées et rapportées dans dix-huit familles de patients diagnostiqués avec un T.D.I. et suivis par le Dr. Kluft. Cela démontre un certain lien transgénérationnel, cependant plusieurs facteurs demandent encore des éclaircissements sur les mécanismes de cette connexion. Le Dr. Kluft affirme légitimement que ce type d'informations est collecté de manière ponctuelle alors qu'il faudrait les étudier systématiquement et méthodiquement pour pouvoir en tirer des statistiques et des conclusions. Des études poussées permettraient ainsi de pouvoir identifier les mécanismes sous-jacents à cette transmission du T.D.I. de génération en génération.⁵⁸

    Par quel biais se transmettent ces troubles dissociatifs d'une génération à l'autre ? Peut-être pouvons nous répondre en partie à cette question par la pratique des abus rituels transgénérationnels au sein des réseaux occultes ? Le cas rapporté ci-dessus par Richard Kluft nous montre un jeune homme souffrant d'un T.D.I., donc profondément traumatisé depuis sa petite enfance. Son père étant un notable pharmacien avec une solide réputation menant visiblement une double vie en faisant du trafic de drogues en parallèle de son activité professionnelle. Tout porte à croire, selon Kluft, que le père souffrait lui-même d'un T.D.I., tout comme sa femme et sa mère… Nous avons donc là le contexte classique d'une famille pratiquant les abus rituels de génération en génération, dont tous les membres sont englués dans des états dissociatifs. Les T.D.I. sont provoqués par des traumatismes extrêmes et répétitifs, ils n'apparaissent pas du jour au lendemain suite à une mauvaise grippe.

    De plus les activités illégales du père menant une double vie, renforcent l'idée qu'il s'agit là d'une famille faisant partie d'un réseau occulte, le trafic de drogues étant une chose courante dans ces milieux.
    Le processus de répétition systématique des traumas sur la descendance est un cercle vicieux alimenté par les mémoires traumatiques qui nécessitent une anesthésie dissociative.

    Ce processus a certainement une grande part de responsabilité dans la transmission générationnelle des états dissociatifs et particulièrement du T.D.I..

    La victime va s'auto-traiter par de la violence physique et psychique contre autrui, généralement ses enfants, qui vont à leur tour se dissocier et répéter les violences, et ainsi de suite de génération en génération. Ce phénomène peut se passer sans qu'il s'agisse de rituels de type sataniques, la "simple" violence familiale récurrente et l'inceste peuvent créer ce cercle vicieux si les troubles ne sont pas traités et guéris. Les abus sexuels marquent également l'ADN de la victime, les prédispositions à la dissociation et autres conséquences néfastes (dépression, bipolarité…) se transmettent donc également par voie génétique. Les chercheurs ont observé des modifications épi-génétiques, c'est à dire dans les mécanismes de régulation des gènes : "C'est la première fois que l'on voit un lien aussi clair entre un facteur environnemental et une modification épi-génétique. Lien d'autant plus fort que plus la maltraitance a été sévère durant l'enfance, plus la modification génétique est importante", souligne Ariane Giacobino du Département de génétique et de développement. (La maltraitance dans l’enfance laisse des traces génétiques - 24 Heures, 2012)


    Rappelons ici une affaire qui s'est déroulée à Paris en 2012. L'affaire relayée par BFMTV concernait les enfants d'un couple parisien dont l'homme était (justement) pharmacien…
    « Ce sont les médecins de l'hôpital Necker qui ont alerté la police. La petite fille de 2 ans et demi est transportée aux urgences pour des convulsions il y a un mois. Ses résultats de sang et d'urine laissent apparaître qu'elle absorbe depuis près d'un an régulièrement de la cocaïne. Son grand frère de 4 ans subit les mêmes examens. Même conclusion. Sauf que le garçon consomme aussi du crack et en forte quantité »

    Comment des enfants en bas âge peuvent-ils consommer de la cocaïne et du crack ?!
    Nul doute que ces enfants étaient volontairement drogués par des adultes… dans quelles circonstances et dans quels buts ? Une information judiciaire avait été ouverte par le parquet de Paris, où en est cette grave affaire aujourd'hui ? Où sont ces enfant à l'heure actuelle ? ⁵⁹

     

    g/ T.D.I. et alter animal

    Dans un T.D.I., la présence de personnalités alter enfants ou de sexe opposé est quelque chose de très courant. Ce qui est moins courant est la présence d'un alter non humain. Dans certains cas, la personnalité alter peut-être totalement déshumanisée au point de croire qu'elle est réellement un animal. La présence de ces "alter animaux" indique généralement que la personne a vécu des abus rituels. Le développement d'un alter animal se fait durant des traumatismes extrêmes et sadiques vécus dans la petite enfance. L'enfant a pu être forcé de se comporter et de vivre comme un animal. Il a pu être par exemple témoin de la mutilation d'un animal, forcé à participer ou à être témoin d'actes de zoophilie ou encore avoir été forcé de tuer un chiot ou un chaton. Dans le contrôle mental basé sur les traumatismes, la déshumanisation et l'alter animal sont volontairement créés par le programmeur d'une manière extrêmement sadique. Cependant, ces alter déshumanisés peuvent être présents sans qu'il y ait eu une programmation mentale volontaire, mais dans tous les cas c'est l'aboutissement d'un traitement traumatique inhumain, déshumanisant volontairement la petite victime.

    Voici quelques cas que le journal "Dissociation" a rapporté en 1990 dans un article intitulé : "Animal alters: case reports". Il a été rédigé par la psychiatre Kate M. Hendrickson, le professeur Jean M. Goodwin et Teresita McCarty. Le contenu de cet article a été présenté à la sixième conférence annuelle sur la dissociation et les personnalités multiples à Chicago en octobre 1989.
    Le premier cas rapporté est celui d'une femme de 38 ans qui faisait très souvent référence aux animaux durant sa thérapie. La patiente racontait comment son père attrapait parfois des oiseaux pour les enfermer avec elle dans les toilettes lorsqu'elle était punie, ils venaient alors lui piquer la tête avec leurs becs.
    Cela la terrorisait, elle explique : "Lorsque je suis trop terrifiée, je me transforme en oiseau et je vole dans les toilettes."
    Parfois son père accrochait des lapins ou des oiseaux morts au dessus de son lit. Il disait alors à sa fille qu'elle pourrait être étranglée tout comme ces animaux si elle ne faisait pas ce qu'on lui disait de faire ou bien si elle parlait des maltraitances. Elle était aussi forcée de manger des restes dans une gamelle de chien, etc. Lorsque la chatte de la famille mettait bas ses petits, le père montrait à sa fille ce qu'il lui ferait si elle tombait enceinte. Pour cela il ouvrait l'abdomen des chatons après les avoir étranglés et démembrés. Ces horreurs faites sur les animaux étaient un moyen de terroriser et de traumatiser la petite fille.
    Lorsque son père l'a violé à l'âge de huit ans, elle commença a être terrorisée à l'idée de tomber enceinte et de subir le sort des chatons. Lorsque ces horreurs ont commencé à remonter en thérapie, elle a déclaré qu'elle entendait des "cris de bébés étranges à l'intérieur d'elle". Ces cris qu'elle entendait étaient inconsolables et elle était terrifiée à l'idée de quitter le bureau du thérapeute parce que selon elle "tout le monde le saurait". Elle était terrifiée à l'idée que d'autres personnes puissent entendre ces cris et savoir ainsi qu'elle avait elle-même participé à la mutilation des petits chatons. Elle a affirmé qu'elle avait essayé d'aider la chatte en la prenant avec ses chatons à l'intérieur d'elle pour que son père ne puisse plus leur faire de mal. Elle était terrorisée par un de ses alter dans lequel était intériorisée la souffrance de la mère des chatons. Cet alter de chat lui-même terrifié par le père de la patiente. Après avoir décrit et compris comment les chatons avaient été intériorisés, il est alors devenu possible pour elle de parler de ses grossesses par inceste survenues à l'âge de quatorze ans et seize ans. Le père ayant tué les bébés dès leur naissance, d'où ces cris étranges de bébés inconsolables à l'intérieur d'elle.
    Elle affirme qu'un de ses bébés a été démembré comme les chatons.
    Après que la patiente ait parlé des chatons à l'intérieur d'elle, elle a été capable de se rappeler les mémoires dissociées et refoulées de l'inceste, les grossesses et les infanticides. Au tout début, elle ne pouvait parler de ces lourdes mémoires traumatiques qu'à travers son alter de chat. Cet alter chat pouvait "parler" de ces affreuses histoires alors que la personnalité principale de la patiente ne le pouvait pas. Il a été constaté que lorsque la patiente était "déclenchée" par l'évocation du fait qu'elle n'avait pas pu sauver ses enfants ni les chatons, elle s'automutilait avec une lame de rasoir à l'extrémité de ses doigts, des doigts qui ont fini par ressembler à des griffes. Elle décrira aussi un comportement similaire lorsqu'elle se retrouvait d'une manière ambivalente au lit avec des hommes : l'alter chat pouvait faire de nombreuses griffures sur leur visage ou leur poitrine…

    Un autre cas rapporté est celui d'une femme de 35 ans qui lorsqu'elle était terrifiée se transformait en chien. Cela peut prêter à sourire mais le fond du problème n'a absolument rien de comique. Ses parents d'origine allemande la punissaient en la faisant manger à quatre patte dans une gamelle de chien, ils l'obligeaient à se comporter comme un chien. Lors d'une thérapie individuelle, un T.D.I. a été diagnostiqué et elle a révélé qu'elle avait été violée par son père qui en plus de cela impliquait le chien de la famille dans des actes zoophiles. Toute référence au sexe, au fait qu'elle était méchante ou bien mauvaise la faisait se "transformer" en chien. Lorsque cela arrivait en séance de thérapie, la patiente commençait à avoir un comportement de animal et à parler en allemand (sa langue habituelle était l’anglais mais il est possible que les parents parlaient en allemand lors des actes sadiques et traumatiques). Les déclarations concernant les traitements déshumanisants consistant à l'obliger à se comporter comme un animal ont précédé les déclarations sur les abus sexuels.

    L'article du journal Dissociation rapporte également un cas criminel, celui d'une femme avec un trouble dissociatif qui a été condamnée pour meurtre par éviscération. Certaines preuves ont montré qu'elle aurait utilisé à un moment donné ses dents et ses ongles lors du crime. C'est ce qu'elle pensait également en raison du goût de sang qui restait dans sa bouche car elle était totalement amnésique concernant ce crime. Lors de l'enquête, elle a été interrogée sous hypnose. Lorsqu'elle était en transe hypnotique, il lui a été suggéré de s'imaginer dans un endroit paisible, elle a alors décrit qu'elle se trouvait dans une jungle et qu'elle était elle-même une panthère dans les branches d'un arbre. Après plusieurs séances d'hypnose pour tenter de reconstituer et comprendre le crime, elle a déclaré lors d'une transe qu'un phacochère avait attaqué la panthère et qu'il s'était fait éventrer. Des preuves ont montré que les ongles de ses mains avaient servis pour le crime mais bizarrement aucune trace de sang n'avait été retrouvée sous ses ongles. Une explication serait qu'elle les aurait léchés tout comme un félin se lave les pattes. L'amnésie de cette femme couvrait également une grande partie de sa petite enfance, mais aucun antécédent de violence n'a pu être découvert.
    Lorsqu'un patient se conduit comme un animal, cela peut sembler être un comportement psychotique particulièrement sévère. Mais ces symptômes étranges doivent être observés et examinés attentivement, au même titre que les rêves et les fragments de mémoires qui devraient être systématiquement explorés et décortiqués. Les alter animaux peuvent être en partie reliés à des souvenirs dissociés et ils peuvent servir à bloquer l'accès à une zone de mémoire spécifique. Lorsque les raisons de son développement et les fonctions de l'alter animal ont été découvertes et comprises, cet alter peut alors être connecté avec les mémoires de la petite enfance et au trauma qui en est la cause.

    Le contact avec ces alter animaux est une porte ouverte vers les alter les plus violents de la victime (qui peuvent être animal ou humain). Ces alter représentent l'identification de la victime avec les actes les plus violents des bourreaux. ⁶⁰
    Dans les abus rituels sataniques, la torture et la mise à mort d'animaux est couramment utilisée pour intimider et réduire au silence les victimes. Il est dit à l'enfant qu'il subira le même sort si il parle de quoi que ce soit. De plus, il est forcé de participer aux actes barbares afin de le culpabiliser pour le rendre à son tour "coupable". L'animal peut donc s'intérioriser pour devenir un fractionnement de la personnalité dissociée par les traumatismes, un alter pouvant faire preuve d'une rage extrême. Mais par un contact et une réconciliation, une alliance peut-être créée avec l'alter animal afin d'en faire un allié précieux pouvant aider la victime dans sa guérison.

     

    h/ T.D.I et thérapies

    Ce sous-chapitre consacré à la thérapie n'a pas vocation à servir de guide médical ou thérapeutique. Il a pour but de donner quelques informations supplémentaires pour permettre de comprendre encore un peu mieux le fonctionnement d'une personnalité fractionnée, ainsi que la manière dont on peut aborder le problème pour apporter un soutien et une aide.

    La stratégie thérapeutique pour le T.D.I. consiste à "ressouder", ou "fusionner", les personnalités alter entre elles. Il s'agit de diminuer leur nombre jusqu'à n'en avoir plus qu'une seule, généralement celle qui était présente à l'origine, la personnalité dite "hôte".

    Ce mécanisme est nommé "l'intégration",
    il s'appuie sur les principes suivants listés par le Dr. Colin Ross :

    - Contacter toutes les personnalités en utilisant l'hypnose.
    - Rassembler tous les éléments constitutifs de l'histoire de toutes les personnalités alter.
    - Considérer que chaque personnalité est une partie de l'ensemble.
    - Développer l'entente mutuelle et la coopération entre les différentes personnalités alter.
    - Contrôler les changements de personnalité alter. (switch)
    - Passer des accords avec chaque personnalité afin de superviser l'ensemble du système.
    - Établir d'abord des fusions entre les personnalités en fonction de leurs affinités.
    - Progresser vers l'intégration finale et l'affermir en s'appuyant sur l'aide aux relations sociales du patient.

    Voici le type de questions qui peuvent être posées lorsque l'on rentre en contact avec une personnalité alter, en prenant soin de respecter le libre arbitre et de demander la permission pour poser certaines questions :

    - Comment vous appelez vous ?
    - Quel âge avez-vous ?
    - Quelle est votre fonction ?
    - Pourquoi êtes-vous là ?
    - Depuis quand êtes-vous là ?
    - Suite à quel événement ?
    - Quels sont vos souvenirs ?
    - Y a-t-il quelqu'un d'autre ?
    - Combien êtes-vous ?
    - Y a-t-il des enfants ?
    - Qui est en détresse ?
    etc...

    Dans un article intitulé "Dissociative phenomena in the everyday lives of trauma survivors", la psychothérapeute Janina Fisher donne quatre "lois" simples pour comprendre le système interne d'une personnalité dissociée et pouvoir ainsi travailler sereinement avec elle(s) :

    - Un alter n'est qu'une fraction d'un tout : Peu importe l'état dans lequel le patient peut se retrouver à un moment donné, peu importe son état de régression, d'impuissance et de confusion, il y aura toujours d'autres alter adultes qui seront confiants et compétents pour avancer positivement dans la thérapie. Peu importe l'aspect autodestructeur que peut montrer à un moment donné le patient, il existe d'autres alter qui veulent vivre et lutter pour survivre. Il existe toujours des alter qui se battront pour vivre et qui lutteront pour garder le contrôle sur ces sentiments accablants d'impuissance et de démoralisation. Le patient doit garder à l'idée que peu importe le ou les alter qui dominent à un moment donné, il ne s'agit que d'une fraction d'un système conçu pour être en équilibre.

    - Le système est conçu pour la survie et non pour la destruction : Cette "loi" permettra au thérapeute d'économiser un épuisement inutile lors des crises récurrentes et de prévenir des hospitalisations inutiles. Le travail thérapeutique consiste à aider le patient à s'adapter à ce système pour qu'il puisse faire face à sa complexité et aux défis que cela pose dans sa vie présente d'adulte. Ces fonctions dissociatives, ces changements de personnalité, peuvent être exploités de manière constructive pour pouvoir tenir le cap et être capable de mener une vie qui a du sens, être en mesure de trouver du plaisir à la vivre et à la créer. Le fait que ce système a été conçu pour être adaptatif signifie également que chaque crise, chaque nouveau "pépin" qui se produit, fournit en fait la possibilité de réajuster le système d'une autre façon pour le rendre encore plus adapté à la vie du patient. Ces crises permettent donc de comprendre un peu mieux encore le fonctionnement du système interne.

    - Pour chaque action, il y aura une réaction opposée et égale : Cela signifie que chaque fraction, chaque partie du "Moi", aura sa polarité inverse ou son opposé. Par exemple des alter suicidaires et autodestructeurs auront par opposition des alter déterminés à vivre et à combattre et des alter terrifiés à l'idée de mourir ou d'avoir à ressentir de la douleur. Des alter qui vivent dans la honte en voulant se cacher et être invisibles seront équilibrés par des alter narcissiques voir même exhibitionnistes. À tout moment, un sentiment, une prise de décision ou un point de vue exprimé extérieurement s'équilibrera intérieurement par une réaction opposée égale. Cet équilibre systématique des contraires peut avoir à la fois des conséquences positives ou négatives car il se produit également une réponse opposée lors des changements ou des événements positifs. Par exemple si certains alter développent une plus grande confiance et une proximité avec le thérapeute, d'autres alter se sentiront menacés et tenteront de saboter la thérapie pour mettre de la distance avec le thérapeute. Si certains alter vont tester implacablement les compétences, la cohérence et la fiabilité du thérapeute, d'autres alter en ressentiront de la tristesse et de la désolation et voudront alors redoubler d'efforts pour plaire au thérapeute.

    - Le thérapeute est le thérapeute de tous les alter : Le thérapeute est le thérapeute de l'ensemble du système et donc de toutes les parties qui le composent. Ne travailler qu'avec certains alter en négligeant d'autres parties reviendrait à dire que l'on ne travaille seulement qu'avec la moitié du patient. Que ce soit avec la "moitié sympa", la "jeune moitié", la "moitié autodestructrice" ou encore la "bonne moitié" du patient, le travail thérapeutique ne peut pas être efficace en prenant seulement en compte une partie d'un tout. Si le thérapeute est le thérapeute de toutes les parties, il sera neutre, il ne prendra pas parti et il ne gardera pas de secrets. Il découvrira ainsi le potentiel et l'utilité que chaque alter amène dans la thérapie et au système dans son ensemble, y compris les alter violents, suicidaires ou autodestructeurs. Il verra les interactions entre les différents alter, ce qui mettra en évidence les conflits internes, tout comme un thérapeute familial le ferait. De la même manière que fonctionne le système familial, le patient ne sera identifié à aucun de ses alter mais plutôt au système global d'alter. En raison du fait que chez les patients dissociatifs le système et le patient sont une seule et même personne, le thérapeute doit éviter un piège courant dans le traitement de la dissociation : c'est à dire de parler au système comme s'il s'agissait d'une personne unique faisant office de "porte tournante" donnant accès aux différents "membres de la famille" pour qu'ils viennent raconter leurs histoires successivement. Il est généralement plus utile de travailler principalement avec le(s) "parent(s)", c'est à dire l'alter adulte ou le personnalité hôte, afin de leur enseigner à acquérir les compétences nécessaires pour favoriser la communication et la coopération interne entre tous les alter.
    En début de thérapie, en raison de son amnésie traumatique dissociative, le patient ayant un T.D.I. fera tout d'abord état d'un vécu fragmenté et incohérent.
    Son histoire personnelle complète et chronologique viendra avec le temps, par l'intégration progressive des mémoires et des personnalités dissociées.
    Le processus d'intégration peut être comparé à la construction d'un puzzle qui ne pourrait pas prendre forme sans les différentes pièces qui constituent les expériences de vie qui ont été fractionnées par la dissociation.
    L'intégration consiste donc à assembler ces pièces de puzzle pour recréer un ensemble cohérent comprenant tous les souvenirs, qu'ils soient valides ou non.

    Les morceaux de la mémoire appartenant aux différents sens (ouïe, odorat, toucher, vue, goût : la mémoire non sémantique) sont gérés par l'hippocampe dont le rôle est de les transférer vers le cortex cérébral pour qu'ils soient traités et intégrés consciemment. Ainsi, ils passent d'un mode inconscient à un mode conscient, d'un mode dissocié à un mode associé ou ressoudé. Ils deviennent une mémoire intégrée qui peut à présent être verbalisée de manière cohérente.⁶¹

    Le terme de fusion est également employé pour décrire le processus d'intégration. Un esprit n'ayant pas subi de traumas et de dissociation travaille de manière unifiée. Pour un esprit dissocié et fractionné, la fusion est le moment où deux (voir plus) personnalités alter prennent conscience mutuellement de leurs existences respectives. Elles expérimentent alors une sorte de fusion, une dissolution des murs amnésiques qui fait qu'elles n'auront plus aucune séparation et partageront donc les mêmes mémoires.
    La "fusion finale" est le but recherché de la thérapie. Le patient passe d'un état avec plusieurs identités à celui d'un soi subjectif unifié,
    c'est l'Unification.

    Il est reconnu par les thérapeutes qu'il existe trois grandes étapes dans le processus d'intégration. Mais avant toute chose il faut absolument établir un sentiment de sécurité physique et psychique chez le patient, ainsi qu'une stabilisation et une réduction des symptômes (comorbidité). Cette stabilisation va permettre de pouvoir travailler sur les souvenirs traumatiques, des mémoires qui doivent être intégrées consciemment. L'intégration, ou fusion des personnalités alter, ainsi que la réhabilitation, arrivent en phase finale.

    Ces trois étapes peuvent se chevaucher en raison d'un alter qui pourrait traîner plus que d'autres, mais habituellement le thérapeute traite une étape à la fois :

    - Phase 1: Sécurité, stabilisation et réduction des symptômes:

    Il s'agit tout d'abord de créer une sorte d'alliance entre le patient et le thérapeute pour établir une mise en confiance et une stabilité. Dans cette étape, il s'agit de minimiser les comportements qui peuvent être dangereux autant pour le patient que pour son entourage. Il faut également réduire les pensées négatives qui peuvent le rendre vulnérable à de nouvelles attaques extérieures. La gestion et le contrôle du stress post-traumatique est également une priorité en phase 1. Les autres comportements qui vont devoir être régulés sont les troubles alimentaires, les prises de risques, la violence, les agressions, etc. Les personnalités alter impliquées dans des comportements violents et s'identifiant avec le(s) agresseur(s) peuvent être particulièrement difficiles à gérer. Il s'agit donc de les identifier rapidement pour essayer de passer un accord, une sorte contrat avec elles pour aider le patient à se sécuriser. Ces alter effrayants, colériques et violents ont souvent un rôle de protecteur, malgré les apparences, ils sont là pour protéger le patient. Les alter "observateurs" quand à eux peuvent être très utiles pour reconstituer chronologiquement les mémoires éclatées afin de savoir ce qu'il s'est passé, le déroulement des événements (ou bien l'illusion et la manipulation que les bourreaux ont voulu créer).

    Généralement, les personnalités alter se considèrent elles-mêmes comme une personne véritablement séparée, extérieure au groupe d'alter et autonome. C'est lorsqu'elles vont prendre conscience de l'existence des autres alter, qu'elles vont réaliser qu'elles sont multiples et qu'elles appartiennent à un même corps physique. Cette prise de conscience va par exemple éviter les automutilations et un engagement pourra être conclu avec chacune d'entres elles pour éviter les comportements autodestructeurs. Beaucoup d'alter se sentent vides, dépersonnalisés ou incertains de leur identité, c'est précisément parce qu'ils ne sont qu'une partie d'un tout. C'est tous ensemble qu'ils forment une personne complète. Il s'agit donc de créer une forme de cohésion ou chaque alter connaît les autres et trouve sa place dans le groupe, ou système interne.

    Faire des alter des assistants dans la thérapie est un atout majeur, il faut également développer des stratégies pour améliorer leur entente et leur communication mutuelle car le patient perd beaucoup d'énergie à devoir gérer les conflits internes entre eux. Le développement d'une relation de confiance et d'un dialogue avec les personnalités alter sera la clé pour découvrir les traumatismes (phase 2) et aboutir à une stabilité et à une intégration (phase 3).
    La communication non verbale et émotionnelle est aussi un point important. Certains alter auront besoin d'être serrés dans les bras, tandis que d'autres prendront ce geste pour une tentative d'approche sexuelle. Certains alter sont incapables de regarder droit dans les yeux la personne qu'il y a en face d'eux. Certains s'exprimeront de manière extravertie tandis que d'autres seront totalement terrifiés et auront juste besoin d'écouter des paroles rassurantes. Certains ne peuvent donc pas parler, ils auront besoin de communiquer à travers l'écriture, le dessin ou grâce à un autre alter qui aura un rôle de médiateur. Le thérapeute ne doit pas tomber dans le favoritisme et doit traiter chaque alter de manière égale. Il ne doit pas non plus être effrayé par ceux qui paraissent hostiles car ceux-ci utilisent la colère pour protéger les alter plus vulnérables, qui sont généralement des jeunes enfants. Durant cette phase, il peut aussi y avoir l'utilisation de techniques d'ancrage dans l'instant présent et de méthodes d'auto-hypnose. Parfois il sera nécessaire d'avoir recours à des médications pour palier aux comportements à risques, mais cela ne doit pas être le coeur du traitement. Il s'agit également dans cette première phase de développer chez le patient l'acceptation et l'empathie pour chaque partie de sa personnalité fractionnée, chaque alter doit être considéré pour ce qu'il est et comme ayant son rôle à jouer dans la thérapie et dans la vie du patient.


    - Phase 2: Confrontation et intégration des souvenirs traumatiques :

    La deuxième phase se concentre sur les mémoires traumatiques du patient.
    À ce niveau là, il y a encore un gros travail pour l'aider à accepter les différentes parties de sa personnalité et les alter doivent continuer à apprendre à se connaître et à vivre ensemble. Dans cette étape, le travail consiste également à surmonter les problèmes de blocage du patient dans son passé. L'une des tâches les plus difficiles dans cette phase va être de surmonter la peur des souvenirs traumatiques pour pouvoir les intégrer efficacement.

    Le patient et le thérapeute devront discuter ensemble pour arriver à un accord sur les mémoires qui doivent être traitées prioritairement. Une fois que ces mémoires traumatiques sont traitées et intégrées, elles doivent être partagées avec chaque personnalité alter qui n'en avait pas conscience. Cette mise en commun des expériences traumatisantes avec tous les alter du système s'appelle la "Synthèse".
    Une fois cette Synthèse réussie, elle doit se poursuivre pour aboutir à la pleine conscience que les traumas ont été vécus, traités, et qu'ils font maintenant partie du passé : il s'agit de la "Réalisation". Ainsi le patient va pouvoir donner une place précise au traumatisme dans la chronologie de sa vie.
    De ce fait, les pièces du puzzle mémoriel vont se reconstituer petit à petit pour former une véritable frise chronologique. La Synthèse est également suivie par la "Personnification", c'est à dire la prise de conscience que ces mémoires traumatiques appartiennent bien au patient, et à personne d'autres.
    Enfin, grâce à ce travail sur les mémoires traumatiques, le patient peut transformer ses souvenirs, auparavant dissociés et éparpillés, en un récit cohérent et compréhensible, c'est la "Narration". C'est le passage d'une mémoire non verbale à une mémoire narrative et analytique.

    Durant cette étape, de fortes émotions vont éclater lorsque le contenu traumatique des souvenirs va émerger à la conscience. Le patient peut alors manifester de la honte, de l'horreur, du dégoût, de la terreur, de la colère, de l'impuissance, de la confusion ou du chagrin. Il s'agit alors de donner un temps de récupération adéquat entre chaque séance afin de ne pas déstabiliser ou re-traumatiser le patient. Mais même avec un planning thérapeutique soigneux, il peut-être nécessaire de faire des retours en phase 1 pour une nouvelle stabilisation lorsque la remontée d'une mémoire s'avère particulièrement violente. À mesure que les vécus traumatiques seront intégrés, les personnalités alter deviendront de moins en moins séparées et distinctes.
    Une fusion spontanée peut aussi survenir mais un essai prématuré d'unification globale peut causer un stress qui serait négatif pour le patient. Au fur et à mesure que la fragmentation du patient se résorbera, il va acquérir un certain calme intérieur avec un sentiment de paix, d'autant plus lorsque la thérapie s'accompagne d'un renouveau spirituel. Grâce à ce nouvel état intérieur, le patient sera plus à même d'appréhender son histoire traumatique et d'assumer les problèmes de la vie courante. Le patient va commencer à moins se focaliser sur les traumas de son passé pour canaliser son énergie dans l'instant présent, ce qui l'aidera beaucoup à développer de nouvelles perspectives pour se projeter dans le futur.


    - Phase 3: Intégration et réhabilitation :

    La troisième phase vise l'intégration (l'unification finale) de la personnalité. Dans les deux premières étapes, le patient a appris à surmonter la peur des autres parties de sa personnalité et la peur de ses mémoires traumatiques. Il a également accepté et intégré l'idée d'avoir été abusé dans l'enfance. Tel un deuil douloureux, le patient devra abandonner d'anciennes croyances pour envisager de nouvelles perspectives.
    Il va maintenant devoir apprendre à gérer les émotions qui peuvent survenir comme la honte, la peur, la terreur, la colère et le chagrin. La manifestation émotionnelle des traumatismes peut se produire pendant plus de deux ans, suite à cela l'unification est considérée comme sûre.
    Durant cette période, le patient pourra spontanément revenir en phase 2 car de nouvelles mémoires traumatiques pourront encore émerger. Après l'intégration finale, l'unification de toutes les personnalités alter, le patient conservera généralement les compétences et les attributs des différents alter qui étaient dissociés de sa personnalité.

    Ces trois phases de traitement du T.D.I. sont probablement inspirées des travaux menés au XIXème siècle par Pierre Janet. Sa méthode psychothérapeutique pour le traitement du stress post-traumatique comprenait les trois étapes suivantes :

    1: La stabilisation des symptômes en préparation de la liquidation des souvenirs traumatiques.
    2: L'identification, l'exploration et la modification des souvenirs traumatiques.
    3: Soulagement des résidus symptomatologiques. Réintégration et réhabilitation de la personnalité. Prévention de la rechute.

    Concernant l'usage des médicaments, ce n'est pas un traitement de premier ordre pour les troubles dissociatifs, mais cela peut avoir son utilité. En effet, certains patients requièrent un traitement spécialisé contre l'abus de substances ou les troubles alimentaires. Beaucoup de thérapeutes emploient l'hypnose, cette technique est destinée à calmer, à apaiser, à contenir ou à renforcer le "moi".

    L'hypnose permet également d'accéder aux personnalités alter qui ne sont pas accessibles directement sans état modifié de conscience. Dès le début du XIXème siècle l'hypnose a été utilisée pour le traitement du T.D.I., il en est sortie de nombreuses études démontrant que ces patients sont hautement hypnotisables en comparaison avec d'autres groupes cliniques. Plus l'hypnotisabilité de l'individu est élevée, plus elle sera efficace dans la thérapie. L'hypnose et l'auto-hypnose peuvent aussi avoir une grande efficacité dans le traitement du stress post-traumatique généralement présent chez les patient ayant un T.D.I..

    D'autres méthodes thérapeutiques spécialisées peuvent être utiles pour ces patients, citons par exemple la thérapie familiale ou expressive, la remodulation et la thérapie comportementale dialectique (TCD), la psychothérapie sensori-motrice, la thérapie "primale", l'intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires (EMDR), etc…
    L'EMDR (Eye Movement desensitization and reprocessing) est une thérapie de désensibilisation et de retraitement par le mouvement rapide des yeux, cette technique tout d'abord utilisée pour effacer des chocs post-traumatiques permet de traiter de très nombreux traumatismes psychiques.

    Les appareils de biofeedback ou neurofeedback peuvent aussi être une aide supplémentaire pour le patient, tout comme l'acupuncture et même les changements de mode alimentaire.
    La thérapie de groupe n'est pas recommandée dans le cas du T.D.I., beaucoup de ces patients ont en effet du mal à tolérer le processus qui encourage les discussions de groupe sur les expériences traumatiques des participants. Toutefois, à partir d'un certain stade d'intégration, l'énergie de groupe peut-être un soutien efficace pour le patient. Le traitement du T.D.I. se fait généralement en ambulatoire (ne nécessitant pas une hospitalisation), cependant, le traitement hospitalier sera nécessaire si le patient montre des risques contre lui-même (auto-mutilation, anorexie extrême, tentative de suicide) ou contre autrui lors des phases dissociatives.

    Les thérapies expressives vont aussi jouer un rôle positif dans la guérison du patient. La tenue d'un ou plusieurs journal, l'art-thérapie, la thérapie par la musique, la thérapie par l'horticulture et par les animaux (notamment avec les chevaux), la thérapie par le mouvement, le psychodrame, la thérapie occupationnelle et la thérapie récréative offrent au patient l'occasion de mettre en application une vaste gamme de techniques pouvant lui apporter un moyen d'expression et de stabilisation. Cela va faciliter la concentration, la pensée pragmatique, l'organisation et la coopération du monde interne (les alter).
    Les pratiques artistiques comme la peinture, l'écriture, le collage, la sculpture, etc, peut servir comme enregistrement visuel et palpable du vécu des personnalités alter, des productions qui pourront ainsi être classées et examinées à tout moment du traitement.

    Pour finir ce sous-chapitre sur les thérapies, voici quelques conseils pratiques et exercices⁶² s'adressant directement aux patients souffrant de troubles dissociatifs : Il s'agit de prendre conscience de "l'ici et maintenant », l’ancrage dans l’instant présent. Pour cela, il est utile de s'observer et de se percevoir soi-même consciemment, sans porter de jugement. Lorsque vous remarquez que vous entrez dans un état dissociatif, autrement dit que vous commencez à partir, que vous n'êtes plus tout à fait là, que vous vous percevez moins bien, essayez de marquer un temps d'arrêt. En vous exerçant, et peut-être même avec un soutien thérapeutique, vous pourrez apprendre à répondre aux questions suivantes :

    - Dans quelle situation me trouvais-je lorsque j'ai commencé à me dissocier ?
    - Qu'est-ce que je ressentais sur le plan corporel et sur le plan psychique ?
    - Quelle est la dernière chose dont je me souvienne ?
    - Je savais que j'entrais dans un état dissociatif parce que :
    1/ J'ai commencé par exemple à me balancer, à me percevoir comme dans un brouillard, à avoir des maux de tête....
    2/ J'ai arrêté par exemple de parler, de penser clairement, d'être en contact visuel...
    3/ J'ai commencé à me dire que je pourrais mourir, que l'on ne pouvait faire confiance à personne, que je ne fais jamais rien de bien...
    - Qu'ai-je essayé d'éviter ?
    - Qu'aurai-je pu faire à la place ?
    Si, avec le temps, le patient parvient à répondre à ces questions de mieux en mieux, il sera en mesure de mieux contrôler ses comportements dissociatifs.

    Que pouvez-vous faire quand vous entrez dans un état dissociatif ?

    - Prenez conscience que vous êtes dans un état dissociatif, un état qui va passer comme tout passe.
    - Prenez conscience également du fait que ce comportement survient parce qu'il vous a protégé autrefois. Maintenant, vous n'en avez plus besoin, vous disposez d'autres moyens.
    - Trouvez une formule comme : "Maintenant je suis adulte et en sûreté". Dites-vous cette phrase à voix haute, à vous-même.
    - Gardez les yeux ouverts et sentez le sol sous vos pieds.
    - Avez-vous un objet que vous aimiez (par exemple une peluche ou autre accompagnant bienveillant) ? Percevez-le consciemment.
    - Activez vos sens à l'aide de quelque chose de froid (passez-vous par exemple des glaçons ou de l'eau froide sur les mains, les bras, le visage).
    - Prenez conscience de la différence entre autrefois et maintenant. Dites vous à voix haute la date du jour, où vous vous trouvez et quel âge vous avez.
    - Respirez consciemment. Sentez l'air entrer puis sortir de vos poumons. Respirez les yeux ouverts, concentrez-vous un peu plus sur l'expiration.
    - Faites quelque chose qui demande votre attention et active vos sens : lisez ou regardez une image, écoutez de la musique, touchez une pierre, sentez l'odeur d'une fleur ou d'une huile essentielle, goûtez consciemment l'arôme d'un raisin sec, de graines de tournesol ou de quelque chose d'épicé.
    - Bougez : promenez-vous, secouez vos membres, tapez des pieds, dansez...
    - Faites quelque chose avec vos mains : écrire, peindre, jardiner, construire un puzzle ou autres divers travaux manuels…
    - Prenez une douche et concentrez vous sur le contact avec l'eau.
    - Soyez compréhensif envers vous-même. Vous méritez de faire preuve de douceur envers vous.
    - Veillez à vous entourer de personnes qui vous font du bien et auprès desquelles vous ne vous sentez pas menacé.
    - Lorsque vous êtes sûr de cela, vous pouvez vous dire : je suis maintenant avec untel, je sais qu'il me veut du bien. Si j'entre maintenant dans un état dissociatif, cela a à voir avec d'anciennes mémoires ; à l'instant présent : je suis en sécurité.
    - Imaginez que vous mettez dans un coffre-fort tous les éléments du passé qui vous pèsent. Une fois enfermés, ils ne vous gêneront plus.

      

    5 - Développement du T.D.I. chez l'enfant

    a/ Introduction

    Le T.D.I. prend naissance dans la petite enfance, son développement va se faire sur le long terme et il sera généralement plus flagrant et plus reconnaissable à l'âge adulte. Le Dr. Greaves écrit que "Les fractions de personnalité se manifestent habituellement d'elles-mêmes dans la petite enfance, dès l'âge de 2 ans 1/2 et typiquement vers l'âge de 6 ou 8 ans." ⁶³

    Dans un article intitulé "Incipient multiple personality in children: Four cases" (naissance d'une personnalité multiple chez l'enfant: quatre cas), le Dr. Fagan et le Dr. Mc Mahon ont rapporté le cas de quatre enfants qui développaient un début de fractionnement de personnalité. Le plus jeune avait 4 ans et le plus âgé avait 6 ans. Fagan et Mc Mahon déclarent dans cet article que "la multiplicité s'établit vers 5 ans jusqu'à 8 ans au plus tard, mais cela ne sera généralement pas diagnostiqué avant l'âge adulte." ⁶⁴

    Dans un article intitulé "Psychotherapy with a ritually abused 3-year-old: deceptive innocence", la psychothérapeute Leslie Ironside rapporte que "des identités dissociées ont été diagnostiquées chez une enfant aussi jeune que trois ans, rituellement abusée et ayant endurée des niveaux extrêmes de traumatismes." ⁶⁵

    L'existence du T.D.I. chez des enfants a été établie par le Dr. Antoine Despine en 1840. Il a rapporté le cas d'une fillette suisse de 11 ans, Estelle, qui a été décrit plus haut dans ce chapitre. Le Dr. Richard Kluft a également publié plusieurs documents sur les enfants et le T.D.I. dont le cas d'un enfant de 8 ans, Tom, que nous décrirons plus loin.

    Morris Weiss, Patricia Sutton et A.J. Utecht ont rapporté en 1985 dans le Journal of the American Academy of Child Psychiatry le cas d'une fillette de 10 ans dans un article intitulé "Multiple Personality in a 10-Year-Old Girl" (personnalité multiple chez une fillette de 10 ans).
    Dans son livre "Healing The Unimaginable" (Guérir l'inimaginable), la thérapeute canadienne Alison Miller écrit : "J'ai traité le cas d'une fillette de 10 ans qui avait juste une personnalité alter en plus de sa personnalité hôte, un alter de 3 ans (...) Lorsqu'elle s'ennuyait à l'école, la petite fille de 10 ans "rentrait à l'intérieur de sa tête", l'alter âgé de 3 ans émergeait alors et prenait le contrôle du corps en se comportant comme une enfant de 3 ans, ce qui était bien entendu inapproprié dans une salle de classe. La fillette de 10 ans se retrouvait donc dans le bureau du directeur de l'école sans avoir aucune idée de ce qu'il s'était passé." ⁶⁶

    Bien entendu, la réponse systématique face à un tel comportement chez un enfant sera de dire qu'il s'agit de caprices, d'une régression volontaire de l'enfant "qui fait son bébé". Mais le trouble dissociatif et l'amnésie dissociative éclairent d'un tout autre point de vue ce genre de comportements "capricieux". Bien entendu, les enfants font des caprices et agissent parfois d'une manière non appropriée pour leur âge, mais certains critères permettent de déterminer s'il s'agit d'un trouble dissociatif, comme dans ce cas où la petite fille ne semble pas se souvenir de son comportement de bébé…

    De nombreux patients ont déclaré que leurs personnalités alter étaient nées pendant leur enfance. Malheureusement chez les enfants, les troubles dissociatifs sont généralement non diagnostiqués pour plusieurs raisons :

    - Les enfants atteints d'un T.D.I. présentent habituellement des signes et des symptômes secondaires du trouble. Ils auront fréquemment un déficit de l'attention, une hyperactivité, des troubles du comportement, une forte anxiété, de la dépression, de la somatisation, un stress post-traumatique, une dissociation et des symptômes pouvant sembler de nature psychotique. Les vomissements et les nausées, les maux de tête et les évanouissements sont les somatisations les plus fréquentes chez un enfant. Les états de transe ou les symptômes de conversion (paralysie dissociative), qui sont courant chez les patients adultes, sont plus rares chez les enfants. Les voix intérieures que l'enfant peut entendre peuvent être à tort diagnostiquées comme une "schizophrénie".
    En raison du fait que la dissociation et les états pouvant y ressembler sont des phénomènes plus courant chez les enfants sains que chez les adultes sains, ces symptômes dissociatifs pourront être ignorés et interprétés à tort comme un comportement normal de l’enfant.
    Les abus intrafamiliaux, un environnement familial chaotique et les troubles psychiatriques des membres de sa famille ne vont pas seulement compliquer le diagnostic mais vont également empêcher un bon suivi de l'enfant.
    Mais par dessus tout, la plus importante cause d'erreur de diagnostic est la formation insuffisante des cliniciens et leur manque d'expérience avec le T.D.I.. L’incrédulité sur la légitimité de ce diagnostic de trouble de la personnalité multiple va faire qu'ils ne cherchent aucunement à détecter sa présence.⁶⁷
    Chez l'enfant, les amnésies, les alternances de comportements totalement différents et les hallucinations (généralement auditives) sont les symptômes d'un trouble dissociatif. L'amnésie peut se manifester par des "trous" durant la journée, signifiant qu'une dissociation s'est produite à un moment donné. À l'adolescence, les symptômes commenceront à être plus marqués que chez l'enfant de moins de 11 ans, les adolescents seront donc plus facilement diagnostiqués avec un T.D.I..

    Tout enfant ayant un passé lié à des abus physiques ou sexuels devrait recevoir une évaluation pour détecter la présence d'un trouble dissociatif.

    Lorsque les abus ont commencé dans la petite enfance, qu'ils ont été récurrents et sadiques, qu'ils impliquaient des pratiques rituelles et que les parents ont eux-mêmes de sévères troubles psychiques, une observation prolongée de l'enfant doit alors être faite, ainsi qu'un historique concernant toutes les rencontres que l'enfant a pu faire avec des adultes. Ce travail doit être accompagné par des séances d'entretiens attentionnés pour établir un diagnostic précis. Les enfants dont les parents souffrent eux-mêmes d'un trouble dissociatif doivent être particulièrement surveillés, de façon régulière. Plusieurs auteurs ont rapporté le lien qui existe entre les patients dissociés et leur famille dissociée. La majorité de ces parents dissociés ont eux-mêmes une histoire d'abus physiques ou sexuels remontant à leur petite enfance.⁶⁸ Un cercle vicieux qu'il faut bien comprendre, notamment en ce qui concerne les familles sataniques transgénérationnelles...

    Voici une liste des troubles comportementaux de l'enfant pouvant être éventuellement liés à un T.D.I. :
    Dépression intermittente - État de transe ou auto-hypnotique - Fluctuation dans les capacités intellectuelles et les humeurs, rapides régressions - Amnésies - Hallucinations auditives (particulièrement avec des voix intérieures) - Compagnons imaginaires récurrents - Parle tout seul - Somnambulisme - Terreurs nocturnes - Paralysies soudaines - Symptômes hystériques - Se réfère à lui-même à la troisième personne - Répond à un autre nom, ou utilise un autre nom - Changements importants dans la personnalité et le comportement - Oubli ou confusion à propos de choses élémentaires et basiques - Travail scolaire fluctuant d'un opposé à l'autre - Comportement hyper-destructeur - Automutilation - Violence contre autrui - Paroles ou comportements suicidaires - Comportement sexuel inapproprié - Isolement social, comportement anti-social.⁶⁹

     

    b/ Le cas d'une enfant de trois ans

    En septembre 1988, le journal "Dissociation" de l'International Society for the Trauma and Dissociation (ISSTD) a publié un article décrivant le cas d'une petite fille montrant une dissociation de la personnalité causée par des traumas répétitifs. Les auteurs de cet article intitulé "The development of symptoms of multiple personality disorder in a child of three" (le développement de symptômes du trouble de la personnalité multiple chez une enfant de 3 ans) sont le Dr. Richard Riley, qui a travaillé pour l'armée U.S. dans le programme EFMP (Exceptional Family Member Program) en Belgique, et le Dr. John Mead, un praticien privé de Pasadena en Californie.

    L'enfant a été suivie dès l'âge de 14 mois, elle a souffert de multiples traumas répétitifs qui ont développé chez elle un état dissociatif.

    La progression de son trouble dissociatif a été enregistrée sur bande vidéo lors d'un suivi ordonné juridiquement.

    Cindy (pseudonyme) a d'abord été suivie par le Dr. Riley à l'âge de 14 mois. Il avait été décidé qu'elle devait être examinée pour une évaluation suite à un conflit entre la famille d'accueil, Joan et David (pseudonymes) et la mère biologique Diane (pseudonyme). Cindy avait été remise à la garde de la famille d'accueil dès le deuxième jour après sa naissance. Elle n'avait eu un contact que très limité avec sa mère biologique entre l'âge de 3 mois et 4 mois et demi, mais n'en avait plus eu depuis.

    Lors de la première séance d'évaluation, Cindy a montré une attitude très positive. Elle était curieuse et explorait le bureau, visiblement joyeuse et confiante. Elle est apparue comme une enfant recevant beaucoup d'amour et d'affection, il apparaissait clairement un fort attachement entre elle et sa famille d'accueil. Elle était également capable de laisser le couple quitter la pièce sans montrer d'anxiété.

    Lorsque Cindy a été revue en clinique à l'âge de 16 mois, sa mère biologique venait la visiter quelques heures deux fois par semaine chez la famille d'accueil. Il a alors été rapporté que Cindy dormait mal, que son appétit s'était détérioré et qu'elle avait des crises de colère. Contrairement à la rencontre précédente, elle était agitée, elle s'accrochait à sa mère d'accueil et devenait très anxieuse quand celle-ci quittait la pièce pour la laisser seule avec le docteur. Toutes ces constatations ont été rapportées au juge, cependant la garde de l'enfant a été confiée à la mère biologique avec un droit de visite graduel des parents d'accueil pour que Cindy puisse s'adapter au changement. Cependant, la mère biologique respectait ce calendrier de visite de manière très sporadique et il a été appris trop tard que pendant cette période, elle avait donné naissance à une autre petite fille, décédée d'une mort subite du nourrisson à l'âge de 3 mois.
    À l'âge de 20 mois, Cindy est retournée en visite clinique, accompagnée de Diane, la mère biologique et de Joan, la mère d'accueil. Cindy avait accepté la compagnie de tout le monde et elle semblait à l'aise dans cette situation. À l'âge de 23 mois, lors d'une autre visite en compagnie de sa mère d'accueil, Cindy était très effrayée et restait accrochée à cette dernière. Les mois qui suivirent, son état émotionnel s'est totalement dégradé, elle insistait pour qu'on la prenne dans les bras et elle pleurait si elle n'était pas en contact physique avec sa mère d'accueil. Elle avait des problèmes de santé récurrents et elle est arrivée une fois en visite avec un hématome sur son lobe d'oreille. Elle a alors avoué que sa mère biologique l'avait frappé. Elle a aussi déclaré qu'elle était appelée "Lila" par les membres de sa famille biologique. Elle a plusieurs fois fait comprendre que son demi-frère touchait ses parties génitales et qu'il insérait des objets dans son vagin. Elle a régulièrement rapporté subir des abus physiques et sexuels.

    Suite à ces déclarations, une décision a été prise pour que la garde dans la famille biologique ne se limite plus que durant la journée, Cindy avait alors 2 ans et demi. Son état s'est alors amélioré et son anxiété a diminué, mais elle était encore très colérique et continuait à rester accrochée à sa mère d'accueil. Elle voulait même dormir avec elle et se réveillait plusieurs fois par nuit pour vérifier qu'elle était bien là. Joan a rapporté que la petite parlait durant son sommeil en répétant de façon répétitive "mon nom est Cindy R." (le nom de la famille d'accueil). Cindy a continué à parler d'abus physiques et sexuels perpétrés durant les visites de jour dans sa famille biologique et elle commença à reproduire ces abus sur sa soeur d'adoption, la fille biologique de David et Joan… Un autre médecin expert a alors été désigné pour examiner l'enfant dans l'environnement de sa famille biologique. Il a rapporté que Cindy était "joyeuse et extravertie et qu'elle n'avait aucun comportement anormal ou inhabituel." Durant cette période, la mère d'accueil a rendu une visite inattendue à Cindy dans sa famille biologique et la petite n'a pas semblé la reconnaître ou a fait comme si elle ne la connaissait pas…

    La première séance filmée s'est passée lorsque Cindy avait 3 ans. Trois séances avaient été fixées pour déterminer l'état des relations entre Cindy, sa mère biologique et sa famille d'accueil, mais aussi pour enregistrer toutes les déclarations d'abus sur bande vidéo. Elle a réitéré spontanément son témoignage à propos des abus sexuels perpétrés par ses frères ainsi que le fait que sa famille biologique l'appelait systématiquement "Lila" au lieu d'employer son véritable prénom. À un moment donné lors d'une séance, elle a réagi lorsque le mot Lila était mentionné en disant "Quoi ?", comme si c'était elle que l'on appelait. Elle niait ses visites dans sa famille biologique, tout en parlant d'eux d'une manière directe. Elle a également rapporté que sa mère biologique l'appelait "petite chienne". Lorsqu'elle parlait des membres de cette famille biologique, sa façon d'en parler et son comportement devenaient totalement différents. Son langage devenait immature, les postures de son corps et ses manières étaient comme celles d'une poupée. Cette série d'enregistrements vidéo a été apportée comme preuve de maltraitance devant le jury. Suite à cela, la durée des gardes chez la famille biologique a encore été diminuée.

    Trois mois plus tard, la mère biologique a fait une demande par son avocat pour qu'une séance avec sa fille soit filmée avec elle : la personnalité alter Lila se présenta d'elle même directement lors de cette séance avec la mère biologique. Il y eu ensuite cinq séances dont quatre ont été enregistrées. Durant la première, Cindy était prête à répondre à toutes les questions sur la famille d'accueil sans hésitation. Elle donnait des réponses affectives et émotives à propos de la mort du grand-père paternel de la famille d'accueil, tandis que les questions sur la famille biologique étaient généralement ignorées ou avaient pour seule réponse : "Je ne sais pas". Lorsqu'il lui a été annoncé qu'elle reviendrait le lendemain pour une autre séance, elle acquiesça ; mais lorsqu'il a été rajouté qu'elle viendrait en compagnie de sa mère biologique, elle est d'abord restée silencieuse, ensuite elle a répondu négativement et elle a fini par nier que l'on venait de lui avoir dit qu'elle devait faire une séance le lendemain avec sa mère biologique.

    Suite à cela, l'enfant se présentait alternativement avec l'une des deux personnalités distinctes, cela dépendait des questions qui lui étaient posées. Ces personnalités étaient celles de Cindy ou de Lila. Lila disait qu'elle voulait qu'on l'appelle ainsi, de plus elle ne répondait pas aux questions concernant la famille d'accueil ou bien elle répondait qu'elle ne savait pas. Parfois, elle se cachait derrière la maison de poupées ou la chaise, hors de la vue de sa mère biologique, et Cindy pouvait alors émerger. À la fin d'une séance, la petite a voulu rester pour ranger le désordre qu'elle avait mis dans la pièce, ce qui était totalement étranger au caractère de Cindy. Durant les trois séances suivantes, Cindy et Lila apparaissaient alternativement : avec la présence de la mère biologique, Lila était la personnalité active, mais Cindy pouvait parfois émerger pour jouer de façon agressive tout en critiquant Lila pour son comportement. Lila pouvait répondre à certaines questions sur la famille d'accueil mais elle avait une connaissance très limitée sur cette famille. Elle identifiait Joan R., la mère d'accueil, comme la "baby-sitter".
    En plus de ce décalage de mémoire dans son histoire personnelle, Lila semblait psychologiquement plus jeune et ses connaissances générales étaient plus limitées que celles de Cindy. Lorsque Lila faisait une faute, Cindy pouvait émerger pour la corriger. Lila avait également des comportements sexués inappropriés dans certains jeux. Son langage était moins développé que celui de Cindy et phonétiquement plus immature. Un point important à souligner est que Lila ne semblait pas connaître Cindy, tandis que Cindy était consciente de Lila, elle se souvenait des moindres petites choses que celle-ci avait faites. Elle ne l'aimait pas et elle n'aimait personne de sa famille biologique. Cindy était sûre d'elle et dominante lorsqu'elle n'était pas menacée. Elle montrait aussi de la culpabilité et des remords lorsque son comportement avait heurté quelqu'un.

    Les enregistrements vidéo des séances ont été apportés comme preuves mais n'ont jamais été exploités. La justice a expliqué que du fait que tous les experts n'étaient pas d'accord dans leurs conclusions et recommandations, la Cour n'avait pas besoin de ces enregistrements. Par contre, toutes les gardes et les visites avec la mère biologique furent stoppées, et un suivi en psychothérapie a été mis en place pour la petite fille. Douze séances ont été programmées sur une période de quatre mois. Sa mère d'accueil était systématiquement présente et sa soeur d'adoption, Cheri, fut présente lors de trois séances. Lors de la première séance, Cindy montrait de la colère contre ses agresseurs et a été encouragée à l'exprimer dans ses jeux. C'est alors qu'elle laissa sortir la peur de sa mère biologique.

    L'alter Lila a émergé par intermittence durant cette séance et quelques autres par la suite. Alors que les séances progressaient, Cindy s'est mise à appeler sa soeur d'adoption par le nom de l'alter Lila. Elle lui faisait des demandes ou lui donnait des ordres en employant le même ton sévère que sa mère biologique. Petit à petit, Cindy a commencé à monter de l’affection envers l'alter et à vouloir que Lila vive avec elle dans la famille d'accueil. Elle laissa alors plus librement l'alter prendre part aux jeux. Les deux personnalités commencèrent aussi à donner des informations sur la famille biologique sans montrer d'anxiété. Un jour Cindy a déclaré qu'elle était plus vieille que Lila, elle a aussi étrangement identifié sa mère d'accueil comme la "maman de Lila". Durant une autre séance, Cindy a répondu positivement à l'idée qu'elle et Lila puissent se regrouper ensemble. Suite à cela, elle semblait aller beaucoup mieux et elle a commencé à aller à l'école. Lors d'une des dernières séances, elle a expliqué qu'elle et sa soeur étaient toutes les deux Lila, mais qu'une des deux avait grandi plus vite.


    Le cas de la petite Cindy montrait donc deux critères reliés au T.D.I. :

    - Présence de deux identités ou états de personnalité, chacune avec son propre mode de perception, de relation avec autrui et de pensée, autant sur l'environnement que sur soi.
    - Au moins deux de ces identités ou états de personnalité prennent le contrôle du comportement de la personne, de manière récurrente.

    Cindy et Lila sont toutes les deux des personnalités complexes, chacune ayant ses propres mémoires, son propre comportement avec des relations sociales différentes. Cindy a déclaré qu'elle était plus âgée mais aussi « plus grosse » que Lila. Elle se référait à Lila comme quelqu'un de séparé d'elle et vivant ailleurs. Lila était plus immature que Cindy, autant dans son langage que dans ses manières. Son niveau de connaissances générales était inférieur à celui de Cindy. L'alter Lila semblait également plus dépendant et soumis tandis que la personnalité de Cindy était agressive, pleine d'assurance et entreprenante : elle blâmait Lila pour des choses qu'elle avait dites ou faites. Pour Cindy, Joan était sa mère alors que pour Lila, c'était simplement sa baby-sitter. Cindy connaissait Lila alors que Lila ne semblait pas connaître Cindy. Les deux personnalités montraient des amnésies. L'enfant pouvait changer de personnalité simplement en se déplaçant ou en changeant son corps de position : les transitions (switch) étaient très rapides.

    Le cas de la petite Cindy répond à cinq symptômes du T.D.I. listés par le Dr. Fagan et le Dr. McMahon dans leur article cité plus haut :

    1- Elle montrait parfois un comportement hébété ou semblable à un état de transe.
    2- Elle répondait à plus d'un nom.
    3- Elle montrait des changements de comportement très marqués.
    4- Elle avait des pertes de mémoire concernant des événements récents.
    5- Elle montrait une variation dans ses connaissances et dans ses compétences.


    Les auteurs de l'article concluent :

    Que serait-il arrivé à cette enfant si elle n'avait pas été retirée de sa famille biologique ? Probablement qu'elle aurait continué à développer et à renforcer son trouble de la personnalité avec cet alter Lila lui permettant de pouvoir gérer les circonstances de vie traumatiques. ⁷⁰

     

    c/ Le cas d'une enfant de sept ans

    La psychologue Wanda Karriker a rapporté le cas d'une fillette de 7 ans, qu'elle nomme Katie (pseudonyme). Ses parents la lui avaient amenée pour une évaluation psychologique suite aux conseils de son enseignante car elle se comportait bizarrement à l'école. Elle avait des résultats extrêmement variables et il arrivait qu'elle suce son pouce tout en ayant un comportement de bébé. Parfois, elle semblait être comme enfermée dans son propre monde. Lors de l'entretien avec les parents, la mère a déclaré : "C'est comme si elle avait deux extrêmes, parfois elle est totalement passive et parfois elle devient violente, elle est d'une humeur massacrante."
    Suite à une séance d'évaluation de son Q.I., la petite Katie a regardé le tableau effaçable en demandant si elle pouvait y dessiner quelque chose, ce à quoi la psychologue répondit évidemment par l'affirmative. La petite demanda alors "Dites moi quoi dessiner ?, Pourquoi pas une image de ta famille ?" rétorqua Karriker. Katie s'est alors mise à dessiner trois figures fantomatiques sur le tableau en les sous-titrant "papa", "maman" et … « Lucy ».

    Elle représentait dans sa famille un enfant nommé Lucy, mais sans se représenter elle-même en tant que Katie… "Vous savez quoi ?" dit-elle en regardant sous sa chemise, "Je peux appuyer sur mon nombril pour faire sortir Lucy". La psychologue demanda alors si cette Lucy lui ressemblait et la petite fille répondit : "Elle est mignonne, elle a des cheveux courts et blonds avec des yeux bleus". (Katie avait de longs cheveux bruns avec des yeux sombres). La petite a continué : "Vous savez quoi ? Elle me donne toujours les réponses en mathématiques." Suite à cela la psychologue lui a demandé si elle pouvait parler directement avec Lucy et encore une fois, Katie a regardé sous sa chemise en appuyant sur son nombril et en disant : "Lucy, viens ici !". C'est alors que son expression faciale s'est transformée en une enfant beaucoup plus mature, avec un changement de langage corporel évident. Elle s'est présentée en disant :

    "Salut, je suis Lucie". La psychologue demanda alors où se trouvait Katie à présent, ce à quoi la petite fille répondit "Là-haut", tout en pointant du doigt un coin du plafond… "Tu ne peux pas la voir là-haut ?" dit-elle. L'enfant semblait vivre une dépersonnalisation, un phénomène dans lequel une personne se sent détachée de son corps…

    Lorsque la petite a vu la caméra dans le bureau de la thérapeute, elle a tout de suite commencé à danser et à chanter, puis tout à coup elle s'est jetée au sol en donnant des coups de pieds en l'air et en gémissant : "Non, non ! Ne me fait pas ça", tout en mettant ses mains sur sa bouche et en se roulant en position foetale. C'est suite à cela que Wanda Karriker a sérieusement commencé a se questionner sur les mauvais traitements qu'aurait pu subir la petite Katie au point de développer ces profonds troubles dissociatifs. Des troubles que son enseignante décrivait comme un retrait dans son propre monde.

    Lorsque Wanda Karriker a donné ses conclusions aux parents, elle leur a spécifié le changement de comportement entre Katie et Lucie, un changement radical qui avait été filmé. La psychologue a déclaré aux parents : "Je ne dois pas faire un diagnostic formel, mais je crois que votre fille a créé au moins un ami imaginaire, si ce n'est peut-être une personnalité alter, afin de l'aider à faire face à quelque chose qu'elle n'a pas pu supporter." La psychologue a expliqué aux parents dubitatifs qu'elle n'avait elle-même jamais observé un trouble de la personnalité multiple chez un enfant avant cela. Elle leur a expliqué que lorsqu'un enfant est confronté à un traumatisme insupportable, il peut inconsciemment créer différents "états d'esprits" afin de l'aider à surmonter mentalement et émotionnellement la douleur. Suite à cet entretien avec les parents et aux explications concernant la question des traumatismes, la psychologue n'a jamais plus revue la petite Katie pour pouvoir lui dire en revoir…

    Quelques semaines plus tard, la mère de Katie a rappelé la psychologue Karriker pour lui dire qu'une MST (Maladie Sexuellement Transmissible) lui avait été diagnostiquée et que le pédiatre avait recommandé un psychiatre pour la petite. Peu de temps après, Wanda Karriker a été contactée par l'avocat du père de Katie, l'informant qu'elle recevrait bientôt une citation à comparaître... En effet, la petite venait de confier au psychiatre que son père lui avait faire des mauvaises choses… des abus sexuels qui ont donc été signalés aux services sociaux.

    Lors de sa déposition en présence des avocats de la défense, la psychologue Wanda Karriker a déclaré que l'enfant n'avait jamais verbalisé les abus devant elle, mais qu'elle avait été écartée de la thérapie dès lors qu'elle a suggéré la possibilité qu'un traumatisme aurait pu induire les comportements dissociatifs de la petite fille… Wanda Karriker n'a pu connaître les suites de l'affaire que par le biais des avocats, mais il semblerait que les accusations d'abus sexuels ont bien été confirmées. La petite Katie a été retirée à ses parents et a été mise sous la garde des services sociaux.

    Par la suite, un thérapeute a contacté Karriker afin d'obtenir les copies des différents tests psychologiques qu'elle avait pu faire à l'époque avec la petite Katie ; ce thérapeute lui a écrit :

    "Katie est une énigme. Nous n'arrivons pas à faire beaucoup de progrès avec elle. Elle se retrouve toujours dans des conflits, mais ensuite elle nie avoir fait quelque chose de mal. Parfois elle se comporte comme un bébé, elle a beaucoup de crises colériques tandis qu'elle peut être parfois totalement passive, ne répondant à rien. Par exemple la manière dont elle refuse de voir sa mère ou son père lorsqu'ils viennent pour des visites supervisées. »
    Wanda Karriker n'a alors pas pu s'empêcher de demander à ce thérapeute si la petite avait été traitée pour ses profonds troubles dissociatifs… Ce à quoi le thérapeute lui a répondu : "Mais Dr. Karriker, cette petite ne montre aucuns symptômes de personnalité multiple"…

    Par la suite, en se remémorant le degré de dissociation de la petite Katie, ainsi que la façon dont elle se comportait lorsqu'une caméra tournait dans le cabinet, Wanda Karriker a réalisé que si elle avait pu travailler plus longtemps avec elle, la petite lui aurait certainement révélé plus de choses sur les abus. Son comportement face à une caméra a laissé penser à la psychologue que ses parents l'utilisaient pour produire de la pédo-pornographie et Dieu sait quelles autres horreurs…⁷¹

    Le cas de cette petite fille illustre certaines pratiques dénoncées dans le chapitre 3 du livre MK. C'est à dire tous ces enfants dissociés et fractionnés par les abus intrafamiliaux, des enfants retirés à leur famille pour être placés et qui deviennent potentiellement des cibles et des proies pour les réseaux pédocriminels et les programmes de contrôle mental. Dans le cas rapporté ici par le Dr. Wanda Karriker, nous avons donc une petite fille visiblement fractionnée par des traumas qui se retrouve séparée de ses parents ; et il est intéressant de noter que le psychiatre chargé de s'occuper de la petite Katie une fois qu'elle a été placée, déclare qu'elle ne montre absolument aucun symptôme de personnalité multiple… En d'autres termes, il maintient fermé la boîte de Pandore en niant fermement les troubles dissociatifs de la petite fille, ou alors il n'est aucunement formé sur la question…


    d/ le cas d'un enfant de huit ans

    Le livre intitulé "Childhood Antecedents of Multiple Personality", publié par le Dr. Richard Kluft rapporte quelques cas d'enfants dont la personnalité est fractionnée. Il décrit notamment en détail le cas d'un jeune garçon de huit ans.

    Tom était un garçon qui souffrait d'un trouble de la personnalité multiple. Il a par la suite été découvert que sa grand-mère avait également un T.D.I.... Un des alter de cette grand-mère a reconnu avoir abusé de la mère qui souffrait probablement elle aussi de sévères troubles dissociatifs. Nous sommes donc encore ici dans un contexte de T.D.I. transgénérationnel.

    Tom était habituellement un enfant sage et exemplaire, mais il pouvait brusquement devenir extrêmement difficile tout en niant tout mauvais comportement qu'il aurait pu avoir, même si cela venait de se produire quelques instants plus tôt. Il niait totalement sa participation à des actes dont pourtant toute sa famille venait d’être témoin. Sa voix, son langage verbal et corporel, ainsi que ses amitiés, variaient avec ce qui semblait être ses « humeurs »...
    Parfois, il disait même être une fille et il se comportait alors d'une manière efféminée. Suite à ces épisodes il admettait d'une manière très embarrassée qu'il pensait être effectivement une fille, mais que cependant il n'avait aucun souvenir de s'être comporté de la sorte...
    Il avait une prédisposition pour les accidents mais ne semblait en retirer aucune leçon. Ses résultats scolaires étaient extrêmement erratiques. Souvent il a été constaté par ses professeurs qu'il n'avait pas compris certains sujets et lorsqu'on l'interrogeait, il affirmait qu'on ne lui avait jamais enseigné ces choses là... Ses professeurs ont donc conclu qu'il était lent d'esprit et qu'il avait simplement des difficultés d'apprentissage.

    Tom disait aussi fréquemment que certains vêtements de son armoire n'étaient pas les siens et il devenait confus lorsque sa mère essayait de lui rappeler le moment où ils les avaient acheté ensemble. L'enfant était souvent déprimé, particulièrement lorsqu'il se faisait traiter de menteur, notamment lorsqu'il était confronté à des actes auxquels il venait juste de nier avoir participé.

    L'enfant était parfaitement conscient de ses efforts pour couvrir ses trous de mémoires récurrents car il savait bien qu'il était souvent "dans la lune ».

    Tom a avoué qu'il entendait des voix dans sa tête, à la fois des voix de filles et de garçons.
    Durant l'entretien avec le thérapeute, plusieurs types de comportements ont été notés, ainsi que des changements dans sa voix. De plus il est apparu des amnésies flagrantes concernant le contenu de l'entretien. Son thérapeute a utilisé l'hypnose pour explorer la personnalité de Tom. Le thérapeute a rapporté que dès que Tom s'est retrouvé en transe hypnotique, une personnalité avec une voix profonde a spontanément émergé. Cet alter disait s'appeler "Marvin" et qu'il était un astronaute. Marvin indiqua au thérapeute que Tom avait besoin d'aide car il "voulait être une fille", cet alter donna également quelques conseils par écrit au thérapeute. Suite à cette séance d'hypnose, Tom était totalement amnésique de cette conversation entre Marvin et le thérapeute. Il a également été constaté que les écritures de Tom et de Marvin étaient totalement différentes. C'est en tout cinq personnalités alter qui ont été découvertes chez cet enfant. Tom était dépressif et plutôt faible, ce qui est classique pour la personnalité "hôte". L'alter Marvin avait pour rôle de l'aider face à une colère et à une peur inconcevable. Tom avait un autre alter du nom de Teddy, ainsi que deux personnalités de sexe féminin nommées Wilma et Betty. Leurs caractéristiques étaient celles d'une mère, tandis que Marvin et Teddy étaient plutôt une représentation du père avec un caractère rationnel et brutal.
    Il est apparu lors de la thérapie que le jeune patient s'était dissocié notamment lors d'une NDE (expérience aux frontières de la mort) à l'âge de deux ans et demi. Il était tombé dans un étang et s'y était presque noyé. Il avait été sorti de l'eau sans vie pour finalement « ressusciter ».⁷²

     

    e/ le cas d'un enfant de dix ans

    En 1998 est paru le livre "The Magic Castle" (le château magique), il s'agit du récit d'une maman qui a adopté le jeune Alex, un enfant multiple et hyper-violent. En 1984, à l'âge de 10 ans, Alex est venu vivre chez Carole et Sam Smith. Il avait alors dans ses bagages un dossier contenant beaucoup d'informations sur son passé. Alex avait vécu avec sa mère et son beau-père jusqu'à l'âge de 5 ans quand il a été confié à la garde de son père biologique en raison du fait que sa mère était alcoolique. Puis suite à de graves abus et négligences, Alex a été placé dans un foyer jusqu'à l'âge de 7 ans. Il a ensuite passé 3 ans dans une famille d'accueil avant d'arriver finalement chez Carole Smith. Lorsque Carole est allée le chercher pour la première fois, elle vit le jeune Alex assis sur la pelouse avec deux grands sacs poubelles contenant ses affaires posés à côté de lui. Elle a déclaré par la suite: "Je l'ai gardé deux semaines et cela a été les deux plus longues semaines de ma vie !".
    Les ennuis ont commencé pour Carole et Sam dès qu'Alex est arrivé chez eux. Il était constamment en colère et renfermé sur lui-même. De plus, il avait parfois les réactions d'un enfant de 2 ans. Son comportement était hors de contrôle et il a cassé des choses à plusieurs reprises. Carole craignait même de le sortir en public, "Les courses devenaient des missiles et le caddie du supermarché un tank destructeur" raconte-t-elle. Il n'a pas fallu longtemps à Carole pour se rendre compte des graves répercussions psychologiques des abus qu'il avait subi et qu'ils allaient en conséquence avoir besoin de beaucoup d'aide et de soutien. L'assistante sociale en charge de son dossier n'a pas beaucoup apporté d'aide, Carole et Sam se sont donc finalement adressés à des psychiatres et des travailleurs sociaux gouvernementaux pour obtenir de l'aide.
    Alors que Alex grandissait, ses problèmes s'amplifiaient, mais Carole a persévéré dans la prise en charge du garçon, qui était maintenant devenu un membre de sa famille. Les problèmes causés par Alex s'intensifiant, Carole a senti que ces troubles du comportement pouvaient avoir quelque chose d'encore plus profond. Un thérapeute a alors pensé qu'il pourrait peut-être y avoir chez lui plusieurs personnalités, Alex avait alors 14 ans. À cette époque il voyait un thérapeute qui utilisait l'hypnose comme forme de traitement. À la surprise de Carole, Alex a pu être hypnotisé, c'est à ce moment là que les autres personnalités ont commencé à se révéler. Les trois années qui suivirent ont été un chamboulement constant pour Carole et Sam. Ils ne savaient jamais quelle personnalité émergerait et ils en apprenaient de plus en plus sur les horreurs qu'avait subi Alex dans sa petite enfance. Grâce à la thérapie, Alex a appris à construire un "Château Magique" pour l'aider à gérer son fractionnement de personnalité. C'est en tout huit personnalités qui ont été découvertes, des personnalités qui se sont créées dans l'enfance pour l'aider à faire face au stress immense des abus répétitifs. Dans la conclusion du livre, Carole cite une déclaration de Alex : "Être multiple est un moyen de survie et non un signe d'aliénation mentale". Lors de l'écriture de ce livre, en 1998, Alex vivait toujours avec Carole et Sam, travaillant aux côtés de son père adoptif. (The Magic Castle: A Mother's Harrowing True Story Of Her Adoptive Son's Multiple Personalities - And The Triumph Of Healing - Carole Smith, 1998)
    f/ Rapport sur cinq cas

    Voici maintenant cinq cas qui ont été décrits dans le cadre d'un programme sur les troubles dissociatifs mis en place au département psychiatrique de l'Université d'Istanbul en Turquie. L'étude a été menée par le Dr. Salih Zoroglu. Les cas ont été rapportés en 1996 par le journal "Dissociation" dans un article intitulé "Dissociative disorder in childhood: five turkish cases".

    Hale:
    Hale était une fillette de dix ans qui avait des migraines et des nausées récurrentes. Elle était irritable et pleurait sans aucune raison apparente, elle se parlait à elle-même, elle riait de façon inappropriée, elle avait des états de transe et elle s'automutilait. Elle avait même un comportement de délinquante, elle se maquillait et s'habillait également de manière inappropriée. De plus elle avait des terreurs nocturnes et des hallucinations visuelles…

    Sa mère l'a tout d'abord amené consulter un "Hoca" (guérisseur traditionnel) qui a déclaré qu'elle était possédée par des djinns (les démons dans la tradition musulmane), mais cette consultation n'a pas amélioré son état psychique.
    Durant la première séance clinique, elle a raconté au thérapeute qu'elle entendait des voix dans sa tête depuis longtemps déjà. Une de ces voix était celle de "Cisem", une fille très gentille. Les autres voix étaient mauvaises, elles appartenaient à des "personnes" d'âges et de sexes différents. Ce sont ces voix qui la forçaient à faire de mauvaises choses et qui commentaient systématiquement son comportement. Au fur et à mesure que la thérapie avançait, ce sont onze personnalités alter qui se sont manifestées. Parmi elles, il y avait donc Cisem, une fille plus âgée qui voulait que Hale soit heureuse et se comporte bien. Cisem était effrayée par les autres alter qui pouvaient la punir lorsqu'elle voulait aider Hale. Le "Grand Patron" était un homme âgé qui était le chef du groupe des mauvais alter. Hale a confié que cet alter "Grand Patron" et ses acolytes pouvaient se connecter directement à ce qu'elle disait et à ce qu'elle faisait grâce à un ordinateur (interne). Ils pouvaient aussi utiliser cet ordinateur en mode observation et ainsi connaître tout ce qu'elle faisait dans les moindres détails.
    Hale se sentait donc parfois comme un robot lorsqu'elle était sous le contrôle de cet ordinateur.
    Il y avait en tout six personnalités alter qui étaient sous le contrôle du "Grand Patron". De plus, il y avait deux autres alter suicidaires complètement séparés des autres.
    Hale a été sévèrement battue pendant la petite enfance. Durant la thérapie, elle révéla que Cisem avait été violée par un homme du nom de Erhan. Celui-ci est ensuite devenu un des alter persécuteurs, un des assistants du "Grand Patron". Les souvenirs du viol sont remontés par des flashs, mais Hale n'acceptait pas le fait que c'était elle qui s'était faite violée et elle insistait en disant qu'elle était totalement séparée de Cisem. Finalement, après un long travail thérapeutique, toutes les personnalités alter ont été intégrées et tous les symptômes ont disparu.

    Mine:
    Cette fillette de neuf ans a été amenée dans l'unité psychiatrique pour enfant de la clinique où se trouvait déjà sa mère. Son père et son frère avaient remarqué que son comportement changeait de manière abrupte lorsque le père rentrait à la maison. Elle avait un comportement très lunatique et agressif. Elle pleurait souvent et agissait comme si elle voyait des visages dont elle semblait avoir peur et à qui elle parlait continuellement.
    Un jour, elle s'est rendue à la police en disant que deux hommes la suivaient. Ces deux hommes étaient en fait son père et son frère qu'elle ne reconnaissait plus... Elle a alors passé la nuit au poste de police (pour sa sécurité), et le lendemain matin, après avoir retrouvé son état normal, elle ne se rappelait plus rien de ce qui s'était passé la veille.

    La fillette a raconté à sa mère qu'elle avait une amie à l'intérieur d'elle. Une amie qu'elle pouvait voir et avec qui elle pouvait jouer, elle l'aidait aussi à garder à distance son père et les garçons de l'école. Mine entendait des voix dans sa tête, l'une d'entre elle était celle d'une fillette âgée d'un an de moins qu'elle. Cet alter a émergé lors d'une séance de thérapie en se nommant "Ayse". Cette personnalité alter a déclaré qu'elle était avec Mine depuis trois ans et qu'elle était en bon terme avec elle. Lorsqu'il lui a été demandé où était Mine à cet instant, elle a répondu qu'elle ne savait pas tout en continuant de jouer avec un puzzle. Plus tard, lorsque Mine est "revenue", elle a regardé le puzzle à moitié reconstitué par Ayse mais sans avoir aucune notion du temps qu'il s'était passé ni ce qu'avait bien pu faire Ayse pendant ce temps là. Plus tard, une autre personnalité alter du sexe opposé a été identifiée. Il a été rapporté que son père était un alcoolique chronique qui battait sa femme et ses enfants. Dans le cas de Mine, la thérapie était malheureusement très aléatoire car elle se faisait en fonction des hospitalisations de sa mère.

    Mehmet:
    La famille de Mehmet avait régulièrement constaté que son comportement changeait radicalement. Ce garçon de 11 ans se mettait parfois à lire et à écrire d'une manière totalement immature pour son âge : il n'arrivait plus à prononcer la lettre « R » et il ne connaissait même plus son nom ni son âge. La seule chose dont il se rappelait était de ses parents. Dans ces moments-là, il devenait comme un petit enfant introverti, s’amusant avec des jouets inappropriés pour son âge. De plus il n'avait plus aucune notion du temps lors de ses "crises".
    Mehmet a été suivi en thérapie une fois par semaine pendant deux mois. Lors de la quatrième séance, il est arrivé avec sa personnalité prémorbide, il ne reconnaissait alors plus sa thérapeute et ne semblait plus se rappeler des séances précédentes. Cette personnalité était celle d'un garçon amical avec un comportement et un discours très mature pour son âge. Il s'intéressait particulièrement aux sciences. Il était totalement amnésique des périodes pendant lesquelles il agissait comme un très jeune enfant.

    Ses parents ont rapporté que les changements de personnalités avaient commencé trois mois plus tôt. Chaque personnalité émergeait pendant trois ou quatre jours, ensuite il ne se rappelait de rien du tout lorsqu'un autre alter avait pris le relais. Mehmet avait parfois une paralysie d'un bras qui durait de dix à trente minutes suite à quoi il a été hospitalisé quatre fois dans différents hôpitaux, y compris deux cliniques universitaires. Des examens complets (neurologiques, crâniens, électroencéphalogramme) n'ont rien montré d'anormal, les paralysies du bras ont été diagnostiquées comme un trouble dissociatif de conversion. La prescritption d'anti-psychotiques, d'antidépresseurs, de tranquillisants et d'anti-épileptiques ne l'ont aucunement aidé, au contraire, ces médicaments ont provoqué chez lui un comportement violent.
    Au cours de son suivi thérapeutique, deux autres personnalités alter ont été observées. L'une avec laquelle il perdait sa capacité à marcher et à parler : il s'agissait clairement d'un alter au stade de bébé, sa voix et ses expressions en attestaient. Dans l'autre personnalité alter, il s'écriait "Je suis fou, je suis fou !" et il ne reconnaissait strictement plus personne.

    Dans son cas, aucun traumatisme psychique ni physique n'a été révélé. Sa soeur ainée a également affirmé qu'il n'y avait eu aucun abus ni aucune négligence dans la famille. Aucune des personnalités alter de Mehmet n'avait des hallucinations visuelles ou auditives, ni aucune manifestation de ce type par laquelle un alter pourrait communiquer. Le garçon pouvait facilement être hypnotisé mais les personnalités alter n'émergeaient pas par cette méthode. Les changements arrivaient plutôt spontanément et Mehmet restait totalement amnésique de ces "crises". La famille a fini pas stopper la thérapie et elle a rapporté un an plus tard que les troubles dissociatifs auraient cessé et que Mehmet avait retrouvé un bon niveau de maturité.

    Emre:
    Emre était un petit garçon de cinq ans lorsqu'il a été hospitalisé dans une clinique à la demande de sa mère. Le garçon avait de brusques comportements agressifs durant lesquels il cassait des objets, il attaquait ses amis, des étrangers et même sa mère. Il avait aussi de courtes périodes où il était en état de transe, de plus il entendait des voix, avait d'horribles visions et de nombreux symptômes somatiques comme des migraines et des nausées. Parfois il semblait se parler à lui-même, riant et discutant pendant des heures avec on ne sait qui… Son comportement était complètement polarisé et il avait des attitudes sexualisées inappropriées pour son âge.
    Il a confié qu'il entendait les voix de quatre filles et de six garçons dans sa tête, tous âgés entre quatre et douze ans. Il pouvait les voir, jouer avec eux et discuter avec lorsqu'il était tout seul. Une des filles, "Gamze la sorcière" avait un pistolet avec lequel elle effrayait Emre et les autres enfants. Parfois elle frappait Emre et cassait ses jouets, ou encore elle s'amusait à l'effrayer pendant la nuit. Lors de la troisième séance de thérapie, Emre déclara qu'une fille de douze ans nommée "Cunyet" voulait parler aux personnes présentes. C'est ainsi que l'alter Cunyet se présenta : elle était l'aînée et c'est elle qui protégeait Emre et les autres enfants de la sorcière Gamze, l'alter persécuteur. Lorsque le thérapeute a demandé où était Emre, Cunyet a désigné une chaise vide en disant qu'il était assis là à les écouter. Bien qu'il ait été rapporté par ses parents que l'enfant était souvent amnésique, il n'a pas été constaté une amnésie entre ces deux personnalités alter lors de la thérapie. Aucun passé traumatique n'a été rapporté dans le cas de ce garçon.

    Nilgun:
    Cette petite fille de 10 ans a un jour été amenée en thérapie par son père. Ses symptômes étaient un ennui récurrent, de la tristesse, des pleurs sans aucune raison apparente, une perte d'appétit, des états de transe, de sévères migraines, des évanouissements, des nausées, des douleurs d'estomac et des crises de colères extrêmes.
    Nilgun a été diagnostiquée comme souffrant d'une dépression par deux psychiatres. Durant le premier entretien, la fillette a déclaré qu'il y avait une fille plus âgée à l'intérieur d'elle qui s'appelait "Fatma". Elle a confié qu'elle entendait sa voix presque tous les jours depuis plus de deux mois. Cette voix la réconfortait et l'encourageait, elle commentait aussi ses comportements, ses sentiments et ses pensées. Elle mettait aussi en garde Nilgun de ne jamais parler de cela à personne y compris au thérapeute. Au début l'alter Fatma refusait de parler au thérapeute, puis il a commencé à communiquer par le biais de Nilgun, pour finir par émerger totalement : Fatma a alors déclaré au thérapeute qu'elle avait dû "aller" dans Nilgun suite à un événement désastreux qu'elle seule connaît, ceci afin d'aider la fillette.

    Elle a raconté qu'elle n'avait pas les mêmes parents que Nilgun et qu'elle avait pris le contrôle plusieurs fois pour l'aider mais que Nilgun ne savait pas ce qu'elle faisait parce qu'elle ne la voyait pas. Elle a aussi déclaré qu'elle ne savait pas tout ce que faisait Nilgun...

    Lorsque l'alter Fatma émergeait, les mimiques de Nilgun, sa façon de parler et sa manière de se comporter avec les gens se transformait totalement. Elle semblait très sérieuse et elle donnait des réponses concises et précises. Lors des séances, Nilgun aimait s'amuser avec des jouets ou avec des puzzles, mais Fatma ne s'y intéressait pas du tout. Elle disait qu'elle était trop vieille pour jouer de cette manière. Elle affirmait aussi que Nilgun était à l'intérieur d'elle. Alors que Nilgun était une petite fille blonde aux yeux bleus, Fatma se décrivait comme ayant les yeux et les cheveux marrons. Nilgun était amnésique concernant les périodes de temps où Fatma prenait le contrôle. Aucune expérience traumatique passée n'a été découverte dans le cas de cette petite fille. ⁷³

     

    6 - Le T.D.I. dans les médias

    a/ Les documentaires

    Durant les années 90, la chaîne de télévision australienne Seven Network a consacré un documentaires au phénomène des personnalités multiples dans sa série "The Extraordinary".
    En 1993, le chaîne américaine HBO a diffusé "Multiple Personalities: The Search for Deadly Memories" (Personnalité multiple: à la recherche des mémoires refoulées), un documentaire entièrement consacré au T.D.I..
    En 1999 est sorti un documentaire francophone dans la série "Phénomènes inexpliqués" intitulé "Dédoublement de la personnalité" (réalisé à l'origine par Gloria Sykes et produit par A&E Television Network). Il semblerait que ce soit le seul documentaire en français sur le sujet.
    En 1999, un documentaire intitulé 'Mistaken Identity' (Erreur d'identité) a été diffusé sur la chaîne anglaise BBC2 (dans la série d'émissions "Horizon"), il donne la parole à plusieurs patients souffrant d'un T.D.I. ainsi qu'à des thérapeutes.
    En 2004, un reportage intitulé "The Woman With Seven Personalities" (la femme avec sept personnalités), nous montre le Dr. Ruth Selwyn accompagnant Helen, une femme qui a développé plusieurs personnalités à la suite d'abus rituels comprenant des violences sexuelles.
    En 2010, le documentaire intitulé "When The Devil Knocks" (Lorsque le diable frappe à la porte) et a été produit par Bountiful Films (Canada). Il raconte l'histoire de Hilary Stanton, une femme diagnostiquée avec un T.D.I. et suivie par la thérapeute Cheryl Malmo.
    En 2019, le média « 60 Minutes Australia » a diffusé un reportage sur le cas de la multiple Jennifer Haynes. Pour la première fois, une femme dissociée et fractionnée (diagnostiquée TDI) par les violences et tortures de son géniteur, réussi à accéder au statut de victime entendue, reconnue et trouvant finalement justice devant un tribunal : lorsque son père finira par plaider coupable. Ce type de dossier est habituellement très vite refermé car la victime est abusivement considérée comme non crédible en raison de son état psychique, il est alors habituel d'évoquer la théorie des faux souvenirs induits pour décrédibiliser sa parole. L'affaire de Jennifer Haynes est donc historique en matière de justice pédocriminelle et de reconnaissance du TDI.
    En 2021, la plateforme Netflix a produit une série documentaire sur le multiple Billy Milligan, célèbre cas déjà cité plus haut : « Billy Milligan : ces monstres en lui ».

     

    b/ Le cinéma et les séries TV

    Il est intéressant de noter que malgré le fait que ce trouble psychiatrique soit plus ou moins inconnu du grand public, nombreuses sont les productions cinématographiques à l'avoir utilisé comme base pour établir leur scénario :
    - The Case of Becky (1921)
    - Dr Jekyll & Mr Hyde (1941)
    - The Dark Mirror (La Double Énigme, 1946)
    - The Three Face of Eve (Les Trois Visages d'Ève, 1957)
    - The Manchurian Candidate (Un crime dans la tête, 1962)
    - The Nutty Professor (1963)
    - A Clockwork Orange (Orange Mécanique, 1971)
    - Sybil (1976)
    - Dressed to Kill (Pulsions, 1980)
    - Zelig (1983)
    - Voices Within: The Lives Of Truddi Chase (Démons Intérieurs, 1990)
    - Raising Cain (L'Esprit de Caïn, 1992)
    - Complots (1997)
    - Fight-Club (1999)
    - Session 9 (2001)
    - The Bourne Identity (La Mémoire dans la peau, 2002)
    - Dédales (2002)
    - Identity (2003)
    - Secret Window (Fenêtre Secrète, 2004)
    - Hide & Seek (Trouble jeu, 2005)
    - Mr Brooks (2007)
    - Shutter Island (2010)
    - Frankie & Alice (2010)
    The Crowded Room (2015)
    Split (2016)

    Nous pouvons également citer les séries télévisées Dollhouse, mettant en scène l'exploitation de "poupées" humaines programmées et amnésiques ou encore United State of Tara qui raconte l'histoire d'une mère de famille souffrant d'un T.D.I., mais aussi la série canadienne Shattered dont le personnage principal est un policier à la personnalité multiple... tout comme dans la série française Kepler(s) sortie en 2019 ; Marc Lavoine y joue le rôle d’un policier ayant « trois passagers cohabitant dans son cerveau et prenant parfois le contrôle. » Citons également la série américaine Mr Robot, dont le personnage principal, un cyber-pirate marginal et tourmenté, souffre d’un Trouble Dissociatif de l’Identité.
    Le court métrage Inside de Trevor Sands (2002) met en scène un patient avec une personnalité multiple plutôt hétéroclite évoluant en milieu psychiatrique ; tout comme le court métrage Teenland (2014), une subtile représentation morbide et glauque du T.D.I..

    Généralement dans les productions cinématographiques, le T.D.I. est représenté d'une manière stéréotypée et partiale, ne montrant que le côté attractif et sensationnel de la personnalité multiple et en éclipsant les autres caractéristiques de la maladie. De plus, le plupart des films traitant ce sujet mettent en avant des personnages extrêmement conflictuels, violents, voir même meurtriers. Cette vision du T.D.I. est limitative. De plus le cinéma a tendance à mélanger et à confondre schizophrénie et T.D.I., ce qui aggrave encore la confusion générale entre ces deux diagnostics. Le cinéma étant un art visuel, la représentation cinématographique habituelle du T.D.I. ne permet pas de distinguer le véritable dédoublement de personnalité de l'hallucination, ce qui renforce la confusion entre schizophrénie et T.D.I..⁷⁴

    Pour ce qui est de l'image médiatique du contrôle mental basé sur le T.D.I., voici ce qu'écrit la thérapeute Alison Miller :
    La représentation populaire du contrôle mental par les mass-médias implique généralement des espions ou des assassins qui travaillent pour la CIA ou d'autres groupes militaires, politiques ou même des entreprises privées, sans qu'ils en aient conscience. Cela parce qu'ils ont d'autres "personnalités" qui agissent dans ces activités. Prenons par exemple Jason Bourne, le héros du film "Complots", ou Echo dans la série "Dollhouse", parmi d'autres productions américaines. Ces fictions qui mettent en scène des agents spéciaux suggèrent au public qu'ils ont été recrutés à l'âge adulte, faisant même un choix délibéré pour participer à ces choses là. Une fois qu'ils ont été recrutés, l'histoire commence, leurs anciennes mémoires sont effacées et une nouvelle personnalité avec des compétences spécifiques est alors créée. Cependant, il n'y a qu'une seule étape de la vie durant laquelle les programmeurs peuvent créer un individu pouvant pratiquer de telles activités sans en avoir aucune conscience, sans avoir aucune résistance…
    Il n'y a qu'une seule façon de le faire et c'est par les abus et la torture sur un jeune enfant. L'affreuse réalité est qu'il n'existe aucun adulte qui s'engagerait volontairement dans de telles choses, il n'y a que des petites victimes. ⁷⁵

     

    c/ L'incroyable Hulk…

    Tout le monde connaît le personnage « Hulk », cet homme qui se transforme en une sorte de géant vert à la force décuplée lorsque quelque chose déclenche en lui une rage extrême. L'incroyable Hulk est une création du scénariste Stan Lee et du dessinateur Jack Kirby. Ce personnage de fiction a été popularisé par la maison d'édition Marvel Comics où il est apparu pour la première fois aux États-Unis en 1962. Ce que les gens savent moins, c'est que l'histoire de l'incroyable Hulk est basée sur un trouble psychiatrique qui n'est rien d'autre que le T.D.I. avec son amnésie dissociative. Sans un fractionnement de sa personnalité, le héros Bruce Banner ne se transformerait pas en l'incroyable Hulk…
    Sur le site internet de la maison d'édition⁷⁶ nous pouvons lire une description très détaillée sur le monde de Hulk et particulièrement sur son fractionnement de personnalité.
    La maison d'édition décrit parfaitement le contexte traumatique et dissociatif qu'il y a derrière l'histoire du « Géant Vert ». Nous y apprenons que Bruce Banner est le fils d'un alcoolique qui le haïssait profondément. Son père le maltraitait et le terrorisait, allant même jusqu'à tuer sa mère avant de se retrouver interné en hôpital psychiatrique. Très tôt, Bruce a montré les signes d'une grande intelligence mais aussi d'un repli sur lui-même.
    Nous pouvons lire sur Marvel.com qu'il aurait "développé un dédoublement de la personnalité pour l'aider à traiter sa douleur et sa rage", le célèbre et incroyable Hulk souffre donc bien d'un trouble dissociatif de l'identité...
    À l'école, Bruce Banner était tellement insociable et violent qu'il a fini par poser une bombe dans le sous-sol de son établissement... ce qui a attiré l'attention de l'armée sur ce petit génie qui deviendra plus tard physicien travaillant pour cette dernière. C'est une irradiation accidentelle aux rayons gamma qui a provoqué ce phénomène de transformation physique radicale.
    Au début de la saga, Bruce se transformait en un Hulk gris au coucher du soleil et il retrouvait sa forme humaine à l'aube. Par la suite, son changement en « Géant Vert » sera déclenché par une forte libération d'adrénaline lorsque Bruce entre dans une rage extrême, cela à n'importe quelle heure de la journée. Le Hulk vert n'a pas les mêmes capacités d'intelligence que Bruce, ni la même mémoire, c'est un alter fou furieux pouvant être une réelle menace pour la société. Il est important de noter que Bruce Banner souffre d'amnésies, il ne se rappelle jamais de ce qu'a fait Hulk et il doit reconstituer les événements à partir des dégâts que son alter vert a provoqué sur son passage... Il s'agit clairement d'une rage incontrôlable où Bruce Banner entre dans un état dissociatif. On nous dit qu'il lutte en permanence pour contrôler les « switch », les basculements d’une personnalité à l’autre, afin de maintenir une stabilité de sa propre personnalité...
    L'histoire continue… l’industrie Marvel nous explique qu’un jour, le psychiatre Leonard "Doc" Samson capture Hulk et arrive à séparer la personnalité de Bruce Banner de celle de Hulk. Sans la personnalité de Bruce pour le canaliser et le retenir, Hulk devient encore plus dangereux. Bruce juge alors que la seule solution pour lui de contrôler le « Géant Vert » est de fusionner avec le monstre. Mais le stress de la réintégration crée un autre alter : "Joe Fixit »…
    Cet alter est une brute au mauvais caractère dont la personnalité ressemble à celle du père de Bruce. C'est à partir de ce moment là qu'il se crée une véritable bataille dans le subconscient de Bruce pour savoir quelle personnalité alter prendra le contrôle et aura la suprématie.
    Cependant, grâce à des séances d'hypnose, Banner, Hulk et Joe Fixit sont tous les trois mis au même niveau de conscience afin qu'ils affrontent ensemble les questions non résolues, qu'ils affrontent enfin leurs démons intérieurs…
    Bruce Banner doit alors se confronter aux mémoires concernant son père qui l'a violenté et qui a assassiné sa mère. En intégrant cela, Bruce devient capable de fusionner les personnalités alter pour enfin trouver un apaisement intérieur : une autre personnalité va alors émerger, un nouveau Hulk qui aura les capacités mentales et l'intelligence de Bruce Banner tout en gardant la force de l'incroyable Hulk. Cette nouvelle personnalité sera appelée « Le Professeur »…

    Comme vous pouvez le constater, nous nageons ici en plein dans le sujet du fonctionnement des personnalités multiples, voir même du processus de contrôle mental basé sur les traumatismes…
    Hulk fait parti de ces super-héros américains (l'univers Marvel des Comics) qui sont souvent liés de manière implicite au trouble dissociatif de l'identité. Des super-héros avec d'un côté une identité civile tout à fait classique et par ailleurs une identité secrète avec des super pouvoirs comme Batman, Superman ou encore Spiderman (ces trois là gardent la mémoire de leur transformation). Nous pouvons citer des personnages comme Double Face (un des super-vilains de l'univers Batman) ayant une personnalité bienveillante et une personnalité malveillante, ou encore le personnage Legion, habité par de multiples personnalités ayant chacune des pouvoirs psychiques.
    Citons également le super-héros Moon Knight (Chevalier de la Lune) qui lui aussi a un T.D.I. avec trois personnalités alter. De plus il est en relation avec un dieu égyptien lui permettant de devenir encore plus fort, notamment les nuits de pleine Lune...
    Beaucoup de références à l’occultisme dans les Comics…
    Les consommateurs profanes n’y comprenant rien…
    Le constat est que tous ces personnages fictifs illustrent bien la présence marquée du T.D.I. dans la culture des Comics et des super-héros. L'amnésie dissociative est également présente :
    Le personnage des X-Men, James Howlett, possède un alter nommé Wolverine qui est coutumier des amnésies, il ne se rappelle jamais des massacres auxquels il se livre régulièrement, tout comme Hulk ne se rappelle pas de ses rages destructrices. C'est une parfaite illustration du phénomène des murs amnésiques traumatiques dans les états dissociés…
    À noter qu'en 1992, la série X-Men a fait une référence claire au programme MK-Ultra dans un des épisodes de la saison 4 intitulé :
    « Weapon X, Lies and Videotape ».
    Dans cet épisode les X-Men découvrent un laboratoire clandestin où ils ont subi des séances de programmation mentale plusieurs années auparavant.
    Ils y trouvent notamment un enregistrement vidéo qui contient la description des expérimentations qui ont été faites sur eux, voici ce que le dessin animé nous dévoile :
    « Des sujets anonymes ont été testés et conditionnés avec des traumatismes. Nous sommes capables de réintégrer ces hommes dans la société lorsque les services secrets en ont besoin, sans qu'ils n'aient aucune mémoire d'avoir été programmés. Ils sont conditionnés et ils ne se rappellent de rien… La clé est d'atteindre leur subconscient. Pour cela le sujet doit être exposé de façon répétitive à des simulations de traumas émotionnels extrêmes. En utilisant des drogues, nous imprimons de faux souvenirs dans l'esprit du sujet afin de le saturer émotionnellement et de le fractionner pour le rendre contrôlable… Ce processus semble mieux fonctionner lorsque les traumatismes sont réels… » …
    Le programme MK-Ultra résumé en quelques lignes, mais bien entendu tout ceci n'est que de la science-fiction pour adolescents attardés…

     

    7 - Conclusion

    Pour le Dr. Colin Ross, l'étude sérieuse du T.D.I. aurait dû provoquer un véritable basculement de paradigme dans la psychiatrie moderne, il écrit :
    Le T.D.I. est le plus important et le plus intéressant trouble dans la psychiatrie, c'est pourquoi je l'étudie. Je crois que c'est un diagnostic-clé dans cet imminent changement de paradigme de la psychiatrie, car le T.D.I. illustre le mieux la réponse caractéristique de l'organisme humain face à un sévère traumatisme psychique ; mais aussi parce que le trauma est une cause majeure des maladies mentales d'un point de vue de santé publique. Je pense que le trauma est une cause sous-jacente majeure dans de nombreuses maladies mentales, comme la dépression, les troubles alimentaires, les troubles de la personnalité, l'abus de substances, les troubles psychosomatiques et toutes les formes d'autodestruction et de violence. La psychiatrie biologique devrait obtenir de bien meilleurs résultats si elle se focalisait sur la psychobiologie du trauma.⁷⁷

    Il semblerait que la psychiatrie francophone soit mal formée, voir aucunement formée en psychotraumatologie et encore moins en matière de troubles dissociatifs…. Les ressources francophones (publications d'études scientifiques, publications de témoignages, ouvrages spécialisés, enquêtes et reportages journalistiques) concernant le T.D.I., et plus globalement la psychotraumatologie, semblent très restreintes pour ne pas dire inexistantes. Fait plutôt étrange alors que ce trouble est officiellement reconnu dans le DSM et qu'il existe un très grand nombre d'ouvrages anglophones sur le sujet. Pourquoi une telle lacune en francophonie ? Pourquoi la psychotraumatologie n'est-elle pas plus développée ? Ce qui permettrait de mieux venir en aide aux victimes. Pourquoi l'existence du T.D.I. est-elle vigoureusement attaquée et discréditée par une certaine élite médicale ou pseudo experts ? Qui non seulement ne reconnaissent pas les phénomènes de fractionnement de la personnalité, mais de surcroît relativisent les conséquences que peuvent avoir les traumatismes infantiles sur la vie future de l'enfant.

    C'est une véritable chape de plomb qui recouvre cette boîte de Pandore que représente les abus rituels et le contrôle mental basé sur les traumatismes : c'est à dire le processus neurologique de la dissociation et de l'amnésie traumatique. Enseigner dans les facultés de médecine le fonctionnement scientifique de la dissociation, des murs amnésiques et du fractionnement de la personnalité reviendrait à révéler publiquement et académiquement une certaine connaissance occulte. Une connaissance pourtant vieille comme le monde et utilisée de nos jours de façon systématique et malveillante par certains groupes de pouvoirs. Le processus de fonctionnement des esclaves sous programmation mentale n'est pas censé atteindre la sphère publique et profane. La plupart des étudiants en psychologie et en psychiatrie ne croient pas qu'un tel contrôle mental soit possible…
    Cela pour la bonne raison qu'ils n'ont aucune connaissance du concept basique qu'il y a derrière le MK (contrôle mental basé sur les traumatismes), c'est à dire le T.D.I., un trouble de la personnalité indispensable pour qu'un humain puisse travailler comme un robot dans des opérations clandestines… ou non.

    Dans un article intitulé "The Dissociative Disorders, Rarely Considered and Underdiagnosed" (les troubles dissociatifs, rarement considérés et sous-diagnostiqués), le Dr. Philip M. Coons confirme que les troubles dissociatifs sont généralement sous-diagnostiqués car non pris en considération, faute de formation. Le Dr. Coons constate que les professionnels de la psychiatrie ne sont pas familiarisés avec ce diagnostic ni même avec la symptomatologie dissociative car selon lui, les professionnels manquent sérieusement de données épidémiologiques concernant les troubles dissociatifs. Pourquoi une telle omission dans le milieu psychiatrique du 21ème siècle ?

    Nous avons un début de réponse dans l'autobiographie de la multiple Cathy O'Brien, "L'Amérique en pleine Transe-formation". Voici ce que Mark Phillips écrit à propos des institutions psychiatriques :
    "À ce jour, ni l’American Psychiatric Association, ni l’American Psychological Association n’ont publié de modèle de développement d’un protocole thérapeutique efficace sur les troubles dissociatifs (considérés comme résultant de traumas répétés). Un certain nombre de facteurs rendent le développement d’un tel modèle difficile. Le premier de ces facteurs concerne le secret que la Sécurité Nationale applique aux recherches classifiées sur le contrôle de l’esprit. Dans le climat actuel, adresser des victimes du contrôle de l’esprit à des professionnels de la psychiatrie pour un traitement équivaudrait à confier un patient nécessitant une opération d’urgence à un chirurgien auquel on aurait bandé les yeux et passé des menottes (…) Ce qui nous permettrait peut-être de jeter les bases d’une explication serait d’identifier "Qui", au sein de notre gouvernement, aurait intérêt à bloquer de cruciales découvertes de la recherche médicale et autres informations d’ordre technologique vis-à-vis des professions psychiatriques (…) Passant à l’étape suivante et vous procurant alors un exemplaire de l’Oxford’s Companion To The Mind (Oxford Press, 1987) du professeur de faculté, vous pouvez pratiquement y trouver tout ce qui concerne les recherches sur l’esprit sans la moindre référence au… contrôle de l’esprit. Peut-être aurez-vous maintenant le loisir de réaliser à travers les omissions des Random House, Webster et autre Oxford Press, que vous êtes victime du contrôle de l’information." ⁷⁸

    La rescapée du programme MK-Monarch, Cathy O'Brien, écrit dans ce livre : "Il y a de nombreuses installations du même type dans notre pays, au sein de divers complexes de la CIA, de l’armée et de la NASA, où les connaissances hyper-avancées du gouvernement sont développées, testées et modifiées. Les gens que j’ai rencontrés, qui avaient étudié en profondeur les mécanismes scientifiques du cerveau et les tenants et aboutissants de l’esprit, se servaient de cette accumulation de connaissances secrètes pour manipuler et/ou contrôler les autres (…) (ndlr: le sénateur) Byrd m’expliquait que le 'Nouvel Ordre Mondial' "voyait ses pouvoirs renforcés" en ne permettant à son lobby, l’American Psychiatric Association (APA), qu’une information partielle et/ou une désinformation délibérée de la communauté psychiatrique en ce qui concerne les modalités de traitement de troubles dissociatifs graves résultant du contrôle de l’esprit ! Ses auteurs pensaient que la rétention des connaissances et la prolifération d’une désinformation délibérée leur permettaient de contrôler leurs secrets et, subséquemment, l’humanité. Il pourrait bien en être ainsi si personne ne pouvait ou ne voulait réagir aux informations présentées dans ce livre." ⁷⁹

    Voici un dialogue tiré du livre "Pour cause de Sécurité Nationale" qui illustre le manque de connaissance du monde psychiatrique sur ce sujet :

    - J’ai passé un grand nombre de coups de fil, commence Marsha, c’est vraiment compliqué d’approcher les professionnels de la psychiatrie sur un sujet «classifié» tel que le contrôle de l’esprit. Ils aiment croire qu’ils en savent déjà tout. Mark et moi acquiesçons de la tête.

    Avez-vous essayé en utilisant l’expression « lavage de cerveau » ? lui demandais-je.
    - Oui, me répond Marsha, je me suis même résolue à employer l’expression «modification du comportement», et je rencontre encore des difficultés à décrire les troubles, et plus encore à trouver un établissement en mesure de les prendre en charge. Si vous êtes d’accord, je vais relancer une recherche, mais cette fois pour trouver quelqu’un qui pourrait lui diagnostiquer un T.D.I..
    - Y a-t-il quelqu’un dans cet État qui sache traiter ces troubles ? demande Mark. Selon les standards psychiatriques actuels, il faut en moyenne 8 ans et demi pour diagnostiquer ce syndrome, et pendant ce temps il doit y avoir un traitement. En attendant que les « types du renseignement » aient fait diffuser dans les milieux psychiatriques les données permettant le diagnostic précis et le traitement adéquat, notre seule solution réside dans les vieilles thérapies obsolètes au long cours. Comment envisagez-vous de trouver quelqu’un dans cet État pour diagnostiquer les conséquences des sévices que la CIA a fait subir à Kelly ? ⁸⁰

    Les professionnels du monde de la santé mentale ne sont visiblement pas formés pour pouvoir diagnostiquer correctement une personne souffrant d'un trouble dissociatif de l'identité… Ce trouble psychiatrique n'est pas enseigné dans les facultés, donc on ne cherche pas à le détecter et si vous ne cherchez pas une chose, vous ne la trouvez pas… donc elle n'existe pas, la boucle est bouclée. L'absence de diagnostic correct, en privant le patient d'un traitement adéquat, est le problème le plus important et le plus courant pour les patients souffrant d'un T.D.I.. Ce dernier sera généralement diagnostiqué comme schizophrène, bipolaire ou borderline…
    sans oublier évidemment la lourde ordonnance de psychotropes faisant partie du protocole thérapeutique, engraissant copieusement les laboratoires pharmaceutiques, cela dit en passant…

    Dans le livre de la thérapeute canadienne Alison Miller, "Healing the Unimaginable", une patiente (LisaBri) témoigne : "Au début des années 90, j'ai été diagnostiquée avec toute sorte de troubles, allant de la schizophrénie jusqu'au syndrome prémenstruel. On m'a dit de trouver un hobby et de ne plus boire le soir. Le psychiatre sortait de son bureau une boîte de pilules blanches à chaque fois que je montrais un signe émotionnel. Tous les thérapeutes, docteurs et psychiatres que j'ai pu rencontrer voulaient que j'étouffe mes émotions ou que je les éloigne loin de moi. Mais où pouvaient-elles aller ces émotions ? Plus je les étouffais, plus j'allais mal, jusqu'au jour où je me suis retrouvée à déambuler dans le quartier sécurisé d'un hôpital psychiatrique… J'ai réussi à décrocher des médicaments et de l'alcool et j'ai finalement trouvé un thérapeute compétent avec qui travailler. J'étais bien décidée à tout faire pour freiner ces états émotionnels intenses que je subissais. J’ai rapidement été diagnostiquée avec un T.D.I.." ⁸¹

    En étudiant de plus près la question du T.D.I., on comprend aisément que les fonctions dissociatives et amnésiques de l'esprit humain peuvent être exploitées dans un but de manipulation et d'exploitation de l'individu. Il s'agit là d'une véritable science psychiatrique parallèle, qui mise entre de mauvaises mains devient une science traumatique et une arme de contrôle mental indétectable. Si ce trouble de la personnalité fractionnée avec ses murs amnésiques n'est pas enseigné dans les facultés de médecine et qu'il est systématiquement controversé et décrédibilisé par des experts, c'est pour la simple raison qu'il est l'axe principal du contrôle mental pratiqué par certaines sectes dominantes. Les abus rituels systématiques permettent la programmation MK, elle-même basée sur la structuration et l'organisation d'un système interne résultant d'un T.D.I….

     

    Sources :

    ¹ "Viols d'Enfants, la Fin du Silence ?" - France 3, 2000

    ² "Le Psychotraumatisme: abords théoriques. Tempête Xynthia, étude sur les sinistrés de La Faute-sur-Mer deux ans après" - Thèse de Anne-Sophie Baron, 2012

    ³ "Dissociation structurelle de la personnalité et trauma" - Nijenhuis, van der Hart, Steele, de Soir, Matthess, Revue francophone du stress et du trauma, 2006

    ⁴ "Thanks For The Memories: The Truth Has Set Me Free" - Brice Taylor, 1999, p.27

    ⁵ Muriel Salmona - Pratis TV, 16/01/2012

    ⁶ "Syndromes traumatiques du viol et de l'inceste" - Jean Michel Darves-Bornoz. Congrès de psychiatrie et de neurologie, Toulon, 1996

    ⁷ "Violée à 5 ans, elle s'en souvient à 37: avec la terreur, le cerveau peut disjoncter" - Muriel Salmona, nouvelobs.com 2013

    ⁸ "The Myth of Sanity: Divided Consciousness and the Promise of Awareness" - Martha Stout, 2002

    ⁹ "Sef-reported amnesia for abuse in adults molested as children" - John Briere, Jon Conte, Journal of Traumatic Stress, Vol.6, N°1, 1993

    ¹⁰ "Viol à l'école…" - stopaudeni.com, 2015

    ¹¹ "Comment j'ai surmonté l'inceste: des conséquences aux soins" - Isabelle Aubry, 2010

    ¹² "Inceste : Après l'amnésie, une douloureuse reconstruction" - Mathilde Brasilier, VivreFm.com, 20/05/2015

    ¹³ "Miss America By Day: Lessons Learned from Ultimate Betrayals and Unconditional Love" - Marilyn Van Derbur, 2003

    ¹⁴ "High on Arrivals: A Memoir" - Laura Mackenzie, 2011

    ¹⁵ "Mind-control hors de contrôle" - conférence de Cathy O'Brien et Mark Phillips, Granada Forum, 31/10/1996

    ¹⁶ "Zwijgen is voor daders - De getuigenis van X1" - Regina Louf, Éditions Houtekiet, 1998

    ¹⁷ "The Canadian Journal of Psychiatry" / La Revue canadienne de psychiatrie, Vol 33(6), 08/1988

    ¹⁸ "Diagnosis and Treatment of Multiple Personality Disorder" - Frank W. Putnam, 1989

    ¹⁹ "Hypnotisme et Double Conscience" - Dr. Azam,1893, p.43-44

    ²⁰ "Variations de la personnalité" - H. Bourru et P. Burot, 1888, p.39-16

    ²¹ "La Femme Possédée", sorcières, hystériques et personnalités multiples" - Jacques Antoine Malarewicz, 2005

    ²² "Multiple Personnality and Channeling" - Rayna L. Rogers, Jefferson Journal of Psychiatry: Vol. 9: Iss. 1, Article 3, 1991

    ²³ "Inside A Fractured Mind" - Morley Safer, CBS News, 09/2005

    ²⁴ "A Fractured Mind: My Life with Multiple Personality Disorder" - Robert B. Oxnam, 2006

    ²⁵ Lignes directrices pour le traitement du trouble dissociatif de l’identité chez les adultes (2011), Société Internationale pour l’Etude du Trauma et de la Dissociation (SIETD, en anglais ISSTD

    ²⁶ "Multiple Personality Disorder - Demons and Angels or Archetypal aspects of the inner self" - Dr. Haraldur Erlendsson, 2003

    ²⁷ "Imke Deistler und Angelika Vogler: Einführung in die Dissoziative Identitätsstörung – Multiple Persönlichkeit, Junfermann Verlag Paderborn, 2005 - Traduction: www.multiples-pages.net

    ²⁸ "Multiple Personnality Before "Eve" - Adam Crabtree, Journal "Dissociation", Vol.1 N°1, 03/1993

    ²⁹ Ibid

    ³⁰ "Psychophysiologic Aspects of Multiple Personality Disorder: A Review" - Philip M. Coons, Journal "Dissociation", 03/1988

    ³¹ Kluft, R.P. (1988). The dissociative disorders. In: J.A. Talbott, R.E. Hales & S.C. Yudofsky (Eds.). Textbook of Psychiatry, 557-585. Washington, DC: American Psychiatric Press

    ³² "Assessment and Treatment of Multiple Personality and Dissociative Disorders" - James P. Bloch, 1991, p.3

    ³³ "Multiple Personality Disorder, Diagnosis, Clinical Features and Treatment" - Colin Ross, 1989

    ³⁴ "Multiple Personnality Before "Eve" - Adam Crabtree, Journal "Dissociation", Vol.1 N°1, 03/1993

    ³⁵ Lignes directrices pour le traitement du trouble dissociatif de l’identité chez les adultes (2011), Société Internationale pour l’Etude du Trauma et de la Dissociation (SIETD, en anglais ISSTD

    ³⁶ "Belief in the existence of multiple personality disorder among psychologists and psychiatrists" - Dunn, Paolo, Ryan, Van Fleet, Journal of clinical psychology, 1994

    ³⁷ "Psychiatrists attitudes to multiple personality disorder: A questionnaire study" - F.M. Mai, The Canadian Journal of Psychiatry, 1995

    ³⁸ "Attitudes toward DSM-IV dissociative disorders diagnoses among board-certified American psychiatrists" - Pope, Oliva, Hudson, Bodkin, Gruber, American Journal of Psychiatry, 1999

    ³⁹ U.S. v. Greene, 1999 / "Dissociative identity disorder and criminal responsability" Farmer, Middleton, Devereux, dans "Forensic aspects of dissociative identity disorder", Sachs & Galton, 2008

    ⁴⁰ "Programmed to Kill: The Politics of Serial Murder" - David McGowan, 2004, p.xiv

    ⁴¹ "EEG Coherence and Dissociative Identity Disorder", Journal "Trauma & Dissociation", Vol.3, 2002

    ⁴² "Hippocampal and Amygdala Volumes in Dissociative Identiy Disorder, American Journal of Psychiatry" - Vermetten, Schmahl, Lindner, Loewenstein, Bremner, 2006

    ⁴³ "One Brain, Two Selves" NeuroImage 20 - Reinders, Nijenhuis, Paans, Korf, Willemsen, J.den Boer, 2003

    ⁴⁴ "Bessel van der Kolk wants to transform the treatment of trauma" - Mary Sykes Wylie, Psychotherapy Networker Magazine, 2004

    ⁴⁵ "Imke Deistler und Angelika Vogler: Einführung in die Dissoziative Identitätsstörung – Multiple Persönlichkeit, Junfermann Verlag Paderborn" 2005-www.multiples-pages.net

    ⁴⁶ "I Was The Murderer ! Or the Dissociative Identity Disorder In The Cinema" - Beatriz Vera Posek, 2006

    ⁴⁷ "Multiple personality disorder patients with a prior diagnosis of schizophrenia" - Colin Ross, G. Ron Norton, Journal "Dissociation", Vol.1 N°2, 06/1988

    ⁴⁸ "Les médecins de la C.I.A. et l'escroquerie de la psychiatrie" - Interview du Dr. Colin Ross, sott.net, 2013

    ⁴⁹ "Dissociative disorder among psychiatric patients" - T.Lipsanen, J.Korkeila, P.Pelolta, J.Järvinen, K.Langen, H.Lauerma, Eur Psychiatry 2004

    ⁵⁰ "Dissociation et passage à l'acte violent: une revue de littérature" - Jérémie Vandevoorde, Peggy Le Borgne, 2014

    ⁵¹ "La schizophrénie discociative existe-t-elle ?" Marie-Christine Laferrière-Simard et Tania Lecomte, 2010

    ⁵² "Les conséquences psychotraumatiques" - Muriel Salmona, Pratis TV, 2011

    ⁵³ "Wayne Morris, interview with Lynne Moss-Sharman" - CKLN-FM Mind-Control Series, Part 16

    ⁵⁴ "Guidelines for Treating Dissociaitve Identity Disorder in Adults, Third Revision", Journal of Trauma & Dissociation, vol.12, 2011 - International Society for the Study of Trauma and Dissociation - ISSTD

    ⁵⁵ "Psychobiological characteristics of dissociative identity disorder: a symptom provocation study." - Reinders, Nijenhuis, Quak, Korf, Haaksma, Paans, Willemsen, den Boer, Biol Psychiatry, volume 60, 2006

    ⁵⁶ "The effect of multiple personality disorder on anesthesia: a case report" - Moleman, Hulscher, van der Hart, Scheepstra, Journal "Dissociation" Vol.7 N°3, 09/1994

    ⁵⁷ "Handwriting variations in individuals with MPD" - Jane Redfield Yank, Journal "Dissociation", Vol.4 N°1, 03/1991

    ⁵⁸ "Childhood Antecedents of Multiple Personality", Chap: "The transgenerational incidence of dissociation and multiple personality" - Richard P. Kluft, 1985, p.127-150

    ⁵⁹ "Paris : deux enfants de 2 et 4 ans drogués à la cocaïne et au crack" - Sarah-Lou Cohen et Cathelinne Bonnin, BFMTV, 02/03/2012

    ⁶⁰ "Animal alters: case reports" - Kate M. Hendrickson, Jean M. Goodwin, Teresita McCarty, Journal "Dissociation", Vol.3 N°4, 12/1990

    ⁶¹ "Healing The Unimaginable: Treating Ritual Abuse and Mind Control" - Alison Miller, 2012

    ⁶² EMDR Europe HAP Suisse romande par Eva Zimmermann et Thomas Renz, d'après le Dr Reddemann et le Dr Cornélia Dehner-Rau

    ⁶³ "Multiple personality: 165 years after Mary Reynolds" - G.B. Greaves, Journal of Nervous Mental Disease, 1980

    ⁶⁴ "Incipient multiple personality in children: Four cases" - J. Flagan & P. Mc Mahon, Journal of Nervous Mental Disease, 1984

    ⁶⁵ "Psychotherapy with a ritually abused 3-year-old: deceptive innocence" L. Ironside, 1994, dans "Treating Survivors of Satanist Abuse" V. Sinason

    ⁶⁶ "Healing The Unimaginable: Treating Ritual Abuse and Mind Control" - Alison Miller, 2012, p.28

    ⁶⁷ "Dissociative identity disorder in childhood: five turkish cases" - Journal "Dissociation", Vol.9 N°4, 12/1996

    ⁶⁸ "Recognition and differential diagnosis of dissociative disorders in children ans adolescents" - Nancy L. Hornstein, Journal "Dissociation", Vol.6 N°2/3, juin/sept 1993

    ⁶⁹ "Diagnosis of childhood multiple personality disorder" - Gary Peterson, Journal "Dissociation", Vol.4 N°3, 09/1991

    ⁷⁰ "The development of symptoms of multiple personality disorder in a child of three" - Richard Riley, John Mead, Journal "Dissociation", Vol.3 N°1, 09/1988

    ⁷¹ "Incest – The ultimate betrayal: Findings from a series of international extreme abuse surveys" - Wanda Karriker, 2008

    ⁷² "Childhood Antecedents of Multiple Personality" - Richard P. Kluft, 1985, p.179-180

    ⁷³ "Dissociative identity disorder in childhood: five turkish cases" - S. Zoroglu, L. Yargic, M. Ozturk, Journal "Dissociation", Vol.9 N°4, 12/1996

    ⁷⁴ "I was the murderer ! Or the Dissociative Identity Disorder in the cinema" - Beatriz Vera Posek, 2006

    ⁷⁵ "Becoming Yourself: Overcoming Mind Control and Ritual Abuse" - Alison Miller, 2014, p.15

    ⁷⁶ Marvel Universe Wiki: Hulk (Bruce Banner), www.marvel.com

    ⁷⁷ "The Osiris Complex: Case Studies in Multiple Personality Disorder" - Colin Ross, 1994, p.xii

    ⁷⁸ "L'Amérique en pleine Transe-formation" - Cathy O'Brien & Mark Phillips, 2013, p.62-19

    ⁷⁹ Ibid, p.327-328

    ⁸⁰ "Pour cause de Sécurité Nationale" - Cathy O'Brien & Mark Phillips, 2015, p.101-102

    ⁸¹ "Healing the Unimaginable: Treating Ritual Abuse and Mind Control" - Alison Miller, 2012, p.136

     

     

    « ➤ TEENLAND vostfr➤ FRANC-MAÇONNERIE : La FIN du SILENCE / Les Témoignages que la Loge redoute ! »

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :