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➤ "À la Reconquête De l'Esprit de Cathy"
L'Amérique en Pleine TranSE-Formation
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"Le plus beau présent qu’on puisse faire à quelqu’un, c’est de lui laisser un bon souvenir" (La devise de Mark Phillips)
Nous étions arrivés à la semaine qui suivait Noël 1988. La moitié de mes engagements vis-à-vis de la mafia de Vegas était en passe d’être remplie. Tout le restant de nos possessions personnelles ayant été placé en conteneur pour secrètement transiter sur un autre bateau, ma "nouvelle famille", moi-même et mes animaux de compagnie nous trouvions quant à nous sur un ferry à destination d’Anchorage, en Alaska. Il nous faudrait quelque trois jours pour accomplir ce périple de seize cents miles {env. 3000 km (N.d.T.)} à travers glace et neige – chose qui m’octroyait malheureusement du temps pour penser.
Eu égard à nos finances en piteux état, je savais concrètement que nous n’aurions nul endroit où nous enfuir ou nous cacher de la CIA. Cathy et Kelly semblaient heureuses et se croyaient en sécurité, ce qui était pour moi la priorité numéro un ! Je devais pour ma part être confiant dans le fait que mon projet de fuite convaincrait le personnel concerné de la CIA que nous ne représentions plus une menace pour leur sécurité. Le projet en question se fondait sur une formule de guerre psychologique mise au point par les Romains. Je voulais me donner l’allure de quelqu’un qui aurait tout du personnage d’un mauvais film (western) avec Reagan, qui chevauche vers le couchant pour ne plus faire entendre parler de lui – pensant en moi-même qu’il n’y aurait pas le moindre soleil à se coucher sur la partie du continent que nous étions en train de rejoindre, tout au moins jusqu’au printemps. Un soir, alors qu’il était tard et que nous en étions à la moitié de notre voyage, j’eus besoin de la solitude au grand air que le pont avant savait me procurer. J’étais reconnaissant à la grêle et à la neige poussées par le vent qui me piquaient les yeux et m’obligeaient à les fermer, libérant ainsi mon esprit de tout ce qui n’était pas essentiel. J’étais à ce moment-là psychologiquement "à plat", car ma fureur s’était combinée à d’insupportables émotions m’ayant frappé au plus profond de moi-même.Pour éviter à Mason, mon fils adolescent adoré, d’être blessé et/ ou inconsciemment utilisé comme un pion pour m’obliger à garder le silence, j’avais quasiment brisé notre lien de père à fils. Je n’ai depuis ce temps-là pas cessé de l’aimer tendrement et de souffrir cruellement de son absence. La souffrance émotionnelle qui avait résulté d’une telle supercherie et de notre séparation semblait former en moi un composé qui était en train de consumer mon être.Alors que je volais au secours de Cathy et de Kelly, j’avais insulté et fui mon fils, provoqué la faillite de ma société, simultanément orchestré deux divorces et vendu toutes mes possessions de valeur. J’étais inquiet de ne plus jamais revoir ma mère, qui n’était plus toute jeune – sa santé était en train de se détériorer. Les vêtements sur mesure que je portais étaient devenus trop grands pour moi, étant donné que j’avais près de vingt kilos en moins et n’étais plus que l’ombre de moi-même. L’insomnie chronique, symptôme de la grave dépression dont je ne voulais rien dire, était lentement en train de me rendre fou. Ma propre mémoire à court terme commençait à me faire défaut. J’avais remarqué que, pour la première fois depuis plus de trente ans, je bégayais en prononçant certains mots. Mais je savais que ce n’était là que le début d’une longue et dangereuse expédition en quête de réponses.
Alors que je me tenais debout, seul et les yeux fermés sur le pont d’acier recouvert de glace du navire, je fus submergé par un étrange sentiment de soulagement. J’avais on ne sait trop comment réussi à me souvenir d’où je pourrais tirer des "forces de secours". Je commençai à prier en silence pour obtenir force intérieure et guidance au moyen d’une technique de méditation apprise des années plus tôt. Je ressentis immédiatement la tranquille conviction que nous survivrions pour raconter notre histoire.
Je m’aperçus soudain que le vent glacé était en train de me geler mains et visage. Je fus rempli de joie de pouvoir ressentir à nouveau quelque chose ; j’avais apparemment réprimé mon sens du toucher en même temps que mes émotions. Pour la première fois depuis que j’avais pris connaissance de l’existence sous contrôle de Cathy et Kelly, je me sentis vivre pleinement.
J’ouvris les yeux pour découvrir que je n’étais plus seul. Une voix s’élevait de quelque part. Je regardai autour de moi et vis, recroquevillé sur le sol presque à côté de moi et enveloppé dans une couverture verte foncé, celui dont provenait la voix. J’entendis à nouveau : "Hé mec, tout va bien ?" Ce brave homme que j’allais plus tard être amené à connaître et respecter était Mark Demont. C’était un exemple classique de ce qu’on appelait en Alaska un "frustré du portefeuille". Rapidement défini, un "frustré du portefeuille" était quelqu’un qui venait des "48 (États) d’en bas", à court d’argent et désillusionné quant à son chez lui. Nous étions l’un et l’autre des frustrés du portefeuille et des réfugiés issus d’une société malade, que les drogues de la CIA, la violence des médias et la cupidité sans limites avaient rendue folle.
Je lui offris une cigarette et ma main en guise d’amitié, quelque chose que je n’avais pas fait de moi-même depuis bientôt un an. Nous convînmes de rester en contact après notre arrivée.
Quelque deux jours plus tard, nous nous rangions sans histoire le long d’un des quais de Juneau. Le capitaine du ferry nous dit que cela faisait dix ans qu’il n’avait pas fait aussi froid. Le thermomètre du navire indiquait quarante degrés en dessous de zéro. Et ce qui était pour moi des conditions météo sans surprise représentait pour Cathy et Kelly un véritable défi physiologique.
J’avais passé deux années en Alaska aux environs de 1980. C’était là-bas que j’avais aidé George Kamats, mon ancien patron de la Capital International Airways, à lancer une nouvelle compagnie aérienne brièvement connue sous le nom de "Great Northern Airlines". J’ai ensuite tourné le dos à l’Alaska, non pas tant à cause de l’environnement, que j’adorais, que du fait de mon incapacité à affronter les diatribes quotidiennes de Kamats. Ce gaillard inflexible avait à son actif une longue histoire riche en couleurs au service d’autres compagnies aériennes contrôlées par la CIA. Il avait entre autres emplois occupé des postes élevés de cadre dirigeant au sein du tristement célèbre département de soutien aérien du Service américain des Forêts, d’Air America et des transports Evergreen (CIA).
J’étais maintenant de retour en Alaska, sans emploi et sachant que j’étais traqué comme un animal par la "Central Intelligence Agency", cette même organisation pour laquelle j’avais autrefois indirectement travaillé. Ayant pu dormir les deux ou trois nuits précédentes, je me sentais beaucoup mieux et l’idée d’être traqué ne m’inquiétait guère. Je me souviens ainsi avoir eu plus de choses productives à l’esprit. Je ne pouvais permettre que la peur brute entre pour quoi que ce soit dans les réflexions que je nourrirais quotidiennement.
Chaque fois que c’était possible, Cathy et moi nous consacrions à la découverte d’une maison que nous pourrions qualifier de "chez nous". Nous trouvâmes finalement, dans un immeuble qui en contenait quatre, un appartement peu onéreux avec deux chambres et un garage chauffé pour mes animaux adorés : trois ratons laveurs et deux chiens. Notre nouveau chez nous n’aurait jamais d’autres meubles qu’une TV, deux lits, une table et des chaises – un inconvénient que nous n’abordâmes jamais. Nous étions bien comme ça.
Après nous être installés dans "notre endroit à nous", dans l’agglomération rurale éloignée de Chugiak, nous avons immédiatement commencé à faire des choses normales. Nous avons inscrit Kelly dans une grande école publique, rencontré nos voisins et joué dans la neige. Toutes choses dont les plaisirs s’entouraient d’une ambiance de famille traditionnelle – quelque chose que Cathy et Kelly n’avaient auparavant jamais connu.
Les maigres ressources dont nous disposions encore disparaissaient à vue d’œil. Le coût des médicaments contre l’asthme, dont Kelly avait maintenant impérativement besoin pour rester en vie, était de plus de 400 dollars par mois. Je soupçonnais fortement que sa santé déclinante était en majorité due aux deux semaines "en enfer" qu’elle avait récemment passées aux côtés de Wayne Cox, qu’on pensait être un tueur en série. C’est effectivement ce qu’elle me raconta, en détaillant les abomi- nables rituels sataniques auxquels elle et son demi-frère Jacob avaient été soumis.
J’avais heureusement conservé par-devers moi mon coûteux appareil photo de marque Nikon, des revolvers et des bijoux qui m’appartenaient. C’était là les dernières vraies richesses que j’avais encore à vendre. Je les vendis donc et l’argent récolté nous permit de nous payer le minimum vital pendant cinq mois supplémentaires jusqu’à ce que les dépenses de santé de Kelly et les circonstances nous obligent à demander l’aide sociale.
C’est durant cette période de cinq mois, Kelly étant à l’école et aucun téléphone n’étant susceptible de nous distraire, que j’ai commencé à intensifier mes efforts pour déprogrammer Cathy. La plupart du temps, notre travail démarrait au moment où nous revenions d’avoir amené Kelly à l’école. Le soir, aussitôt que Kelly était au lit après avoir dîné et fait ses devoirs, nous faisions le résumé de nos "sessions". Nous œuvrions de cette manière jour et nuit, sept jours sur sept, intensément concen- trés sur le processus de déprogrammation jusqu’à ce que je m’effondre d’épuisement aux alentours de trois heures du matin.
La formule de déprogrammation qui permettait de rassembler les fragments éparpillés de l’esprit de Cathy était en soi dénuée de problème. Les petites difficultés que m’a personnellement occasionné la formule en question, dérivaient du fait que je devais l’utiliser de façon "experte" en me fondant sur des souvenirs d’études qui dataient de presque vingt ans. La seule autorité reconnue avec laquelle je communiquais pour être assisté dans ce début de thérapie était Cory Hammond. Mon unique grand défi était d’apprendre à contrôler le continuel état de transe de Cathy pendant qu’elle écrivait ses souvenirs dans un journal.
Bien que j’aie signalé au FBI que je pratiquais l’hypnose, je savais que si la CIA pouvait prouver d’après mes dires que j’utilisais l’hypnose sur Cathy, son témoignage devant les tribunaux n’aurait aucune valeur. Par conséquent, la menace de représailles de la part de la CIA se trouvait écartée. Mais c’est en réalité à travers mes propres recherches intensives en hypnothérapie que j’ai appris à contrôler l’état de transe de Cathy. Cela s’apparentait pour moi à la déshypnotiser. Je serais pour finir considéré par les médecins psychiatres comme un "expert" dans l’utilisation de cet outil clinique si peu utilisé pour retrouver la mémoire.
En outre de ce que j’avais appris pour déprogrammer les gens, cette technique devait sa cohérence à des éléments qui sont en fait les règles éthiques de la conduite d’une thérapie. Ces règles de thérapie étaient rigoureusement appliquées. Cathy comprenait et convenait que pour qu’elle ait un contrôle absolu sur son esprit, elle devait placer toute sa confiance en moi et dans ce protocole thérapeutique :
1. Je maintenais une vigilance constante pour m’assurer que Cathy serait physiquement et psychologiquement protégée de toute influence extérieure.
2. Aucun souvenir ne pouvait être verbalisé par Cathy tant qu’elle ne l’avait pas écrit. Les seules questions que je pouvais poser devaient être en rapport avec son récit et adressées à la personnalité consultée qui revivait ses souvenirs. Ces questions devaient uniquement concerner le "qui", le "quoi", le "quand", le "comment" et le "où" du souvenir. Même s’il m’avait été donné de connaître les réponses à l’avance, je ne devais pas intervenir. Nos perceptions auraient pu être radicalement dif- férentes, ce qui pouvait créer des barrières mémorielles supplémentaires entre ses fragments de personnalité.
3. J’ai fondamentalement expliqué à Cathy ce qu’était le contrôle de l’esprit et elle a alors compris que ce qui lui était arrivé n’était pas de sa faute. Elle a néanmoins également compris qu’elle devenait ici et maintenant responsable de ses actes. C’est au travers de la thérapie qu’elle affirmait son contrôle sur son propre esprit.
4. Nous avons consacré un grand nombre d’heures à des "discussions intellectuelles" concernant les croyances religieuses apprises par Cathy, au cours desquelles ces dernières étaient "logiquement" démontées – tout simplement comme si j’expliquais comment l’illusion induite par les tours d’un magicien participait à brouiller la réalité.
5. Cathy ne serait pas autorisée à exprimer la moindre émotion lors de la remontée des souvenirs et de leur inscription dans son journal. Je ne lui ai jamais demandé : "Qu’est-ce que cela te fait ?". Ceci est aussi important que l’est la question de la sécurité pour un rétablissement rapide de la mémoire.
6. Je procurais à Cathy la nourriture, les vitamines, l’eau nécessaires et la faisais dormir pour améliorer sa santé physique défaillante.
7. J’appris à Cathy à visualiser ses souvenirs sur un "écran de cinéma mental" plutôt que de les revivre par le biais du mécanisme de "réalité virtuelle" de l’esprit.
8. J’ai enseigné à Cathy comment se mettre elle-même en transe et contrôler la profondeur de sa transe à travers une certaine technique d’auto-hypnose (certains la considèrent comme une méditation). Ceci a été mis en place pour éviter toute possibilité de contamination de ses souvenirs ou de confusion entre eux qui aurait pu se produire au cas où j’aurais utilisé cette technique de suggestion hypnotique connue sous le nom d’"imagerie induite".
9. Cathy n’était pas autorisée à lire des livres, des journaux ou des magazines, pas plus qu’elle ne pouvait aborder avec Kelly le moindre des souvenirs retrouvés. Cathy avait toute sa vie vécu le contrôle de l’information et n’avait par conséquent que peu l’occasion de se débattre avec la contamination des souvenirs. Cette règle était également comprise et respectée par Kelly dont les souvenirs commençaient à faire surface.
10. Toutes les façons de se comporter et autres conventions sociales adoptées par Cathy étaient réexaminées au cours de discussions logiques que nous avions entre nous. Toutes les façons préétablies de se comporter, y compris les habitudes quotidiennes, étaient soit remaniées, soit totalement supprimées.
11. J’exigeai d’elle qu’elle portât jour et nuit une montre au poignet pour m’alerter à chaque fois qu’elle aurait le sentiment de vivre le moindre "trou noir". En l’absence de traumatisme, le temps "manquant" est un signe majeur du passage d’une personnalité à une autre. En revanche, le fait de retrouver la notion du temps indique que l’on est en train de récupérer.
Les souvenirs que Cathy faisait remonter dépassaient en horreur tout ce que j’avais jamais entendu de la bouche de quelqu’un. Je me suis souvent demandé si le fait que je sois tombé amoureux de Cathy n’était pas dû à celui d’avoir contracté cette maladie mentale connue sous le nom de "syndrome de Stockholm" – sauf que de telles pensées ne me troublaient guère, car je savais que j’étais né pour aimer Cathy. J’avais néanmoins suffisamment entendu d’horreurs de sa part et de celle de Kelly pour savoir que je souffrais maintenant d’un état de stress post- traumatique (ESPT). Les symptômes afférents à ces troubles passèrent inaperçus auprès de Cathy et de Kelly, elles-mêmes étant en proie à un ESPT qui n’avait jamais cessé de toute leur existence.
Ma propre santé commença rapidement à se détériorer. Le poids que j’avais regagné se mit à fondre une fois de plus. Je souffrais d’intolérables douleurs stomacales, de vomissements et de diarrhées. Je me nourrissais littéralement d’un médicament spécial connu des candidats aux ulcères sous le nom de "Maalox". Un appel téléphonique "sécurisé" à un ami médecin des "48 (États) d’en bas" me permit d’avoir le nom d’un spécialiste local en médecine interne en qui je pourrais avoir confiance. Conscient de ma fâcheuse situation, mon ami médecin prit rendez-vous en mon nom chez ce spécialiste pour qu’il prévoie de me faire passer des examens dans son cabinet. L’un de ces examens, qui nécessitait l’introduction d’un tube en fibres optiques dans l’estomac, montra qu’un parasite qu’on trouve dans l’eau avait eu pour résultat l’apparition de trous dans ma paroi stomacale. Il me recommanda de me faire opérer d’urgence. Ma réponse fut : "C’est non. Combien de temps puis-je encore vivre avec ça avant de me faire opérer ?"
Il me dit alors : "Cela dépendra de votre capacité à bien suivre mes instructions."
"Pas de problème" ai-je répliqué. Après m’être nourri pendant quelques jours par intraveineuse en prenant les médicaments prescrits, je commençai à récupérer.
C’est pendant ce temps de récupération que je commençai ma quête téléphonique de réponses qui accéléreraient le processus de rétablissement de Cathy. Je me fis une fois de plus dire par mon ancien assistant "au bras long" que je savais déjà tout. Mais je n’en étais guère convaincu. Ma persévérance finit néanmoins par payer lors d’un appel téléphonique particulier ; il s’avéra que j’étais, comme on dit, "tombé sur un filon".
Les ouvrages médicaux traitant de recherches expérimentales clandestines relatives au traitement des troubles dissociatifs apparurent à l’annexe d’Eagle River de la bibliothèque municipale d’Anchorage, mystérieusement "réservés" à mon intention. On m’avertit secrètement de venir les prendre un jour donné et à une heure précise. Je m’exécutai.
En sortant de la bibliothèque, je fus abordé par une femme d’âge moyen dont les bras enserraient un sac à provisions. Elle me demanda si la bibliothèque était ouverte, ce qui me parut curieux étant donné que j’étais juste en train d’en pousser la porte pour sortir. Mais ma curiosité fut de courte durée, car elle me demanda alors : "Avez-vous lu de bons livres du Dr. Milton Erickson ces derniers temps ?"
Je répondis : "Non, mais je viens d’en emprunter un du Dr. (psychiatre) William S. Kroger, intitulé Clinical and Experimental Hypnosis."
"Ah oui, dit-elle, je suis une admiratrice convaincue du Dr. Kroger, lui-même un admirateur convaincu du Dr. Erickson, qui est considéré, comme vous le savez, comme le père des recherches (théoriques) sur le contrôle subliminal de l’esprit." Alors qu’elle avait commencé à s’éloigner, elle se retourna et me dit en souriant : "Bonne lecture, et servez-vous du livre, Mark."
Je pensai qu’elle s’était adressée à moi par mon prénom et faisait référence au livre lui-même. Je déduisis également de ce commentaire qu’elle était manifestement à l’origine de la livraison de ces ouvrages à la bibliothèque. Mais je ne tardai pas à comprendre qu’elle s’était référée à un marque-page placé dans l’un des livres, lequel me fournit l’instrument de communication dont j’avais désespérément besoin. Il y avait, inscrit sur le "Mark"-page, un numéro gratuit commençant par "800" avec une date et une heure pour l’utiliser. J’utilisai ce "800", et bien d’autres pareillement transmis, comme autant d’instruments de communication qui m’ouvraient la voie souterraine des barbouzes (espions) jusqu’à l’information. Pendant deux ans encore, cette méthode me permit de me faire guider par téléphone pour un travail psychique avec Cathy digne d’un labyrinthe.
Quand j’appelai ce numéro "800" du marque-page, je fus accueilli par une voix électronique qui me dit pour finir : "Veuillez maintenant taper votre numéro d’employé." Je m’exécutai, utilisant une série de chiffres qui m’avait auparavant été "attribuée" par quelqu’un qui devra rester anonyme étant donné que j’ignore son identité. Le prochain son que j’entendis fut celui d’un téléphone qui sonnait. Après huit sonneries exactement, un homme que je ne connaissais pas répondit à mon appel. Il demanda : "Quel est le problème ?" J’eus l’impression d’être un vendeur d’aspirateurs ayant mis le pied dans la porte, qui débitait des arguments de vente tout préparés. Je commençai en insistant nerveusement sur mon besoin désespéré d’accélérer le déroulement de la thérapie de Cathy.
La voix demanda : "Avez-vous lu les livres ?"
"Oui, répondis-je, mais la plupart des termes cliniques m’étaient inconnus."
La voix me donna alors comme consigne de retourner à la bibliothèque et d’y "prendre un ouvrage psy’ de référence sur la définition des termes." J’interrompis alors ses consignes pour demander s’il aurait été possible de parler à quelqu’un qui pourrait faire en sorte d’accélérer ce processus de déprogrammation. "Eh bien il n’y a que deux déprogrammeurs dans ce pays – l’un à Boston, dans le Massachusetts, et l’autre à Phoenix, dans l’Arizona, et aucun des deux ne pourra vous être d’un grand secours ou digne de confiance avec le genre d’information que vous obtenez (de la part de Cathy)." Il hésita, puis dit encore : "Vous allez avoir besoin de vous faire recommander, ce que je ne peux moi-même pas faire. Mais vous, vous savez comment vous y prendre."
Je demandai : "Me faire recommander pour quoi ?"
"Pour avoir la possibilité de parler à un médecin qui est au courant de ça et qui pourra vous être de quelque utilité."
"OK, dis-je, qui est ce médecin ?"
"Cory Hammond, de Salt Lake City, dans l’Utah."
"Mince ! dis-je, c’est la tête de pont des mormons, et c’est la dernière
religion qui a été utilisée pour traumatiser Cathy."
"Oui ! continua la voix, mais vous pouvez avoir confiance en ce médecin si vous faites attention de ne pas trop en dire (l’informer) sur vous-même. Il est paranoïaque comme tous les autres (qui sont au courant des atrocités du contrôle de l’esprit), mais il pourrait bien vous être d’une aide quelconque. Ah, et soyez vigilant ; tout le monde surveille ce type, alors ils (les ‘méchants’) seront au courant de tout ce que vous direz."
"Merci infiniment" répliquai-je.
Ayant entrepris de chercher quelqu’un qui connaissait professionnellement le Dr. Hammond et pourrait me recommander à lui, je téléphonai à un moment donné au Dr. Bennet Braun, un psychiatre bien connu de Chicago, dans l’Illinois et un spécialiste abondamment publié des troubles dissociatifs. J’appris en cours de conversation qu’il avait une unité hospitalière entièrement consacrée aux thérapies concernant des gens comme Cathy et Kelly. Je me suis à ce moment-là demandé pourquoi on ne m’avait pas fourni son nom auparavant pour que je le consulte. Cette brève rencontre téléphonique me permit d’apprendre que le Dr. Braun avait un certain nombre de patients inscrits sur une longue liste d’attente pour un lit au sein de son unité. Ce médecin m’indiqua ensuite le nom et le numéro de téléphone de Civia Tamarkin, une "amie" en qui il avait confiance – l’une des principaux journalistes d’investigation de People Magazine.
Le fait de contacter cette journaliste de People/Time Life Magazine allait véritablement se révéler être ma plus grosse erreur de jugement dans ma quête d’informations utiles. Je ne tarderais pas à apprendre qu’elle était indirectement responsable de ce que j’eusse failli perdre la vie, et que c’était bien elle qui avait indirectement valu à Kelly de ne pas pouvoir accéder à une thérapie "spécialisée" – ce qui représenterait en soi l’objet d’un autre livre.
La première fois que je parlai avec Civia, la réticence qu’elle mit à lâcher des noms importants avait tout de celle de l’érable à perdre ses feuilles après le gel. À l’époque, j’enregistrai sur bande pratiquement toutes les conversations avec cette source en apparence bien informée, et continuai à le faire au cours des années qui devaient suivre. Civia me fournit en premier lieu les nom et téléphone du "déprogrammeur" de Boston, un ancien programmeur de la secte Moon du nom de Steve Hassan. Elle me fournit ensuite les nom et téléphone permettant de contacter Jolyn "Jolly" West à l’UCLA. Elle me donna en rechignant ceux de la personne qui pourrait me recommander au Dr. Cory Hammond afin que je communique avec lui. Ce dernier contact se révéla être le seul à avoir une "brève utilité" parmi ceux à qui je devais parler.
Tâchant d’optimiser mon jugement quelque peu altéré par mon ESPT, je téléphonai au programmeur Steve Hassan pour qu’il me conseille quant à la façon d’aider Kelly (seule), ce qui eut pour résultat de le faire venir chez nous en Alaska. Il avait apparemment dans l’idée de traumatiser Cathy en utilisant un code bien connu qui déclencherait chez elle le fait de "fuir ma présence pour sauver sa vie". La méthode qu’il employa aurait pu marcher, mais heureusement pour Cathy et Kelly, son élo- cution robotique et son fonctionnement éthique s’avérèrent être d’une extrême pauvreté. J’appris que le respect qu’exprimait Hassan, autant verbalement que dans ses écrits, pour ses amis psychiatres de l’UCLA, les Dr. West et Margaret Singer, relevait de sinistres motivations. J’étais loin de me douter que le Dr. West avait travaillé des décennies durant pour la CIA, lors de recherches sur le contrôle de l’esprit liées au projet "MK-Ultra". Il semble que certaines des recherches du Dr. West, financées par la CIA, avaient été dénoncées dans les années 1970 par un membre de l’enquête parlementaire sur le projet "MK-Ultra". Il survécut néanmoins à l’enquête officielle, car le gouvernement américain avait pour l’essentiel interdit des suppléments d’enquête le concernant lui et ses travaux, sous prétexte que la Sécurité nationale était en jeu. Le seul crime qu’on lui connaisse est d’avoir provoqué la mort d’un éléphant par overdose de LSD en présence d’écoliers. Tels sont les faits dont j’aurais vent après que Cathy et moi nous soyons entretenus avec lui par téléphone, d’autres catastrophes nous ayant ensuite ébranlés. Mais ceci est en soi également une autre histoire.
Les échanges téléphoniques entre le Dr. Cory Hammond et moi-même me procurèrent informations et soutien. Il s’avéra lui-même être le meilleur atout en matière d’informations vivantes et bénéfiques dans ma quête de conseils thérapeutiques spécialisés. Plus tard, à l’occasion d’un symposium, le Dr. Hammond fera un exposé où il livrera à la communauté psychiatrique l’entière vérité telle qu’il la connaissait au sujet du contrôle de l’esprit (il s'agit de l'exposé Greenbaum). Les instructions qu’il me donna à titre de conseil, concernant une technique particulière d’Erickson – appelée "revivification" – pour faire remonter les souvenirs sans souffrance ni libération émotionnelle, sauva littéralement ma précieuse Cathy du fait de revivre ces horreurs à mesure qu’elle s’en souvenait. Cet homme est pour moi un héros.
Le printemps en Alaska représentait une expérience très différente de ce à quoi j’étais accoutumé dans le Tennessee. On en parle en Alaska comme d’une "dislocation". Plutôt que d’entendre le concert à gorge déployée des oiseaux, je percevais le bruit de ruissellement qu’émet la glace en fondant en tout lieu. Les rues s’étaient transformées en une hideuse gadoue brunâtre. Pour un printemps, un changement de saison généralement bien accueilli, c’était pour le moins déprimant. La seule bonne nouvelle, c’était que les journées étaient lentement passées de l’obscurité à la chaude lumière du soleil. Parallèlement à ce passage de saison, une bombe à retardement dont j’ignorais l’existence démarra son compte à rebours. Le comportement et l’asthme de Kelly étaient complètement en train de se détériorer sans aucune raison apparente.
Un vendredi de mai, Cathy reçut dans la matinée un appel du principal de l’école de Kelly nous demandant de passer la prendre dès que possible pour la faire examiner par un médecin. L’infirmière de l’école disait que Kelly souffrait d’une grave crise d’asthme que les médicaments qu’elle avait avec elle n’arrivaient pas à calmer. Nous passâmes la prendre pour nous apercevoir que son état semblait miraculeusement s’améliorer à notre vue. Mais cette amélioration serait de courte durée.
Le dimanche suivant, la toux de Kelly devint presque continuelle. Elle avait épuisé tout notre stock d’un médicament essentiel contre l’asthme, qu’elle utilisait habituellement dans son tube à inhalations. Je lui substituai secrètement de l’eau distillée et m’assis près d’elle pendant qu’elle tâchait de reprendre son souffle. Utilisant une technique éricksonienne d’imagerie induite, je commençai à lui raconter l’histoire d’une petite fille qui soufflait comme un bœuf en escaladant une montagne. L’histoire que je racontais se terminait par l’arrivée au sommet de la montagne de la petite fille, qui est alors si fatiguée qu’elle tombe endormie sur un lit de fleurs sauvages. La réaction de Kelly fut de respirer normalement pour à son tour s’enfoncer elle-même dans un profond sommeil, et se réveiller quelques heures plus tard pour recommencer ses quintes de toux de plus belle. Je retournai à son chevet et lui demandai pourquoi elle toussait.
Kelly répondit en s’agitant quelque peu : "J’ai de l’asthme". Je fis à nouveau appel à mon astuce de substitution d’eau, à laquelle elle réagit positivement, puis elle me dit : "Papa, Wayne (le père, soupçonné être un tueur en série sataniste) me disait que j’allais mourir."
Je dis à mon tour : "Voyons – il n’est pas médecin."
Kelly continua : "Il m’a vraiment dit ça encore, encore et encore." Je demandai alors : "Quand t’a-t-il dit ça ?"
"Quand l’école est finie" répliqua-t-elle.
Et moi : "Que veux-tu dire par là ?"
Elle répéta de manière robotique : "Quand l’école est finie."
"Te souviens-tu quand Wayne t’a dit ça ?" questionnai-je encore. "Au lit, continua-t-elle. Il pensait que j’étais endormie et il parlait avec Alex (Houston) au téléphone et ensuite, il me parlait à moi." Je sus alors que Wayne Cox l’avait programmée en utilisant la pratique clinique appelée "sommeil hypnotique". Alex Houston guidait ainsi Cox dans sa programmation.
Je l’interrompis (voyant qu’elle entrait dans un état de transe profonde) pour répondre : "Eh bien l’école n’est pas finie, et demain tu seras suffisamment en forme pour y retourner."
Comme je l’avais suggéré, Kelly se sentit en effet en forme le lendemain matin et retourna à l’école. Ce jour-là serait pourtant son dernier jour à l’école primaire de Birchwood.
À peine quelques heures avaient-elles passé que Cathy et moi avons de nouveau été appelés, par l’infirmière cette fois, qui commença à s’inquiéter quand Cathy répondit sincèrement à sa question "Vous ne l’avez pas emmenée chez le médecin ?" par : "Non, mais nous allons le faire."
Plus tard dans la soirée qui suivit, Cathy, Kelly et moi-même partirions d’urgence en voiture une ultime fois afin de quérir une assistance médicale pour Kelly.
À l’hôpital Humana d’Anchorage, Cathy et moi rencontrâmes le Dr. Lorrie Shepherd, une jeune femme aussi brillante que belle qui parut perplexe et quelque peu effrayée en voyant que la condition de Kelly se détériorait inexplicablement. Je demandai à lui parler en privé, ce qu’elle accepta.
Après que je lui aie expliqué pendant environ trente minutes de quoi Cathy et Kelly avaient été sauvées, je lui définis ce qu’était le contrôle de l’esprit. Ayant appris cela, le Dr. Shepherd consulta alors un psychiatre local, le Dr. Pat Patrick – une femme –, pour qu’elle fasse passer des tests à Kelly.
Les tests furent réalisés et le Dr. Patrick pria Cathy, et finalement moi-même, de venir à son cabinet pour une consultation. Ce serait là la première série officielle de tests de Kelly qui indiquait qu’elle souffrait du Trouble de la Personnalité Multiple (TPM), (renommé aujourd'hui Trouble Dissociatif de l'identité) une affection psychique considérée comme grave et résultant de traumas profonds et répétés.
Je demandai ensuite au Dr. Patrick si elle pouvait faire en sorte qu’un spécialiste en termes d’abus sexuels puisse vérifier si Kelly avait été violée. Elle accepta et il s’avéra que les résultats furent positifs. Le Dr. Patrick et Cathy semblèrent presque soulagées de cette confirmation. Ces résultats me rendirent quant à moi malade.
À Humana, l’asthme de Kelly finit par se stabiliser et on la transféra à l’hôpital psychiatrique de Charter North pour des soins intensifs. Le Dr. Patrick la soigna du mieux qu’elle put, sauf que cela se révéla malheureusement inapproprié. Des mois passèrent et les organismes sociaux de l’État de l’Alaska commencèrent à réaliser que Kelly n’allait pas mieux et que le coût de ces soins inefficaces s’élevait à des milliers de dollars par semaine.
Le Dr. Patrick, Cathy et moi-même, aidés par la Tennessee Violent Crimes Claims Commission {Comité de Dénonciations des Violences du Tennessee (N.d.T.)} entreprîmes de chercher un hôpital où notre assurance maladie fonctionnerait. Nous en localisâmes finalement un à Owensboro, dans le Kentucky, qui vantait ses soins spécialisés pour enfants victimes de violences ritualisées. Kelly fut transférée dans le complexe en question et l’État d’Alaska paya tous ses frais de déplacement jusqu’à Owensboro. Nous apprendrions plus tard que cet élégant centre hospitalier n’était rien de plus qu’un entrepôt d’êtres humains qui collectait tous les honoraires que les États et l’État fédéral voudraient bien lui payer par enfant résident. L’endroit était certes beau à voir, mais les soins prodigués à Kelly allaient s’avérer correspondre à "moins que rien".
Au cours de l’été qui précéda le transfert de Kelly dans cet hôpital du Kentucky, et alors que Cathy récupérait de manière satisfaisante, je sentis qu’il n’y aurait pas de danger à les laisser seules pour me mettre en quête d’un travail. Nous avions désespérément besoin d’argent pour voyager, pour vivre, et pour retourner cet hiver dans les "48 d’en bas" avec Kelly.
Je me procurai rapidement un emploi à l’École de Commerce de l’Alaska, où je devais m’occuper d’examiner les candidatures. Deux semaines plus tard, mes "performances" de vendeur me valurent d’être promu du poste de représentant des admissions à celui de Directeur des Admissions. Au cours des cinq mois qui suivirent, je mettais autant d’argent de côté que je le pouvais sur mon salaire pour pourvoir au déménagement qui nous rapprocherait de Kelly. La pensée du supplice que vivraient Cathy et Kelly si elles devaient ne plus être ensemble me remettait en mémoire que j’étais toujours séparé de mon fils, dont je n’avais plus entendu parler depuis bientôt un an.
Sur un conseil malavisé de ma part, Cathy appela son père et quémanda une assistance financière pour guérir Kelly. Son père nous vira 500 dollars pour avoir confirmation de l’endroit où nous étions et commenta son geste d’un "C’est ça, l’Amérique. Tant que tu ne seras pas revenue seule dans le Michigan, pas d’autre argent !". Cette phrase joua un rôle de déclencheur pour le souvenir refoulé qu’avait Cathy de sa propre enfance torturée par Earl O’Brien, qu’on soupçonnait être un pervers et un marchand d’esclaves.
Bientôt, le FBI téléphona à Cathy pour lui dire qu’il fallait qu’elle se rende "volontairement" au bureau du FBI d’Anchorage pour un interrogatoire. À son arrivée, Cathy fut informée qu’elle était sous le coup d’une enquête fédérale pour avoir tenté d’extorquer de l’argent à son père.
Cathy parut étrangement soulagée en entendant cette accusation. J’apprendrais plus tard qu’elle s’était sentie mieux en ayant cette fois la certitude qu’elle n’était pas "dingue" ou en proie à une illusion, et qu’en fait, son père avait vraiment et effectivement fait toutes ces choses, à elle comme à ses frères et sœurs.
L’agent du FBI ne lui cacha pas sa sympathie et il sembla que l’enquête "inspirée" par le DoJ {Department of Justice (N.d.T.)} fût par la suite close sur ses recommandations. L’agent en question ne s’en tint pas là et obtint par le biais de son église mormone une donation en argent qui nous permit de quitter sa juridiction.
Il est intéressant de noter qu’au cours de la même époque, je fus interrogé par un autre agent spécial du bureau du FBI d’Anchorage sur "ce que je savais" concernant un crime sans rapport avec cela, qui impliquait mon ex-femme et son patron avocat en Floride. Je n’étais au courant de rien à ce propos. Je sais aujourd’hui que le FBI tentait de fait de me décrédibiliser en tant que défenseur de Cathy et de Kelly par le biais d’enquêtes menées sur mon compte. Leur affaire mettant en cause mon ex-femme et son avocat fut résolue, et son complice avocat fut jugé coupable de meurtre avec préméditation. Mon ex-femme finit par témoigner contre lui et fut acquittée.
Quelques jours après cependant, je "verrais" mon ex-femme se faire arrêter et passer à "Unsolved Mysteries" {"Mystères inexpliqués" N.d.T.)}, une émission très populaire de la télévision nationale. Cette malheureuse affaire n’impliquait qu’un seul meurtre et allait faire la une des informations nationales durant les semaines à venir. En comparaison, le témoignage de Cathy, où les preuves étaient fournies par des fonctionnaires du FBI, fut classé et délibérément étouffé – pour cause de Sécurité nationale.
En Alaska, la saison d’automne faisait maintenant rapidement place à l’hiver et la "poudre de l’oubli"a (la neige) commençait à recouvrir les montagnes environnantes. L’atmosphère devenait irrémédiablement frisquette. Et ce basculement de saison indiquait un nouveau change- ment au sein de ma nouvelle famille : Kelly n’allait pas tarder à être transférée au Valley Institute of Psychiatry (VIP) du Kentucky.
Cathy et moi économisions le moindre dollar gagné au cours de ma brève nomination à l’École de Commerce de l’Alaska dans la perspective du déménagement qui nous ramènerait dans les "48 (États) d’en bas".
Je m’apercevais à présent que la guérison de Cathy en était au stade de ce qu’on appelle la "fusion". Elle avait depuis longtemps cessé de changer de personnalité et était devenue une vraie et belle dame, logique et intelligente. Plus personne n’était maintenant susceptible de déclencher chez elle le désir de me contrer ou de me quitter. Elle continuait à inscrire ses souvenirs traumatiques dans son journal et avait été déclarée stable par des professionnels.
Le passage sur divers bateaux et ferries d’Anchorage à Seattle avait depuis des mois fait l’objet d’une réservation ferme. Seuls le fret et/ou les véhicules étaient acceptés à bord. Je me procurai deux allers simples sur Alaska Airlines et déposai notre voiture familiale, une "AMC Pacer" de 1976, et nos possessions restantes sur les quais d’Anchorage pour y être embarquées.
De manière soudaine, et alors que nous faisions nos bagages et nous apprêtions à prendre notre vol, un volcan du voisinage entra en éruption et interrompit tout le trafic aérien vers et en provenance d’Anchorage pendant les deux semaines qui suivirent. Nous attendîmes impatiemment la réouverture de l’aéroport. Nous partirions les premiers et Kelly suivrait peu de temps après, accompagnée de son infirmière. Ce serait là notre première étape d’un voyage sans fin en quête de Justice.
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Commentaires
pour info la suite de ce livre vient de sortir début septembre 2014, le titre du livre ( toujours aux éditions Nouvelles terre ) :
"POUR CAUSE DE SÉCURITÉ NATIONALE : De l'ascension d'une esclave lobotomisée de la CIA au statut officiel de lanceuse d'alerte"